BFM Marseille
Marseille

Marseille: le juteux business des marchands de sommeil, au détriment de la CAF

À Marseille, des personnes achètent des biens insalubres à de faibles prix et les exploitent ensuite en bénéficiant des allocations logement.

À Marseille, les marchands de sommeil s'enrichissent en profitant de la CAF (Caisse d'allocations familiales). Ce business est permis grâce à des ventes de logements dans un mauvais état qui sont fréquemment proposées sur des sites d'annonces immobilières, "locataire compris".

Sur le site Le Bon Coin, un appartement trois pièces de 48m2 est proposé à la vente pour 55.000 euros. Il est situé dans la cité des quartiers Nords du Parc Corot, connue pour abriter de nombreux logements insalubres. Sur les photos présentes sur l'annonce, de la moisissure apparente est d'ailleurs visible dans des chambres qui paraissent exiguës.

"La CAF paie intégralement le loyer".

Le bien présenté à la vente est par ailleurs déjà occupé par un locataire. Le vendeur précise que le loyer payé par l'actuel locataire est de 610 euros, charges comprises. Une autre mention est faite en bas de l'annonce: "la CAF paie intégralement le loyer".

Contacté au téléphone par une journaliste de BFM Marseille se faisant passer pour une investisseuse intéressée, le vendeur lui assure une rentabilité d'au moins 10% grâce ce bien. Pour arriver à cela, il dévoile les dessous de cette annonce ainsi que la situation de son locataire.

"C'est une personne qui a trois enfants, qui ne travaille pas, son compagnon travaille à gauche à droite. La CAF me paie directement le loyer à moi. Vous pouvez même avoir des loyers supérieurs, il suffit de dire que vous avez fait des travaux, que vous avez refait le sol, que vous avez refait des travaux à l'intérieur, vous n'avez pas à vous justifier", explique-t-il.

"Des filières qui se créent sur la misère des gens”

Selon le vendeur de cet appartement, ce genre de fraude à la CAF est "monnaie courante dans le quartier". Les personnes profitant du système des allocations logement sont aujourd'hui appelées les "Cafistes".

La députée Agir, de Marseille Alexandra Louis qui participé à la rédaction d'un rapport sur l'habitat indigne, a elle dénoncé cette "annonce immonde" sur son compte Twitter ce jeudi.

"Les filières qui se développent et qui se créent sur la misère des gens, c'est juste inacceptable", dénonce de son côté, Lionel Royer-Perreaut, 2e vice-président du conseil de Territoire Marseille Provence délégué à l'Habitat.

Si les autorités ainsi que la Caisse d'allocations familiales sont au courant du développement de cette pratique, il est difficile de lutter contre ce phénomène. Selon la CAF contactée par BFM Marseille, lorsqu'un propriétaire refuse d'entreprendre des travaux, le locataire doit signaler que son logement n'est pas décent auprès du "guichet unique départemental".

"Si le diagnostic conclut à un logement non-décent, les aides au logement sont conservées par la CAF pour une durée maximale de 18 mois. Sans signalement pas de diagnostic, sans diagnostic, pas de suspension", explique l'organisme.

Selon les chiffres de la CAF, 243.417 bénéficiaires des allocations logement étaient dénombrés dans les Bouches-du-Rhône en 2020.

Manon Mugica avec Gauthier Hartmann