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Marseille: une journée d'audiences exceptionnelles sur la fraude fiscale

Une dizaine de dossiers de fraudes fiscales "du quotidien" étaient jugés ce lundi au tribunal judiciaire de Marseille lors d'une journée thématique exceptionnelle à valeur pédagogique.

"C'est une atteinte au principe d'égalité des citoyens et à la libre concurrence entre entreprises": une dizaine de dossiers de fraudes fiscales "du quotidien" étaient jugés ce lundi au tribunal judiciaire de Marseille lors d'une journée thématique exceptionnelle à valeur pédagogique.

"L'actualité judiciaire a souvent été marquée par de grandes affaires de fraude fiscale, mais aujourd'hui, ce seront des dossiers du quotidien qui seront évoqués", a prévenu en début d'audience le substitut Jean Moineville, insistant sur la mobilisation des moyens de l'État pour lutter contre ce fléau.

Pour nous, "c'est un objectif à valeur constitutionnelle qui vise à contribuer à l'égalité entre les citoyens", a-t-il souligné, fustigeant les fraudeurs qui "portent atteinte au fonctionnement de la société".

Dix dossier examinés

En 2019, la Cour des comptes chiffrait à une quinzaine de milliards d'euros la seule fraude à la TVA, sans pouvoir quantifier la fraude à l'impôt sur le revenu ni sur les sociétés.

Pour illustrer ce phénomène, la cour d'appel d'Aix-en-Provence organise cette semaine des journées spéciales consacrées à la fraude fiscale dans tous les tribunaux de son ressort.

A Marseille, dix dossiers ont été examinés ce lundi, portant sur des faits de fraudes fiscales, de blanchiment et de fraudes au fonds de solidarité "Covid".

Neuf personnes physiques et cinq personnes morales (débit de boisson, taxi, entreprise de travaux publics, marchand de bien ou cabinet de recrutement) étaient poursuivies pour un préjudice évalué à plus de deux millions d'euros pour l'État. Deux des dossiers ont toutefois été renvoyés et un troisième écarté par les juges.

Une liste des évadés fiscaux

La première affaire examinée a été mise au jour grâce la liste des évadés fiscaux dérobée en 2008 par l'ex-informaticien Hervé Falciani dans les fichiers de la filiale genevoise de la banque HSBC et exploitée ensuite par le fisc français.

A la barre, la prévenue de 77 ans a reconnu avoir été la titulaire de deux profils clients représentant une vingtaine de comptes à la banque suisse. En 2007, le premier totalisait 22.887 dollars (22.297 euros) et le second plus de 11,5 millions de dollars (11,15 ME).

Aucun de ces comptes n'a été déclaré au fisc mais l'intéressée n'est poursuivie par la justice que pour la seule année 2009. Les années précédentes sont couvertes par la prescription et la prévenue a ensuite déménagé en Suisse.

Faute de collaboration avec les autorités helvétiques, l'administration fiscale a fixé son préjudice à 45.266 euros sur la base des comptes de 2007.

La prévenue a affirmé avoir perdu l'essentiel de son argent lors de la crise financière de 2008 mais sans en apporter la preuve.

Évoquant "un faisceau d'indices" prouvant la volonté de frauder, le procureur a requis 24 mois de prison avec sursis, 10.000 euros d'amende, le remboursement des sommes dues à l'État et la saisie de trois contrats d'assurance-vie contenant 300.000 euros. Le jugement a été mis en délibéré au 30 novembre.

Une fraude aux aides pour le Covid-19

Dans un autre dossier, un marchand de bien était poursuivi pour ne pas avoir fait de déclaration fiscale en 2017 et 2018 et n'avoir pas répondu aux appels de l'administration fiscale qui souhaitait le contrôler.

Reconnaissant une négligence, l'homme a expliqué avoir "fait le mort" car il était à l'époque couvert de dettes. Il a été condamné à 10 mois de prison avec sursis probatoire pendant deux ans, 10.000 euros d'amende et l'obligation de rembourser la partie civile, conformément aux réquisitions du parquet.

Dans un troisième dossier, un jeune homme avait profité des aides aux entreprises touchées par le Covid-19 pour percevoir indûment 21.800 euros de l'État en 2020.

Avec l'argent détourné, il s'était offert une voiture d'occasion, avait payé son mariage, des loyers en retard et les courses du quotidien.

"Je regrette énormément. Si je pouvais faire machine arrière", a-t-il bredouillé à la barre, affirmant avoir aujourd'hui honte de son attitude.

Déjà condamné à cinq reprises, essentiellement pour des délits routiers, le prévenu a cette fois été condamné à 10 mois ferme sous bracelet électronique, à la confiscation du véhicule et au remboursement de la partie civile.

G..H. avec AFP