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"Mépris de la justice", "prince meurtrier": les ONG dénoncent l'invitation de Ben Salmane par Macron

Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane et le président français Emmanuel Macron à Jeddah (Arabie saoudite) le 4 décembre 2021

Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane et le président français Emmanuel Macron à Jeddah (Arabie saoudite) le 4 décembre 2021 - Bandar AL-JALOUD © 2019 AFP

Plusieurs ONG s'insurgent contre l'invitation à dîner à l'Élysée du prince héritier saoudien, soupçonné d'être impliqué dans le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi en 2018.

Une visite qui ne passe pas. Les ONG dénoncent la réception ce jeudi soir par Emmanuel Macron du prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane pour un dîner organisé à l'Élysée, une première depuis l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi.

"On peut négocier des choses par rapport au pétrole, mais on n'a pas besoin de réhabiliter un prince meurtrier", déplore ce jeudi matin sur France Inter Agnès Callamard, secrétaire générale d'Amnesty International.

"Pourquoi réhabiliter un individu qui a commandité le meurtre d'un journaliste qui a été un meurtre atroce, une personne qui est responsable d'une répression accrue en Arabie saoudite?", dénonce celle qui avait mené une enquête sur l'assassinat de Jamal Khashoggi lorsqu'elle était rapporteure spéciale de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires.

Si elle reconnaît que "quelques réformes d'ordre culturel" ont été menées par le prince héritier depuis son arrivée au pouvoir, elle estime qu'"au niveau politique et au niveau idologique, il ne s'agit absolument pas de changements positifs, au contraire", rappellant notamment que "toutes les militantes des droits des femmes ont été emprisonnées ou sont incapables de quitter leur maison ou de voyager".

Ce dîner constitue la première visite du prince en Europe depuis son isolement international en réaction à l'assassinat en 2018 du journaliste critique du régime saoudien Jamal Khashoggi. Sa mort aurait été "validée" par Mohammed Ben Salmane, selon les renseignements américains, ce que réfute l'Arabie Saoudite.

"Deux poids, deux mesures"

"La réintégration de Mohammed Ben Salmane dans les relations internationales ne saurait se produire au mépris de la vérité et de la justice", estime également Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters Sans Frontière (RSF), dans un communiqué.

"RSF demande au président français Emmanuel Macron d’intervenir auprès de Mohammed Ben Salmane pour que soient libérés les 27 journalistes actuellement détenus en Arabie saoudite", appelle par ailleurs l'ONG.

"MBS peut apparemment compter sur Emmanuel Macron pour le réhabiliter sur la scène internationale, malgré le meurtre atroce du journaliste Jamal Khashoggi", a également dénoncé la directrice de Human Rights Watch France Bénédicte Jeannerod sur Twitter, déplorant un "deux poids, deux mesures".

La présidente d'ONG juge ce retour en grâce auprès de chefs d'État occidentaux "d'autant plus choquant que nombre d'entre eux ont exprimé à l'époque leur dégoût (pour le meurtre) et leur engagement à ne pas ramener MBS dans la communauté internationale".

La dernière rencontre entre le président français et Mohammed Ben Salmane en décembre dernier avait déjà suscité la polémique, Emmanuel Macron étant l'un des premiers dirigeants occidentaux à faire un pas vers le Saoudien depuis plusieurs années. Le chef de l'État français s'était alors rendu en Arabie saoudite pour évoquer la "stabilité" au Moyen-Orient et la situation au Liban.

Juliette Desmonceaux avec AFP