BFMTV
International

Mobilisation antinucléaire au Japon, trois mois après Fukushima

Plusieurs milliers de militants antinucléaires ont défilé samedi à Tokyo, trois mois jour pour jour après le séisme et le tsunami à l'origine de la catastrophe de Fukushima. /Photo prise le 11 juin 2011/REUTERS/Yuriko Nakao

Plusieurs milliers de militants antinucléaires ont défilé samedi à Tokyo, trois mois jour pour jour après le séisme et le tsunami à l'origine de la catastrophe de Fukushima. /Photo prise le 11 juin 2011/REUTERS/Yuriko Nakao - -

par Antoni Slodkowski TOKYO (Reuters) - Plusieurs milliers de militants antinucléaires ont défilé samedi au Japon, trois mois jour pour jour après le...

par Antoni Slodkowski

TOKYO (Reuters) - Plusieurs milliers de militants antinucléaires ont défilé samedi au Japon, trois mois jour pour jour après le séisme et le tsunami à l'origine de la catastrophe de Fukushima.

Le coeur de trois des réacteurs de la centrale endommagée est entré en fusion, ce qui a contraint les autorités à évacuer 80.000 habitants de cette région du nord-est de l'archipel. Trois mois après l'accident, les ingénieurs de Tepco, exploitant de la centrale, sont toujours aux prises avec les fuites radioactives et le combustible en surchauffe.

"S'ils ne comprennent pas le message aujourd'hui, que faudra-t-il pour qu'on renonce à l'énergie atomique qui s'est montrée si dangereuse?", a fait valoir Yu Matsuda, une puéricultrice de 28 ans, interrogée parmi les militants rassemblés devant le siège de Tepco.

"Je veux que mes enfants puissent jouer dehors en toute sécurité et se baigner dans la mer sans inquiétude", a-t-elle ajouté, tandis que les représentants de la cause antinucléaire et des rescapés de la catastrophe s'adressaient aux manifestants.

La pression de l'opinion a déjà entraîné l'arrêt de la centrale d'Hamaoka en mai et retardé le redémarrage d'autres sites dont la production a été suspendue à l'occasion d'opérations de maintenance.

Seuls 19 des 54 réacteurs japonais produisent aujourd'hui de l'électricité, ce qui pourrait se traduire par des pénuries. Les mettre tous à l'arrêt serait économiquement trop risqué, estiment la plupart des experts.

PAGAILLE

"Le lobby nucléaire dit que le coût de l'énergie propre est trop élevé. Moi je dit que le coût du nettoyage de cette pagaille et du risque de nouveaux accidents est bien plus important", a affirmé Yonosuke Sawada, un entrepreneur de 59 ans, qui protestait lui aussi devant le siège de Tepco.

Outre les dirigeants de la compagnie, traités de "menteurs", les manifestants s'en sont pris aux membres du gouvernement, accusés de lenteurs dans leur gestion de la catastrophe naturelle, qui a fait 23.000 morts et des dégâts sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale.

Le Premier ministre Naoto Kan, qui s'est rendu samedi dans la zone dévastée, a échappé la semaine dernière à une motion de censure, mais a promis de renoncer à ses fonctions lorsque le gros de la crise aura été surmontée.

Malgré son impopularité record, le départ du chef du gouvernement risque de peser sur la reconstruction, dont le financement n'a toujours pas été adopté.

"Ça n'a rien à voir avec les convictions politiques. Fukushima continue à émettre des radiations et les politiques doivent se focaliser sur les moyens nécessaires pour mettre fin à la crise, pas sur leurs conflits internes", a souligné un manifestant coiffé d'un chapeau en forme de réacteur endommagé.

Modeste et ignoré jusqu'à l'accident de Fukushima, le mouvement antinucléaire japonais recrute désormais plus largement. Ses effectifs restent toutefois limités par rapport à ceux de leurs homologues allemands, qui ont fini par obtenir la sortie du nucléaire après avoir mobilisé 200.000 personnes.

Un telle perspective divise en outre une opinion japonaise mieux disposée à l'égard de la filière.

Jean-Philippe Lefief pour le service français