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"La vie de commerçants est en jeu": les buralistes alertent sur le trafic de cigarettes en Île-de-France

Les buralistes franciliens dénoncent la concurrence déloyale générée par la vente de cigarettes à la sauvette, où le paquet est vendu deux fois moins cher qu'en bureau de tabac. Mais aussi les autres branches du marché parallèle, comme les achats de tabac en commerces transfrontaliers.

L'une des régions où l'on fume le moins... mais où l'on consomme beaucoup de cigarettes de contrebande. Un collectif de buralistes franciliens sillonne les routes d'Île-de-France pour alerter le public sur la consommation de tabac issue du marché parallèle.

Ce dernier comprend entre autres la vente de cigarettes à la sauvette. Un tabac généralement deux fois moins cher que les paquets vendus chez les buralistes, mais qui menace l'activité de ces commerces.

"On a constaté, qu'au fur et à mesure, le chiffre d'affaires baisse considérablement, et en même temps il y a une augmentation du prix des cigarettes", explique Étienne, buraliste des Yvelines, au micro de BFM Paris Île-de-France.

Le fléau de la contrebande

Installé à Mantes-la-Jolie depuis 2002, Étienne alerte les autorités depuis une dizaine d'années sur les ventes à la sauvette qui ont lieu à proximité même de son commerce. Les buralistes mobilisés dénoncent cette concurrence non seulement déloyale mais surtout illégale, et qui sévit dans de nombreux secteurs de la région, y compris en zone rurale.

"Elle se fait plus de manière familiale ou arrangée dans les salons, ça ne se voit pas. 'Tiens, je me suis débrouillé, j'ai réussi à avoir une cartouche, un carton par-ci par-là", explique Thomas, buraliste dans un village de Seine-et-Marne.

Parmi les villes d'Île-de-France où l'achat de cigarettes de contrebande est le plus important se trouvent notamment Argenteuil (Val-d'Oise), Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) et Paris.

Livrés à eux-mêmes, les buralistes interpellent les élus et déplorent notamment le manque de moyens accordés à la police nationale, qui pourrait, selon eux, être un levier efficace dans la lutte contre la vente de cigarettes à la sauvette.

"La vie de commerçant, économiquement, est en jeu", alerte François Palombi, président de la Confédération des commerçants indépendants. "Et nous allons nous mobiliser. Nous rencontrons notre ministre du commerce (ce) jeudi, et nous allons évoquer le sujet."

Outre les risques pour l'avenir des buralistes indépendants, ces derniers alertent également sur les risques sanitaires liés à la consommation de ces cigarettes de contrebande.

"Nous sommes sur un produit tabac avec une dangerosité", souligne Philippe Alauze, président de la fédération des chambres syndicales des buralistes d'Île-de-France. "On se retrouve devant une illégalité devant la porte. Je pense qu'on a tout perdu, y compris la santé."

Près d'une cigarette sur deux issue du marché parallèle

Si l'Île-de-France est l'une des régions qui compte le moins de fumeurs, avec 21,3%, elle est en revanche la troisième région la plus touchée par ce phénomène de concurrence déloyale liée au tabac.

En effet, 40,9% des cigarettes consommées en Île-de-France proviennent du marché parallèle, qui comprend non seulement la contrebande, mais aussi les cigarettes achetées en commerces transfrontaliers, ou dans les duty-free des aéroports.

Des chiffres révélés par une étude commanditée par la société de tabac Seita, qui établit entre autres le profil des personnes qui achètent ces cigarettes sur le marché parallèle.

"Vous avez un petit peu tous les profils consommateurs. On sait, sur la base des études de Santé Publique France, que les 'CSP Moins' sont la population qui fume le plus, et donc qui est principalement concernée par l'achat des produits moins chers", explique Hervé Natali, responsable des relations territoriales chez Seita.

"Mais ça concerne quand même une large population, parce qu'aujourd'hui au regard des prix pratiqués, et de la facilité avec laquelle on peut se procurer des cigarettes à moitié prix, pratiquement une grande partie de la population parisienne et d'Île-de-France sait comment se procurer des cigarettes."

En juin dernier, une nouvelle convention avait été signée en Seine-Saint-Denis dans le but de lutter contre le trafic de cigarettes, en créant notamment un partenariat entre la police nationale, la douane et les buralistes.

Depuis appliquée dans l'ensemble de l'agglomération parisienne, cette convention semble fonctionner, avec moins de tabac de contrebande en circulation. En 2023, 521 tonnes de tabac avaient été saisies, contre 640 tonnes en 2022. Le gouvernement a également lancé un plan d'action, en vigueur jusqu'en 2025, pour enrayer le trafic.

Oriane Voisine, Bettina de Guglielmo avec Laurène Rocheteau