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Israël

Mort d'Ariel Sharon: retour sur la vie d'un homme controversé

L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon, en janvier 2005.

L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon, en janvier 2005. - -

Plongé dans le coma depuis plus de huit ans, l'ancien Premier ministre israélien s'est éteint ce samedi à l'âge de 85 ans.

L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon est mort ce samedi à l'âge de 85 ans ont annoncé les médias israéliens. Victime d'une attaque cérébrale le 4 janvier 2006, l'homme politique avait été opéré puis plongé dans un coma profond sous respiration artificielle, dont il ne s'est jamais réveillé. Début janvier 2014, son état de santé s'est brusquement aggravé après une intervention chirugicale, le fonctionnement de plusieurs des organes essentiels à sa survie ayant été affecté.

Militaire aux méthodes radicales

Né le 27 février 1928 en Palestine mandataire, Ariel Sharon commence sa carrière dans l'armée, à l'âge de 17 ans. Il participe notamment à la première guerre israélo-arabe de 1948, au cours de laquelle il est blessé. A la suite de ce conflit et d'études à l'université hébraïque de Jérusalem, il s'impose dans les rangs de Tsahal et prend la tête de l'Unité 101, connue comme la première unité des forces spéciales israéliennes. Adepte des méthodes expéditives, Sharon mène plusieurs expéditions punitives contre des villages palestiniens. Le 14 octobre 1953, il commande ainsi l'attaque contre le village de Qibya, situé en Cisjordanie. Bilan: une soixantaine de civils tués, dont une majorité de femmes et d'enfants, ce qui a valu à l'Etat hébreu une condamnation de l'ONU et une suspension temporaire de l'aide économique américaine.

Ariel ,Sharon pendant la guerre des Six Jours, en 1967.
Ariel ,Sharon pendant la guerre des Six Jours, en 1967. © -

Au cours de la guerre des Six Jours, en 1967, opposant Israël à l'Egypte, la Jordanie et la Syrie, une des divisions commandées par Ariel Sharon participe à la prise du Sinaï, ce qui permet au responsable militaire d'acquérir prestige et reconnaissance auprès de ses troupes et de l'opinion publique de son pays. En 1969, il applique sa méthode forte contre la résistance palestinienne à Gaza en menant des opérations de commandos. Durant la guerre du Kippour, en octobre 1973, il prouve à nouveau ses capacités militaires en franchissant le canal de Suez et en encerclant l'armée égyptienne.

Champion de la colonisation

Fort de ses succès militaires, Ariel Sharon débute sa carrière politique en 1973, lorsqu'il participe à la création du parti nationaliste de droite, le Likoud et est élu à la Knesset, l'assemblée israélienne, sur la liste de ce même parti. Il quitte toutefois son poste de député pour devenir conseiller spécial à la Sécurité auprès du Premier ministre d'alors, Yitzhak Rabin, mais le reprend en 1977, jusqu'en 2006. Il entreprend alors de vastes opérations de colonisation.

En 1982, alors qu'il est ministre de la Défense, l'Etat hébreu s'embourbe dans une interminable et désastreuse invasion du Liban visant à chasser de ce pays Yasser Arafat, le dirigeant historique palestinien. A la suite de cet épisode particulièrement sanglant, une commission d'enquête officielle conclut à la responsabilité d'Ariel Sharon pour n'avoir ni prévu ni empêché les massacres des camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila en septembre 1982, perpétrés par une milice chrétienne alliée d'Israël. Il est contraint à la démission et quitte le devant de la scène.

Élection à la tête du gouvernement

Dans les années 1990, alors que les attentats se multiplient en Israël, Sharon enchaîne plusieurs portefeuilles ministériels, et est tour à tour ministre de la Construction et de l'Aménagement, ministre de l'Infrastructure nationale et ministre des Affaires étrangères, à partir de 1998, mandat au cours duquel il dirige les négociations de paix avec l'autorité palestinienne, et ce après avoir été de longues années dans l'opposition, dénonçant vigoureusement les Accords d'Oslo de 1993.

Quelques mois après l'éclatement de la seconde Intifada, au lendemain de sa visite sur l'esplanade des Mosquées, à Jérusalem-est, il est élu Premier ministre, le 6 février 2001, et met l'arrêt des violences comme priorité avant toute discussion avec les Palestiniens. Parallèlement à une traque intensive des terroristes, une enceinte de sécurité est érigée le long de la frontière.

Au cours de sa campagne électorale, il déclare notamment: "Je suis pour une paix durable… Unis, je pense que nous pouvons gagner la bataille de la paix. Mais cela doit être une paix différente, avec une reconnaissance totale des droits des Juifs dans leur seule et unique terre; une paix avec la sécurité pour des générations et une paix avec Jérusalem unifiée en tant que capitale éternelle et indivisible du peuple juif dans l’État d’Israël pour toujours".

Artisan du démantèlement des colonies

Ariel Sharon (à gauche), avec George W. Bush et Mahmoud Abbas, en 2003.
Ariel Sharon (à gauche), avec George W. Bush et Mahmoud Abbas, en 2003. © -

Après avoir stoppé les négociations de paix avec Yasser Arafat, il entame des pourparlers avec le successeur de ce dernier après sa mort, Mahmoud Abbas (photo ci-contre). Ariel Sharon consent à infléchir sa politique et engage le retrait des colonies israéliennes de la bande de Gaza, en signe d'ouverture. Un geste que son propre camp ne lui a jamais pardonné, tout comme une large partie de l'opinion publique israélienne, ce qui lui vaut de devoir former une alliance avec les travaillistes de Shimon Peres. Le divorce avec le Likoud est entamé et Ariel Sharon en démissionne le 21 novembre 2005, avant de créer son propre parti, de centre-droit, Kadima.

Retrait forcé de la vie politique

Victime de deux graves attaques cérébrales à l'âge de 77 ans, en décembre 2005 et janvier 2006, Ariel Sharon est plongé dans un profond coma sous respiration artificielle, à trois mois des élections, pour lesquelles il était annoncé comme grand favori. Il subit plusieurs opérations et malgré ses faibles chances de réveil, ses fils décident son maintien en vie sous assistance médicale. Depuis son attaque cérébrale, qui a provoqué son retrait forcé de la vie politique et son remplacement par Ehud Olmert, lors des élections de 2006, Ariel Sharon, resté dans le coma pendant plus de huit ans, était peu à peu tombé dans l'oubli.

Adrienne Sigel