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Lyon: les figures de Paul Bocuse et Antoine de Saint-Exupéry récupérées par un groupuscule d'extrême droite

Héritier de l'association d'extrême-droite dissoute Génération identitaire, le groupuscule Les Remparts a organisé une campagne d'affichage, en utilisant les noms de grandes figures lyonnaises. Sans consulter leurs descendants, qui envisagent des poursuites.

Le 21 octobre dernier, des slogans xénophobes ont émaillé la manifestation lyonnaise en hommage à Lola, dont le meurtre à l'âge de 12 ans a soulevé une vague d'émotion nationale. La manifestation, qui a rassemblé 100 à 150 personnes, a été revendiquée par un militant des Remparts. Ce groupuscule d'extrême droite, créé l'année dernière, est une structure héritière de l'association Génération identitaire, dissoute depuis.

Sur les murs de Lyon, le groupuscule d'ultradroite a lancé, en mai 2021, une campagne d'affichage qui fait polémique, remis sur le devant de la scène après un article du Parisien. Baptisée "Défends ta ville", elle utilise les noms de grandes figures lyonnaises, comme le chef Paul Bocuse et l'écrivain Antoine de Saint-Exupéry. "100% mâchon, 0% kebab", peut-on lire sur les affiches reprenant le nom du cuisinier, tandis que l'auteur du Petit prince est décrit comme un "écrivain combattant et enraciné".

Campagne d'affichage du groupuscule d'extrême droite lyonnais "Les Remparts"
Campagne d'affichage du groupuscule d'extrême droite lyonnais "Les Remparts" © BFM Lyon

Une action dénoncée par les descendants de Bocuse et de Saint-Exupéry

Une initiative que goûtent peu les descendants des deux hommes, qui n'ont pas été consultés.

"Certains s'accaparent une image de manière inappropriée. Paul Bocuse a toujours été dans la mesure, il n'a jamais fait de politique. C'est quelqu'un qui a défendu les valeurs françaises pendant la Seconde guerre mondiale. C'était quelqu'un de très engagé, mais jamais dans les extrêmes", a ainsi réagi Paul-Maurice Morel, président de la fondation Paul Bocuse, sollicité par BFM Lyon.

De son côté, Olivier d'Agay, neveu d'Antoine de Saint-Exupéry, "réfute toute utilisation du nom et de l'image de [son] oncle par un groupe politique". Et de rappeler que l'idéologie des Remparts "contraire à toute la philosophie de Saint-Exupéry. Il prônait la tolérance et l'ouverture des autres, c'est totalement contradictoire à son message".

"Ils incarnent un certain esprit lyonnais que nous admirons"

Le groupuscule, interrogé par BFM Lyon, affirme que sa campagne d'affichage avait pour objectif de "promouvoir l’histoire, la culture et l’identité lyonnaise à travers des personnages historiques auxquels la population peut s’identifier". Le collectif reconnaît ne pas avoir "demandé d'accord préalable" aux familles. "Nous n’avons jamais échangé avec Saint Ex (sic) ou Paul Bocuse en personne. Nous leur rendons hommage à travers notre affichage car ils incarnent un certain esprit lyonnais que nous admirons", ajoutent-ils.

Les proches de Paul Bocuse et ceux de Saint-Exupéry n'excluent pas de saisir la justice. "On a demandé à notre avocat ce que nous pouvons faire sur le plan juridique", a notamment précisé Olivier d'Agay.

La classe politique lyonnaise s'est d'ores et déjà élevée contre ce nouveau groupuscule identitaire. Invité sur le plateau de BFM Lyon début novembre, le député Renaissance du Rhône Thomas Rudigoz a demandé "sa dissolution". Même son de cloche du côté de la mairie: après les slogans proférés à la manifestation en hommage à Lola, Grégory Doucet avait indiqué avoir écrit au président Emmanuel Macron, après avoir déjà alerté les ministres de l'Intérieur Gérald Darmanin et de la Justice Éric Dupond-Moretti, pour demander la "dissolution immédiate" des Remparts.

L'édile réclame également la fermeture définitive du bar associatif "La Traboule", connu comme un fief des nostalgiques de Génération identitaire et la salle de sport "L'Agogé", qui se présente comme "la première salle de sport identitaire de France". Le parquet de Lyon a, lui, ouvert une enquête pour "provocation à la haine".

Hugo Frances avec Fanny Rocher