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Violences en Afghanistan après l'autodafé d'un Coran

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Dix personnes ont trouvé la mort samedi à Kandahar, dans le sud de l'Afghanistan, au deuxième jour de manifestations contre l'autodafé d'un exemplaire du Coran par un pasteur intégriste américain.

Les violences ont fait également fait 83 blessés, ont précisé les autorités.

La veille, à Mazar-e-Sharif dans le nord du pays, sept employés étrangers de l'antenne locale des Nations unies avaient été tués par la foule.

A Kandahar, un groupe de 150 hommes environ est descendu dans les rues pour dénoncer l'initiative du prédicateur de Floride Terry Jones, qui a brûlé un Coran en public le 20 mars dernier, devant une cinquantaine de personnes, mettant à exécution une menace qu'il avait déjà brandie l'an dernier.

L'autodafé, diffusé sur son site internet, est d'abord passé relativement inaperçu avant que le président Hamid Karzaï le critique et que des appels à la justice soient lancés durant les sermons de la journée de prières du vendredi, incitant des milliers de personnes à manifester dans plusieurs villes.

Interrogé sur les conséquences de son acte, le pasteur américain a déclaré à la BBC qu'il ne se sentait pas responsable de ces violences.

LAPIDÉS OU BATTUS À MORT

Les protestataires de Kandahar, dont beaucoup brandissaient le drapeau blanc des taliban et criaient des slogans favorables aux "étudiants en religion", ont incendié des pneus, saccagé des magasins et un lycée de filles. Les violences ont duré plusieurs heures. Deux policiers figurent parmi les morts, a déclaré un responsable afghan.

L'un des policiers a été tué par balles, tout comme plusieurs civils. Les autres ont été lapidés ou battus à mort, a déclaré Abdul Qayum Pukhla, en charge des affaires de santé pour la province.

Un photographe de presse a été frappé à la tête. Ses agresseurs ont parlé de le tuer et ont détruit son appareil photo. La police a maintenu à distance de la foule les autres journalistes présents.

Zalmay Ayoubi, porte-parole du gouverneur de la province de Kandahar, a déclaré que la manifestation avait été organisée par les taliban, les accusant d'utiliser l'autodafé comme un prétexte pour provoquer des troubles dans une ville où leur influence s'est étiolée sous les coups des forces de l'Otan.

D'autres rassemblements ont eu lieu samedi, à Kaboul, Herat (ouest) et dans la province septentrionale de Tahar sans donner lieu à des violences.

L'ONU REVOIT SES MESURES DE SÉCURITÉ

Vendredi, à Mazar-e-Sharif, ville jugée jusqu'ici suffisamment calme pour devenir prochainement l'une des premières à repasser sous contrôle des forces afghanes, le personnel de l'antenne de l'Onu a été submergé.

Outre les sept employés des Nations unies tués, les affrontements qui ont duré plusieurs heures ont fait cinq morts et une vingtaine de blessés parmi les manifestants.

Selon le gouverneur de la province de Balkh, Ata Mohammad Noor, ce sont des activistes islamistes qui ont profité de cette manifestation de plusieurs milliers de personnes pour attaquer le local de l'Onu. Un responsable de l'Onu a également laissé entendre que des provocateurs avaient pu déclencher l'émeute.

Les taliban ont démenti avoir joué un rôle dans l'attaque. "Les taliban n'ont rien à voir là-dedans. C'était purement un acte de musulmans responsables", a déclaré leur porte-parole Zabihullah Mujahid par téléphone, d'un endroit non divulgué.

"Les étrangers ont retourné contre eux le courroux des Afghans en incendiant le Coran", a-t-il dit.

Selon Zemari Bashery, porte-parole du ministère de l'Intérieur, les premiers rapports de police suggèrent que l'assaut n'était pas prémédité.

Le bilan de l'attaque est le plus meurtrier pour l'Onu en Afghanistan. Fin octobre 2009, cinq employés des Nations unies avaient été tués dans l'attaque de leur résidence à Kaboul par les insurgés.

Un porte-parole de l'Onu a annoncé une révision des mesures de sécurité mais a assuré que l'organisation resterait en Afghanistan. Le président afghan Hamid Karzaï a condamné l'agression, tout comme Paris, Washington et Moscou.

Jean-Stéphane Brosse pour le service français