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TOUT COMPRENDRE - Combats en cours, offensive russe imminente: quelle est la situation en Ukraine?

Un char ukrainien près de Chasiv Yar, le 14 février 2023.

Un char ukrainien près de Chasiv Yar, le 14 février 2023. - YASUYOSHI CHIBA

Les signes d'une offensive russe majeure et imminente s'accumulent sur le front ukrainien d'après les informations des services de renseignement. De surcroît, les combats sont toujours très durs dans l'est du pays. BFMTV.com fait le point ce mercredi sur l'évolution du conflit.

Les services de renseignement ukrainien la redoutaient - et ce à compter du 6 février - "sous dix jours", le ministre de la Défense Oleksiy Reznikov plutôt "autour du 24 février". Qu'importe la date, chaque jour qui passe rend la crainte d'une offensive majeure de l'armée russe sur le front ukrainien plus tangible. Les signes d'un déclenchement imminent de l'opération s'accumulent sous les yeux des autorités locales et de l'Otan.

En attendant cette nouvelle agression, ce n'est pas la "drôle de guerre" pour autant. Les combats font rage, au contraire, dans l'est de l'Ukraine. BFMTV.com fait ce mercredi le point sur l'état actuel du conflit et ses évolutions à venir.

• Pourquoi ces ballons dans le ciel ukrainien?

Il fallait lever la tête pour évaluer la menace ce mercredi. L'administration militaire de Kiev a ainsi signalé le survol de la capitale ukrainienne par six ballons russes, déclarant que la défense anti-aérienne de la ville était parvenue à les abattre pour la plupart. L'objectif poursuivi à travers l'envoi dans les airs de ce matériel équipé de dispositifs rétroréfléchissants et d'outils de reconnaissance? "Détecter et épuiser nos défenses aériennes", toujours d'après cette source.

Yuriy Ignat, le porte-parole de l’armée de l’air ukrainienne, avait évoqué ces dirigeables dans un entretien diffusé plus tôt ce mercredi sur Telegram et traduit par une journaliste de BFMTV:

"Les Russes lancent des ballons dotés de réflecteurs métalliques dans le ciel ukrainien à des fins de reconnaissance. (...) Il s’agirait d’une boule d’un mètre et demi remplie de gaz et volant vers le haut. Un diffuseur d’angle est attaché à la corde. Le signal de la station radar est reflété par l’émetteur, les ingénieurs radio doivent réagir".

Et le porte-parole de reprendre: "L'ennemi veut que les forces ukrainiennes du système de défense antimissile dépensent leurs forces et leurs moyens". Yuriy Ignat a relevé la dernière vertu revêtue par ces ballons pour les Russes: leur permettre de préserver leurs stocks de drones.

• Quels sont les combats en cours?

Mais la Russie ne s'est pas contentée de lancer ses yeux dans le ciel. Elle a aussi frappé depuis ces nuages. Le Kiyv Independent a en effet affirmé que l'envahisseur avait bombardé un immeuble résidentiel de la ville de Pokrovsk, à 70 km de Donetsk, blessant au moins douze personnes d'après des responsables de la région cités par le média.

C'est toutefois le statu quo qui prévaut à terre, où les combats se concentrent toujours autour des communes de Voulhedar et de Bakhmout. Après plus de trois mois de siège, la première défie toujours la machine de guerre russe, l'assiégeant ayant déjà laissé 5000 soldats (tués, blessés, ou capturés) sur le terrain d'après l'armée ukrainienne, dont les propos ont été relayés ici par Newsweek. Quant à Bakhmout, devenue l'un des emblèmes de la résistance opiniâtre des Ukrainiens sur le front, elle échappe toujours à l'emprise de l'agresseur. Et ce, de l'aveu même du groupe de mercrenaires Wagner.

"On ne fera pas la fête de sitôt. Bakhmout ne sera pas prise demain, parce qu'il y a une forte résistance, un pilonnage, le hachoir à viande est en action", a ainis déclaré le service de presse de son chef, Evguény Prigojine, sur Telegram mardi.

