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Iran

"Otages d'Etat", "aveux" d'espionnage: ce que l'on sait des deux Français détenus en Iran

Le ministère Français des Affaires étrangères a affirmé ce jeudi que les deux Français arrêtés en Iran en mai dernier, et dont la TV iranienne a diffusé des "aveux" d'espionnage, sont des "otages d'État". Ils sont accusés de vouloir "déclencher le chaos" en Iran.

Cécile Kohler, une responsable du syndicat d'enseignants Fnec FP-FO, et son conjoint Jacques Paris ont été arrêtés en mai dernier en Iran. Ils sont accusés d'espionnage et la télévision iranienne a diffusé leurs "aveux" ce jeudi. Une vidéo que le ministère français des affaires étrangères qualifie de "mascarade".

· Arrêtés en mai

L'Iran avait annoncé le 11 mai l'arrestation de deux Européens "entrés dans le pays dans le but de déclencher le chaos et déstabiliser la société". Les autorités françaises avaient alors dénoncé une arrestation "sans fondement" et demandé leur "libération immédiate".

Début juillet, Téhéran avait accusé deux "syndicalistes français" arrêtés en mai d'"atteinte à la sûreté" du pays.

Une source syndicale française les avait identifiés comme Cécile Kohler, une responsable du syndicat d'enseignants Fnec FP-FO, et son conjoint Jacques Paris. Elle précisait qu'ils faisaient du tourisme en Iran pendant les vacances de Pâques au moment de leur arrestation.

· Une vidéo d'"aveux" diffusée ce jeudi

Le site de la chaîne arabophone al-Alam de la télévision officielle iranienne a diffusé ce jeudi ce qu'elle présente comme des "aveux" d'espionnage des deux Français. La vidéo, que l'on peut imaginer être enregistrée sous la contrainte, fait partie de la bande-annonce d'un documentaire qui doit être "diffusé bientôt", selon l'agence de presse d'État iranienne.

Une jeune femme s'y exprime en français, affirme s'appeler Cécile Kohler et être agent de renseignement opérationnel à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, service de renseignement français).

Elle affirme qu'elle et son conjoint étaient en Iran "pour préparer les conditions de la révolution et du renversement du régime iranien".

Ils devaient, toujours d'après ses déclarations, financer des grèves et des manifestations et même utiliser des armes "si nécessaire pour se battre contre la police". Selon l'homme montré dans la vidéo, qui s'exprime aussi en français, les objectifs de la DGSE "faire pression sur le gouvernement" iranien.

· Des "otages d'État", selon le Quai d'Orsay

La vidéo a été dénoncée ce jeudi par le ministère français des Affaires étrangères comme "une mise en scène indigne, révoltante, inacceptable".

"Cette mascarade révèle le mépris de la dignité humaine qui caractérise les autorités iraniennes", ajoute le ministère français des Affaires étrangères dans une déclaration, réclamant la "libération immédiate" de Cécile Kohler et Jacques Paris.

Ils sont "détenus arbitrairement en Iran depuis mai 2022, et constituent à ce titre des otages d'État", poursuit le Quai d'Orsay.

Le ministère dénonce des "pratiques dignes des procès spectacles des pires régimes dictatoriaux" et assurent qu'elles "ne détourneront pas l'attention internationale des aspirations légitimes du peuple iranien".

· Plusieurs arrestations d'Occidentaux

Plus d'une dizaine de ressortissants de pays occidentaux, binationaux pour la plupart, sont détenus ou bloqués en Iran, ce que des ONG comme Iran Human Rights condamnent comme une politique de prise d'otages pour obtenir des concessions des puissances étrangères.

Parmi elles, figurent la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, arrêtée en juin 2019 puis condamnée à cinq ans de prison pour atteinte à la sécurité nationale, ce que ses proches ont toujours farouchement nié, ainsi que Benjamin Brière, arrêté en mai 2020 et condamné à huit ans et huit mois d'emprisonnement pour espionnage, ce qu'il conteste.

Sa soeur, Blandine Brière, parvient à lui téléphoner toutes les trois semaines environ. Elle l'a décrit ce mardi comme "complètement désespéré", au micro de BFM Lyon: "On a aucune date à laquelle s'accrocher, rien qui nous donne de l'espoir", a-t-elle souligné. Blandine Brière a également estimé que son frère était un "otage" du régime iranien. Elle a affirmé que le ministère français des Affaires étrangères est en discussion avec l'Iran, mais cela ne "suffit pas".

Cette nouvelle affaire advient alors que l'Iran est touché par une vague de manifestations déclenchées le 16 septembre par la mort d'une jeune femme, Mahsa Amini, après son arrestation par la police des moeurs.

L'Iran a accusé à plusieurs reprises des forces extérieures d'attiser les protestations. Le guide suprême de la République islamique Ali Khamenei, a ainsi accusé lundi les Etats-Unis, Israël et leurs "agents" d'avoir fomenté le mouvement de contestation antigouvernemental. L'Iran a d'ailleurs fait savoir la semaine dernière que neuf ressortissants étrangers - notamment de France d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et des Pays-Bas - avaient été arrêtés.

Sophie Cazaux avec AFP