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Perquisitions et arrestations à Damas, la tension monte

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par Khaled Yacoub Oweis AMMAN (Reuters) - La police secrète a effectué dans la nuit des perquisitions et des arrestations près de Damas alors que...

par Khaled Yacoub Oweis

AMMAN (Reuters) - La police secrète a effectué dans la nuit des perquisitions et des arrestations près de Damas alors que l'opposition au régime autoritaire de Bachar al Assad gagne du terrain en Syrie, ont rapporté dimanche des militants des droits de l'homme.

Les forces de sécurité et des individus armés soutenant le régime ont tiré vendredi sur des manifestants réclamant des libertés politiques et la fin de la corruption. Le lendemain, ils ont ouvert le feu lors des funérailles des victimes de la veille, faisant au moins 112 morts en deux jours.

Ce bilan est le plus lourd et la mobilisation est sans précédent depuis les premières manifestations, il y a un peu plus de cinq semaines, à Deraa, dans le Sud limitrophe de la Jordanie.

Le président Assad a levé jeudi l'état d'urgence en vigueur depuis que le parti Baas s'est emparé du pouvoir il y a 48 ans.

La mesure visait à apaiser les manifestants et à désamorcer les critiques internationales, mais pour les protestataires, la répression qui a suivi montre qu'elle n'a guère de portée.

"Ce qui s'est passé vendredi est un tournant. Le régime (...) a montré que les réformes n'étaient que chiffon de papier mais qu'elles ne se concrétisaient pas dans la rue", a déclaré à Reuters Ammar Qurabi, un activiste.

"Je crains que tous veuillent maintenant la chute du régime", ajoute-t-il.

"Bachar al Assad, traître, lâche. Emmène tes soldats dans le Golan", scandaient samedi des manifestants, mettant Assad au défi de reprendre le plateau syrien occupé par Israël depuis la Guerre des Six Jours de 1967 et annexé en 1981.

ARRESTATIONS

Assad a succédé à son père, Hafez al Assad, décédé en 2000 après avoir dirigé la Syrie pendant trente ans. Les slogans hostiles reflètent le durcissement des revendications des manifestants qui réclamaient initialement davantage de libertés mais qui demandent maintenant son départ.

Sur le plan international, les critiques se sont aussi intensifiées. Les Occidentaux s'étaient au départ montrés mesurés parce qu'ils espéraient qu'Assad pourrait mettre en oeuvre de véritables réformes et parce qu'une révolution en Syrie bouleverserait la carte politique du Proche-Orient.

Assad a renforcé l'alliance anti-israélienne conclue par son père avec l'Iran et il a soutenu le Hezbollah et le Hamas. Il a aussi rétabli l'influence syrienne au Liban et a eu des discussions de paix indirectes avec Israël.

Barack Obama a exhorté vendredi Assad à mettre fin au "recours scandaleux à la violence pour réprimer les manifestations". Les autorités syriennes, qui imputent les violences à des groupes armés, ont rejeté les critiques du président américain.

Dimanche aux premières heures, des agents en civil équipés de fusils d'assaut ont fait irruption dans des maisons d'Harasta, un faubourg de Damas, et ils ont arrêté des militants.

L'Organisation nationale pour les droits de l'homme en Syrie a déclaré que Daniel Saud, un militant habitant Banias, avait lui aussi été arrêté samedi.

Des manifestations ont eu lieu ce week-end dans la ville portuaire de Lattaquié, à Homs, à Hama, à Damas et dans ses faubourgs ainsi que dans des villes du sud.

APPEL AU CONSEIL DE SÉCURITÉ

Depuis le début du mouvement de contestation, le 18 mars, on déplore 350 morts et des dizaines de disparus, selon des militants des droits de l'homme.

Assad a fait expulser les représentants de la plupart des médias étrangers lors de la répression des manifestations, de sorte qu'il est difficile de vérifier de manière indépendante les violences signalées.

Les manifestants ont recours à l'internet pour faire parvenir des images des violences.

Une vidéo diffusée sur le site YouTube montre une foule défilant vendredi près de la place des Abbassides à Damas en scandant: "Le peuple veut renverser le régime".

Des coups de feu éclatent. Les manifestants lèvent les mains pour montrer qu'ils ne sont pas armés. Les tirs s'intensifient. Un jeune homme tombe, la tête et le dos ensanglantés. Ses compagnons le soulèvent mais laissent échapper son corps lorsque les tirs reprennent.

Dans le village d'Abada, à 10 km de Damas, des militants des droits de l'homme ont rapporté que les forces de sécurité avaient empêché le transport à l'hôpital de personnes blessées dans les manifestations de vendredi. Un religieux en contact avec la ville de Nawa, proche de Deraa, a rapporté que, selon des habitants, les forces de sécurité avaient tiré à l'aveuglette.

Chose impensable il y a seulement cinq semaines en Syrie, deux députés représentant Deraa au Parlement ont démissionné samedi pour protester contre la mort de manifestants.

La Commission internationale des juristes (CIJ), ONG de défense des droits de l'homme, a affirmé dimanche que le Conseil de sécurité de l'Onu devait enquêter sur les "tueries" imputées aux forces de sécurité syriennes.

"Il (le Conseil de sécurité) doit décider de créer une mission d'enquête internationale et s'il y a suffisamment de preuves, de renvoyer le dossier à la Cour pénale internationale", a déclaré Said Benarbia, juriste chargé du Proche-Orient et de l'Afrique du Nord au CIJ.

Avec Mariam Karouny à Beyrouth et Stephanie Nebehay à Genève; Nicole Dupont pour le service français