BFMTV
International

Procédure de destitution: la Maison Blanche aurait tenté d'"étouffer" l'affaire ukrainienne

Joseph Maguire, directeur de l'agence nationale du renseignement (DNI) était interrogé aujourd'hui

Joseph Maguire, directeur de l'agence nationale du renseignement (DNI) était interrogé aujourd'hui - Chip Somodeville / Getty Images North Amercia / AFP

Le signalement de l'appel téléphonique suspect de Donald Trump à l'Ukraine a été rendu public ce jeudi. On y découvre que la Maison Blanche serait intervenue pour dissimuler l'appel, et que le lanceur d'alerte parle dès le début d'une demande d'"ingérence" de l'Ukraine.

La publication d'un nouveau document ajoute au scandale de l'appel téléphonique entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky. Dans le signalement rendu public ce jeudi, le lanceur d'alerte affirme que Donald Trump aurait sollicité l'"ingérence" de l'Ukraine dans la présidentielle américaine de 2020, et que la Maison Blanche aurait essayé de dissimuler cet appel téléphonique. 

Cette révélation devrait constituer une nouvelle pièce pour la procédure de destitution que les Démocrates ont ouvert mardi, une démarche rarissime aux lourdes conséquences à près de 400 jours du scrutin. Nancy Pelosi, leader des Démocrates, a réagi en affirmant que la Maison Blanche aurait cherché à "étouffer" l'affaire ukrainienne.

Dans un tweet en lettres capitales, Donald Trump a appelé les républicains à "se battre", face aux démocrates qui "essayent de détruire le parti républicain et tout ce qu'il soutient". "L'avenir du pays est en jeu", a ajouté le milliardaire qui dénonce à cor et à cri depuis deux jours "la pire chasse aux sorcières de l'histoire des Etats-Unis".

La Maison Blanche serait intervenue

La crise trouve sa source dans un échange téléphonique, le 25 juillet, entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, au cours duquel le président américain a demandé à son homologue ukrainien d'enquêter sur le démocrate Joe Biden, parmi les favoris de la primaire démocrate en vue de l'élection de 2020.

La conversation a suscité l'inquiétude d'un mystérieux lanceur d'alerte, membre des services de renseignement, qui avait, le 12 août 2019, transmis un signalement sur la teneur de cet appel.

Le président "a utilisé les capacités de sa fonction pour solliciter l'ingérence d'un pays étranger dans l'élection de 2020 aux Etats-Unis", dénonce-t-il dans ce document, rendu public après un bras de fer entre le Congrès et l'exécutif. Dans les jours suivants cet échange, poursuit-il, les avocats de la Maison Blanche "sont intervenus pour 'verrouiller' toutes les archives liées à l'appel téléphonique", notamment en ordonnant de les conserver dans un "système électronique distinct" de celui utilisé habituellement.

Pour lui, cela prouve que l'entourage du président "comprenait la gravité de ce qui s'était passé". Il ajoute que, selon ses sources, deux hauts responsables américains ont ensuite "donné des conseils aux autorités ukrainiennes sur la manière de 'contourner' les demandes du président".

"Etouffer l'affaire"

L'auteur de ce signalement, jugé "crédible" par l'inspecteur général des services du renseignement, précise ne pas avoir directement assisté à l'appel mais avoir échangé avec plus d'une demi-dizaine de responsables "très perturbés" par cet appel. Interrogé jeudi au Congrès, le directeur du renseignement national (DNI) Joseph Maguire, qui avait bloqué la transmission de ce signalement, a déclaré ne pas connaître l'identité du lanceur d'alerte.

"Rien n'a changé avec la publication de ce signalement", a balayé la Maison Blanche dans un communiqué, en évoquant une "compilation de récits de troisième main et d'articles de presse", "qui ne montrent rien d'inapproprié".

Mais les démocrates ont dénoncé une tentative de la Maison Blanche d'étouffer l'affaire. "Le président a trahi notre pays et il a essayé de le cacher", a ainsi déclaré le parlementaire Mike Quigley.

L'appel suspect a été publié en intégralité

La veille, la publication du compte-rendu de la conversation téléphonique au coeur du scandale avait suscité le même type de réaction, Donald Trump et Zelensky qualifiant leur échange d'"anodin" et de "normal", les démocrates le jugeant "accablant".

Dans cette discussion, l'asymétrie de la relation est notable mais Donald Trump ne brandit pas de menace concrète. Il invite en revanche M. Zelensky à la Maison Blanche. Les Etats-Unis ont "été très très bon à l'égard de l'Ukraine" sans que cela ait été "forcément réciproque", souligne Donald Trump, avant d'évoquer Joe Biden et les affaires en Ukraine de son fils Hunter.

"Beaucoup de gens veulent en savoir plus sur le sujet, donc cela serait formidable si vous pouviez vous pencher dessus", dit-il à Volodymyr Zelensky, un novice en politique élu en avril à la tête de son pays très dépendant de l'aide américaine.

A quelques 400 jours du scrutin, la chef des démocrates au Congrès Nancy Pelosi a annoncé mardi, après avoir tempéré les ardeurs de ses troupes pendant des mois, que la Chambre des représentants allait lancer une procédure de destitution contre le président. Compte-tenu de la majorité démocrate à la Chambre, Donald Trump risque bien d'être mis en accusation ("impeachment en anglais), ce qui n'est arrivé qu'à deux de ses prédécesseurs. Les républicains contrôlant le Sénat qui, selon la Constitution, sera chargé de le juger, il a de bonnes chances de rester en poste.

J. G. avec AFP