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Moyen-Orient

L'Iran et les Six relancent les négociations sur le nucléaire

Catherine Ashton, la porte-parole de la diplomatie européenne qui coordonne les six puissances impliquées dans la recherche d'une solution à la crise du nucléaire iranien, en compagnie de Saeed Jalili, le chef des négociateurs iraniens. Les discussions su

Catherine Ashton, la porte-parole de la diplomatie européenne qui coordonne les six puissances impliquées dans la recherche d'une solution à la crise du nucléaire iranien, en compagnie de Saeed Jalili, le chef des négociateurs iraniens. Les discussions su - -

par Fredrik Dahl et Justyna Pawlak ISTANBUL (Reuters) - Après une interruption de quinze mois, les discussions sur le programme nucléaire iranien ont...

par Fredrik Dahl et Justyna Pawlak

ISTANBUL (Reuters) - Après une interruption de quinze mois, les discussions sur le programme nucléaire iranien ont repris samedi à Istanbul sans que les participants, la république islamique d'un côté et le groupe P5+1 de l'autre, s'attendent à des avancées significatives sur le fond. L'objectif serait plutôt de réamorcer un "processus durable".

La séance plénière a débuté peu avant 08h30 GMT, selon un diplomate proche des négociations.

"J'espère que nous assisterons aujourd'hui au commencement d'un processus durable", a dit Catherine Ashton, la porte-parole de la diplomatie européenne qui coordonne les six puissances impliquées dans la recherche d'une solution à la crise du nucléaire iranien (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie plus l'Allemagne).

"Ce pour quoi nous sommes ici, c'est pour trouver les moyens par lesquels nous pourrons construire de la confiance entre nous et les moyens par lesquels nous pourrons démontrer que l'Iran s'éloigne d'un programme d'armes nucléaires", a-t-elle ajouté dans un communiqué.

Dès vendredi soir, un dîner de travail avait réuni à Istanbul Catherine Ashton et Saeed Jalili, le chef des négociateurs iraniens. Leur dîner a duré trois heures et s'est déroulé, selon un diplomate, dans une "atmosphère amicale". Mais les discussions, a-t-il ajouté, ne se sont pas concentrées sur la question nucléaire.

Jalili a indiqué lui avoir profité de ce dîner pour dire à son interlocutrice qu'il espérait que les grandes puissances gagneraient "la confiance de la nation iranienne". "L'Iran entrera dans ces négociations avec une attitude constructive et insistera sur ses droits", a-t-il ajouté, cité par la télévision publique iranienne.

LE POIDS DES SANCTIONS

Leur dernière entrevue s'était également tenue à Istanbul, en janvier 2011, et n'avait pas permis d'établir un calendrier de négociations.

Cette fois, les deux parties ont laissé entendre qu'elles étaient déterminées à donner une véritable chance au processus diplomatique.

Diplomates et analystes disent cependant ne pas s'attendre à voir des avancées significatives lors de cette réunion.

Au mieux, elle pourrait ouvrir la voie à de nouvelles négociations afin de résoudre un contentieux vieux de dix ans et écarter le spectre d'une intervention militaire contre les installations nucléaires de l'Iran.

Les discussions "seront le point de départ d'une négociation très complexe et durant plusieurs mois, la diplomatie permettra de faire baisser quelque peu la pression sur les cours du brut et de diminuer la probabilité d'une attaque israélienne", estime Cliff Kupchan, analyste spécialiste du Proche-Orient chez Eurasia Group.

L'Iran, dont l'économie fondée sur les hydrocarbures pâtit du durcissement des sanctions internationales, pourrait se laisser convaincre d'aborder enfin d'éventuelles restrictions à son programme nucléaire pour alléger la pression, espèrent ces diplomates occidentaux.

"Comme les revenus pétroliers comptent pour plus de la moitié des recettes du gouvernement, le budget va être soumis à rude épreuve cette année avec la chute des exportations de pétrole due aux sanctions et la réduction de la production iranienne", note Mohamed Chakil, analyste basé dans le Golfe.

Certains espèrent qu'un accord pourra être trouvé pour la tenue de nouveaux rendez-vous si l'Iran propose un calendrier de nature à convaincre les Six qu'il est prêt à discuter de son programme nucléaire, chose qu'il a refusée par le passé exigeant au préalable l'assouplissement des sanctions internationales.

"Chaque partie, pour ses propres raisons, veut donner à ce stade une chance à la paix, et lancer un processus plutôt que de forcer un règlement rapide", commente Michael Adler, du centre international Woodrow Wilson.

MOSCOU CONDAMNE LES SANCTIONS UNILATÉRALES

Si l'Iran accepte de réduire son programme d'enrichissement d'uranium pour obtenir du combustible à 20%, un assouplissement des sanctions pourrait être envisagé.

Un diplomate occidental écarte toutefois l'hypothèse qui verrait les Européens lever leur embargo sur les importations de pétrole, qui doit entrer pleinement en vigueur le 1er juillet. "Nous attendons l'entrée en vigueur de l'embargo pétrolier le 1er juillet et il serait surprenant que l'Iran propose quelque chose de nature à revenir sur ce point", a-t-il dit.

Le négociateur adjoint iranien, Ali Baqeri, a eu des entretiens séparés avec des hauts responsables chinois et russes à Istanbul tandis que les Six se sont rencontrés séparément pour coordonner leur stratégie.

Cité par l'agence officielle de presse iranienne Irna, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov a estimé qu'il n'existait pas de preuve tangible que le programme nucléaire de Téhéran possédait une dimension militaire comme le soupçonnent les Occidentaux.

Témoignant de l'absence de cohésion au sein du groupe P5+1, Riabkov a également dénoncé les sanctions américaines qui ont contraint de nombreux autres pays à réduire leurs échanges commerciaux avec l'Iran.

"La Russie condamne les sanctions unilatérales sous toutes leurs formes", a-t-il dit avant sa rencontre avec Baqeri. "C'est une approche, qui si elle est mise en oeuvre, ignore le droit légitime des autres pays et compagnies qui veulent avoir des accords légaux avec les Iraniens".

S'essayant à l'optimisme avant le début des discussions, un diplomate a toutefois admis: "Je ne pense pas que les Iraniens seraient venus s'ils n'avaient pas des intentions sérieuses."

Un autre diplomate juge lui que "les Iraniens envoient des signaux indiquant qu'ils veulent une rencontre sérieuse et constructive".

Pierre Sérisier, Jean-Loup Fiévet et Henri-Pierre André pour le service français