L'Institute for the Study of War, un cercle de réflexion portant une attention particulière au conflit, a ajouté à ce tableau les actions hostiles des troupes russes en direction de Kupyansk et le long de la ligne unissant Svatove à Kreminna.

• Comment la Russie se prépare-t-elle à l'offensive?

Les pertes russes au sol annoncent sans doute un changement de pied prochain des Russes. Ou plutôt un changement d'ailes. C'est du moins ce que croient deux cadres des renseignements occidentaux qui se sont exprimés, mardi, auprès du Financial Times, assurant que les Russes massaient avions et hélicoptères à la frontière.

"Les forces terrestres russes sont pas mal dégarnies donc c'est l'indication la plus claire que les Russes vont se tourner vers la bataille aérienne", a d'abord confié un membre de l'administration américaine. Un diplomate exerçant auprès de l'Otan a pour sa part mis en lumière le bon état de leur chasse: "Plus de 80% de leur armée de l'air est en lieu sûr et opérationnel".

Tandis que les alliés de l'Ukraine acheminent actuellement des cargaisons d'armements et des cohortes de véhicules supplémentaires à destination du front, chars lourds en tête, il s'agit donc d'après eux d'exporter en priorité de nouvelles munitions et de nouveaux missiles pour approvisionner une DCA ukrainienne qui devrait en avoir, sous peu, grandement besoin.

• L'Ukraine a-t-elle les moyens de faire face à une opération majeure?

Mais c'est justement côté obus que le bât blesse. Le secrétaire général de l'Alliance atlantique a glissé, lors d'un point-presse tenu lundi: "Le rythme actuel d'utilisation de munitions par l'Ukraine est beaucoup plus élevé que notre rythme actuel de production". "Cela met nos industries de défense sous pression", a pointé Jens Stoltenberg.

Sans doute faut-il attribuer à cette pression, celle que les Etats-Unis mettent désormais sur l'Ukraine. Lundi, citant une source anonyme au sein du gouvernement américain, le Washington Post a assuré que l'administration Biden cherchait activement à "faire comprendre aux Ukrainiens que les Etats-Unis ne pourraient pas faire tout et n'importe quoi pour eux indéfiniment".

Jens Stoltenberg a pourtant insisté ce mercredi: "Oui, des choses se passent, mais on doit continuer, on doit faire encore plus, parce qu'il faut absolument fournir l'Ukraine en munitions. Ça devient une guerre d'usure et une guerre d'usure est une guerre de logistique".

• Une contre-offensive ukrainienne dès le printemps?

Malgré les réserves distillées dans le secret des tractations de chancelleries, les Etats-Unis n'ont de toutes façons aucunement l'intention de lâcher Volodymyr Zelensky et les siens. Mardi, en marge d'une réunion internationale à Bruxelles, lors de laquelle il a pu rencontrer son homologue ukrainien Oleksiy Reznikov, le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, a même promis: "Les États-Unis et les Alliés promettent d’aider l'armée ukrainienne à lancer une contre-offensive au printemps".

Précédemment, des informations publiées par l'Institute for the Study of War faisaient état d'un calendrier différent pour une telle intervention, la situant plutôt "à l'été".

• Quelle est l'attitude du Kremlin?

Les Ukrainiens et leurs alliés ne sont pas les seuls à accélérer le mouvement. Les institutions russes bousculent également leur agenda.

En effet, d'après l'agence officielle Ria Novosti ce mercredi, le Conseil de la Fédération de Russie et la Douma - respectivement les chambres haute et basse du Parlement russe - ont décidé d'avancer au 22 février une réunion initialement prévue au 1er mars et qui portera sur "l'intégration des nouvelles régions (les provinces ukrainiennes annexées, NDLR) dans le cadre juridique de la Russie". La veille, Vladimir Poutine se sera adressé à la nation, en prenant la parole face aux députés. Un discours que l'autocrate voudra sûrement galvanisant à l'intérieur de ses frontières, et lourds de menaces au-delà.

Robin Verner
Robin Verner Journaliste BFMTV