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Australie: un musée d'art poursuivi en justice pour une exposition réservée aux femmes

Photo diffusée par MONA Museum pour présenter l'exposition de l'artiste Kirsha Kaechele en Australie, le 11 mars 2022.

Photo diffusée par MONA Museum pour présenter l'exposition de l'artiste Kirsha Kaechele en Australie, le 11 mars 2022. - MONA Museum - Instagram

Kirsha Kaechele, une artiste américaine, a conçu un salon exclusivement réservé aux femmes pour dénoncer les anciens pubs australiens autrefois interdits à ces dernières. Son oeuvre est exposée au musée d'Art de Hobart.

En Australie une plainte pour discrimination a été déposée à l'encontre de Kirsha Kaechele, une artiste américaine, après qu'un homme s'est vu refuser l'entrée à une de ses expositions "réservée aux femmes", rapporte la télévision australienne ABC News.

Le Musée d'Art ancien et nouveau (MONA) de Hobart dans l'État de Tasmanie accueille actuellement une oeuvre immersive de Kirsha Kaechele: un "Ladies Lounge" ou "salon pour dames", censée renverser les codes du vieux pub australien, autrefois interdit aux femmes.

Inversion des codes

Rideaux en soie, lustre en cascade et canapés en velours... Dans le petit salon pensé par Kirsha Kaechele, les femmes sont accueillies avec une coupe de champagne, servies par des majordomes.

À l’intérieur, une collection d’œuvres d’art, dont certaines parmis les plus prisées de la galerie, tandis qu'à l'extérieur une équipe en charge de la sécurité filtre l'entrée.

"C'est un endroit où les femmes peuvent se retirer, échapper au patriarcat, profiter de la compagnie les unes des autres", a déclaré Kirsha Kaechele cité par ABC News.

L'exposition a été pensée de façon à corriger un déséquilibre qui existe entre les hommes et les femmes, ces dernières ayant souvent été écartées des lieux de pouvoir ou de prestige, a expliqué Krisha Kaechele, dont le mari est propriétaire du musée.

Ce n'est en effet qu'en 1965 pour que les Australiennes ont obtenu le droit de boire dans un bar public, les pubs australiens étant jusqu'alors exclusivement réservés aux hommes. "Je pense que le rejet des hommes est une partie très importante de l'œuvre d'art", a-t-elle ajouté.

Réparation ou discrimination?

Un avis qui ne fait pas l'unanimité. Jason Lau, un résident de Nouvelle-Galles du Sud, a déposé une plainte auprès du commissaire à l'égalité des chances après s'être vu refuser l'entrée à l'exposition en avril 2023.

Lors de l'audience qui s'est tenue ce mardi à Hobart, l'homme a déclaré qu'il n'avait pas été informé au préalable que son ticket d'entrée au musée ne lui permettrait pas de visiter cette partie de l'exposition. Il a notamment dénoncé le caractère discrimination de l'oeuvre de Kirsha Kaechele, demandant également une réduction du prix du billet.

L'artiste américaine et le MONA n'ont pas nié que l'expérience immersive proposée par le musée était discriminatoire. Ils soutiennent en revanche que la discrimination est nécessaire pour donner du sens à l’œuvre d’art, invoquant l'article 26 de la loi anti-discrimination de Tasmanie qui autorise la discrimination "si elle favorise les chances d'un groupe autrement désavantagé", indique ABC News.

Soutenue par un groupe de femmes présentes à l'audience, toutes de bleu vêtues, ornées de perles autour du cou, Kirsha Kaechele a déclaré que son salon était une réponse à l'expérience discriminatoire vécue par les femmes dans le passé.

Le tribunal rendra sa décision à une date ultérieure. S'adressant à la BBC, Kaechele a indiqué qu'elle porterait l'affaire jusqu'à la Cour suprême si nécessaire, mais que rien ne pourrait peut-être mieux faire comprendre l'intérêt de l'œuvre d'art que d'avoir à la fermer.

Orlane Edouard