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Syrie: les raisons profondes du soutien russe à Bachar al-Assad

Les relations entre Damas et Moscou datent de bien longtemps, avant Vladimir Poutine et Bachar al-Assad.

Les relations entre Damas et Moscou datent de bien longtemps, avant Vladimir Poutine et Bachar al-Assad. - -

Depuis le début du conflit en Syrie, Russes et Occidentaux s’affrontent sur la conduite à tenir. Quand Paris, Londres et Washington veulent en finir avec Bachar al-Assad, Moscou soutient bec et ongles le maître de Damas. Décryptage.

"La Russie est contre toute résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, prévoyant la possibilité d'user de la force". Jeudi soir, peu après le blocage par Moscou et Pékin d’une nouvelle résolution condamnant la Syrie, le vice-ministre russe des Affaires étrangères a réaffirmé la position de son pays.

Quelques heures plus tôt, le numéro deux de l’ambassade de Russie en France, Leonid Kadyshev, martelait sur le plateau de BFMTV: “Le départ de Bachar n’est pas la solution”. Deux ans et demi après le début du conflit syrien, plus de 100.000 morts après, et des milliers de réfugiés, la position russe n’a pas bougé. Pourquoi?

Le soutien de Damas par Moscou n’est pas nouveau. Les deux pays ont tissé depuis quarante ans des relations très fortes, avec notamment en 1980, la signature entre le soviétique Léonid Brejnev et le syrien Hafez al-Assad d’un "traité d'amitié et de coopération", établissant des "liens stratégiques spéciaux". En soutenant Bachar al-Assad, Vladimir Poutine s’inscrit donc dans la continuité de la diplomatie russe et la réalité de nombreux échanges.

Des chrétiens syriens en majorité orthodoxes

Quelque 50.000 binationaux syriens habitent en Russie, 80% des officiers syriens y ont été formés (avec en prime un petit laïus sur la laïcité). La grande majorité des chrétiens syriens sont orthodoxes, proche du patriarche de Moscou.

Lukoil, l’un des premier producteur russe de pétrole, réalise de nombreux investissements dans le pays, riche en gaz. Et Moscou, qui n’exporte quasiment plus que des armes et des matières premières, trouve des débouchés sur les marchés syriens. Sans oublier la base navale de Tartous, la seule dont dispose le Kremlin en Méditerranée, où sont stationnés 150 soldats russes. Mais selon une source bien informée, "cela ne compte pas, la base est toute petite et on ne sait pas si les livraisons d'armes sont réellement payées".

Damas craint à terme l'effondrement de Bachar al-Assad

Car plus que tout, la politique syrienne de Moscou est motivée par la peur, “la crainte, à terme, de l'effondrement du régime de Bachar al-Assad et une sorte d'extension d'un front panislamique soutenu par la Turquie, le Qatar, l'Arabie saoudite et que ce front gagne toute la base du Caucase, puis s'étende sur les frontières orientales de la Communauté des Etats indépendants avant d’atteindre l'Asie centrale”, explique Pascal Le Pautremat, géopoliticien, spécialiste en questions militaires.

En clair, explique un connaisseur de la diplomatie russe, "les Russes ont un véritable intérêt dans ce conflit. Pour eux, la chute de Bachar signifie terrorisme et instabilité sur le territoire russe”. “On voit déjà que la Syrie est un foyer du terrorisme international, attaquer ne mettra pas terme à la guerre civile”, a ainsi réaffirmé Leonid Kadyshev, jeudi.

Enfin, sans être prioritaire, l'idée de tenir tête aux Etats-Unis, sur le thème "la Russie est de retour”, n’est pas pour déplaire à Vladimir Poutine.

Clémence Lemaistre