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Isère: à Saint-Romain-de-Jalionas, une réunion publique pour alerter sur le projet de barrage

Environnement, viabilité, sécurité, passé gallo-romain de la commune: le maire a expliqué samedi à ses administrés pourquoi il s'oppose à la construction de l'ouvrage.

Samedi, Jérôme Grausi a revêtu son costume et son écharpe de maire. Puis il a pris un micro et exprimé face à ses administrés tout le mal que lui inspire le projet de barrage hydroélectrique qui menace de défigurer, selon lui, le paysage qui entoure sa commune.

Le sujet tient à cœur au maire sans étiquette de Saint-Romain-de-Jalionas, attaché au caractère bucolique et verdoyant de sa ville nord-iséroise, séparée du département de l'Ain par les eaux du Rhône. C'est pourquoi il souhaitait informer les habitants de la "menace" qui se profile.

Plusieurs dizaines d'entre eux ont pris place sur des bancs installés sous une tonnelle à quelques pas seulement de l'endroit où pourrait s'installer le barrage hydroélectrique. Environnement, viabilité, sécurité, passé gallo-romain de la commune: les interlocuteurs se sont relayés au micro et ont mis en exergue un certain nombre de problématiques posées par le projet.

Le lieu où pourrait être implanté un barrage hydroélectrique près de Saint-Romain-de-Jalionas.
Le lieu où pourrait être implanté un barrage hydroélectrique près de Saint-Romain-de-Jalionas. © BFM Lyon

230 millions d'euros de budget

Certains ont été convaincus par les arguments avancés, d'autres moins. Michel est l'un des quelque 3400 habitants de Saint-Romain-de-Jalionas.

"Je n'ai pas un avis tranché sur le sujet, reconnaît-il au micro de BFM Lyon. Simplement, si ce n'est pas viable économiquement, ce qui semble être le cas, aucun intérêt de dégrader le paysage, d'apporter des nuisances à la faune, la flore."

Le coût du barrage est estimé à 230 millions d'euros. Porteuse du projet, la Compagnie nationale du Rhône (CNR) entend avec cet ouvrage atteindre une production supplémentaire d'énergie hydroélectrique d'environ 140 GWh par an. "Soit la consommation énergétique hors chauffage de 60.000 habitants", souligne-t-elle.

"Ils parlent aussi d'un pont-barrage. Ça apporterait de la circulation dans notre village. Ça n'a aucun intérêt", fustige également Michel. L'intéressé craint notamment que le barrage transforme la ViaRhôna. Alors que "c'est magnifique pour se balader le dimanche".

"Quand on connaît l'évolution des débits du Rhône..."

Benjamin, lui, vit à Crémieu, à moins de dix minutes en voiture de Saint-Romain-de-Jalionas. Il est venu assister à la réunion, un enfant en bas âge dans les bras.

"Quand on connaît l'évolution des débits du Rhône sur les 30 prochaines années (...), on se pose réellement la question d'un projet sur le Rhône qui, dans quelques années, verra couler très peu d'eau", déplore-t-il, assurant s'appuyer sur "des études récentes".

Pour Jérôme Grausi, le barrage hydroélectrique est d'autant moins nécessaire que la centrale nucléaire du Bugey ne se trouve qu'à quelques encablures de sa commune.

Un projet de barrage sème la discorde à Saint-Romain-de-Jalionas.
Un projet de barrage sème la discorde à Saint-Romain-de-Jalionas. © BFM Lyon

Des études en cours

"On sait que la centrale réchauffe le Rhône, parce qu'il y a deux réacteurs qui fonctionnent par le réchauffement du Rhône. Derrière, on va récupérer de l'eau chaude. Ça va avoir un impact énorme sur les poissons, sur toute la faune et la flore. Forcément, on ne peut pas être pour ce projet", peste-t-il.

L'élu a récemment reçu le soutien d'Anne Grosperrin, vice présidente de la métropole de Lyon en charge des cycles de l'eau. Au même titre que diverses associations prônant la protection de l'environnement, elle fait part sur X de ses "préoccupations".

Presque vieux d'un siècle, ce projet de barrage hydroélectrique s'inscrit dans le cadre d'une volonté étatique d'accélérer le développement des énergies renouvelables. Objectif affiché: en atteindre 33 % en 2030, avant la neutralité carbone à horizon 2050. Des caps définis dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE).

Si le calendrier prévisionnel est tenu, les études de faisabilité pilotées par la CNR se termineront fin octobre. S’ensuivra une concertation publique d’une durée de trois mois. Charge reviendra enfin à l'État d'acter ou non le lancement du projet début 2024. La mise en service doit survenir en 2033 au plus tard. Cette perspective, Jérôme Grausi est bien décidé à la combattre.

Chloé Bounameaux avec Florian Bouhot