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Tornades aux Etats-Unis: "A 400 km/h, les vents détruisent tout"

Le 18 novembre 2013, les restes de la ville de Whasington dans l'Illinois, après le passage d'une tornade.

Le 18 novembre 2013, les restes de la ville de Whasington dans l'Illinois, après le passage d'une tornade. - -

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Les Etats du centre et du sud des Etat-Unis semblent abonnés aux tornades qui font chaque année des victimes et des dégâts considérables. Explication sur les causes et effets d'un des plus violents phénomènes météorologiques de la planète.

Dix-huit morts, tel est le lourd bilan de tornades qui ont frappé dimanche le centre et le sud-ouest des Etats-Unis. Des quartiers entiers de plusieurs agglomérations de l'Arkansas, de l'Oklahoma, du Kansas et de l'Iowa ont été détruits. Les autorités locales décrivent des scènes de "chaos", des "villes complètement rasées".

Si le dicton populaire dit que la foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit, les tornades semblent au contraire s'acharner dans cette vallée du Mississippi, encore surnommée "Tornado alley". BFMTV.com fait le point sur ces phénomènes avec Emmanuel Wesolek, président de l'Observatoire Français des Tornades et des Orages violents et Etienne Kapikian, prévisionniste à Météo France.

> Qu'est-ce qu'une tornade?

Ce sont des "tourbillons de vents qui se forment sous les nuages d'orage" explique Etienne Kapikian. Leur diamètre peut aller "de 100 mètres à 1 kilomètre pour les plus importants". Quant à leur durée de vie, les deux spécialistes parlent de "quelques dizaines de minutes" pour les plus importantes. La vitesse de déplacement est communément de "50 à 70 km/h de sorte que le passage à un endroit donné ne dure que de 10 à 30 secondes", précise Emmanuel Wesolek. Heureusement, si ces phénomènes répondent à des règles bien connues, ils restent finalement assez "rares", "sporadiques".

Les tornades sont aussi, comme tout phénomène météorologique, d'intensité variable. Selon leur force "déduite a posteriori par les dégâts qu'elles ont occasionnés", les tornades sont classées sur une échelle croissante dite de Fujita qui comporte six niveaux, de F0 à F5. Les vents générés vont de 150 à 200 km/h, jusqu'à 350 à 400 km/h pour les plus fortes. Le record absolu étant d'un peu plus de 500 km/h.

> Comment se forment les tornades?

Le "moteur des tornades est l'orage", schématise Emmanuel Welosek. Plus celui-ci est violent, plus l'instabilité est grande et plus les risques de voir naître des tornades augmentent. Le "tourbillon" va naître de la "rencontre d'un air chaud et humide présent dans les couches basses de l'atmosphère, avec un air sec dans les strates intermédiaires et des vents forts en haute altitude", précise le prévisionniste de météo France. Un phénomène de "cisaillement vertical est alors créé".

Typiquement, dans les régions des Etats-Unis concernées, "un air chaud et humide remonte du golfe du Mexique par le Texas" et se confronte aux "fronts orageux formés en aval des montagnes Rocheuses". Se créent alors des "super cellules orageuses" ("super cells" en anglais) qui correspondent au "stade ultime d'un épisode orageux". Ainsi, relate Etienne Kapikian, en plus des vents violents, ces orages s'accompagnent "de pluies diluviennes" et, comme cela a été le cas dimanche en Arkansas, de "grêlons dépassant parfois une dizaine de centimètres".

Mais pour qu'une tornade se forme, il ne faut pas qu'elle en soit empêchée par le relief. C'est pourquoi les grandes plaines des Etats-Unis qui ne présentent pas "d'obstacles topographiques" sont propices à la formation des tornades.

> Peut-on les prévoir?

Par définition phénomènes violents et chaotiques, les tornades sont difficilement prévisibles. Cependant, les deux spécialistes s'accordent à dire qu'il est possible de "déterminer un ou deux jours à l'avance une zone à risque de la taille d'un Etat où les conditions pour la création d'une tornade sont réunies". Dimanche, explique le prévisionniste de Météo France le "Storm prediction center" (NDLR: dont le siège est en Arkansas), organisme chargé de la prévision des phénomènes météorologiques violents, avait émis "à juste titre" l'hypothèse d'"un fort risque" pour l'Arkansas, rappelle Etienne Kapikian. Mais souligne Emmanuel Wesolek, "il est impossible de dire à l'avance si la tornade va se former précisément près de la ville de Mayflower ou de Vilonia".

Toutefois, à très court terme soit au maximum "une demi-heure" avant l'arrivée du phénomène, il est possible d'alerter les populations. "Les images radar permettent de voir l'orage se former et se déplacer, bien que la trajectoire soit souvent chaotique, vers une zone plutôt qu'une autre", explique le prévisionniste.

> Pourquoi font-elles autant de dégâts?

Trois facteurs provoquent des dégâts, explique Emmanuel Wesolek. "Le premier élément est la vitesse des vents tourbillonnaires, qui en approchant les 400 km/h pour les plus violentes tornades, détruisent tout sur leur passage. Il n'y a pas beaucoup de bâtiment qui puisse résister, le vent soulève les maisons, les véhicules, le bétail…".

Deuxième élément, la "tornade étant une mini-dépression, son arrivée sur un bâtiment provoque une baisse de pression qui fait imploser les bâtiments de l'intérieur et les fragilisent un peu plus".

Enfin, les débris charriés par la tornade sont "projetés à la vitesse du vent". Et à "souvent plus de 300 km/h, une poutre en bois peut aisément transpercer des murs".

> Rencontre-t-on de tels phénomènes en France?

Il serait confortable de penser que la France est épargnée par le phénomène des tornades. Or, il n'en est rien. Les deux spécialistes rappellent ainsi que le 19 juin 2013, une tornade de type F3 a frappé le nord de la Côte-d'Or. Le 3 août 2008, un phénomène une F4 a frappé Hautmont dans le Nord, faisant trois morts. Encore, le 24 juin 1967 dans le Pas-de-Calais et le 19 août 1845 à Montville en Seine-Maritime (la plus meurtrière avec 70 morts), deux tornades F5 ont frappé notre territoire.

La grande différence tient à la fréquence de ces monstres: "deux par an aux Etats-Unis contre deux par siècle en France", conclut Etienne Kapikian.

David Namias