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Les militaires suspendent la Constitution égyptienne

Les militaires ont repris dimanche le contrôle de la place Tahrir, au Caire, bien que des manifestants refusent de la quitter. Le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir en Egypte, a annoncé la suspension de la Constitution et la dissolution du parl

Les militaires ont repris dimanche le contrôle de la place Tahrir, au Caire, bien que des manifestants refusent de la quitter. Le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir en Egypte, a annoncé la suspension de la Constitution et la dissolution du parl - -

par Marwa Awad et Dina Zayed LE CAIRE (Reuters) - Le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir en Egypte, a annoncé dimanche la suspension de la...

par Marwa Awad et Dina Zayed

LE CAIRE (Reuters) - Le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir en Egypte, a annoncé dimanche la suspension de la Constitution et la dissolution du parlement et annoncé qu'il ne resterait au pouvoir que six mois, ou jusqu'à la tenue d'élections législatives et présidentielle.

Dans un communiqué lu à la télévision publique, les militaires, auxquels Hosni Moubarak a confié les rênes du pays en démissionnant vendredi, annoncent également la formation d'une commission chargée d'amender la Constitution et dont les conclusions seront soumises à référendum.

Les personnalités d'opposition et les organisateurs des manifestations contre le régime de Moubarak ont dans l'ensemble réagi positivement à cette annonce. "Victoire", ont scandé des militants sur la place Tahrir, au Caire. "Il en faut plus", ont crié d'autres manifestants en faveur de la démocratie.

"C'est une victoire pour la révolution", a confirmé l'opposant Ayman Nour, qui avait osé défier Hosni Moubarak lors de la présidentielle de 2005.

Mais pour Mahmoud Nassar, dirigeant d'un mouvement de jeunes, il faut encore que "tous les prisonniers politiques arrêtés avant et après la révolution du 25 janvier" soient relâchés. "Ce n'est qu'alors que nous donnerons le mot d'ordre d'arrêter les manifestations", a-t-il dit.

Le Conseil suprême des forces armées devrait par ailleurs publier lundi un avertissement à quiconque "crée le chaos et le désordre", a-t-on appris de source militaire. Soucieux d'un retour rapide à une vie normale, il interdira aussi les réunions organisées par des syndicats, interdisant de fait les grèves, et ordonnera à tous de reprendre le travail.

Dimanche aux premières heures, l'armée a entrepris de faire évacuer la place Tahrir afin de permettre aux voitures de circuler à nouveau autour du rond-point en ce premier jour ouvré de la semaine en Egypte.

Les manifestants étaient divisés sur l'opportunité de se conformer aux ordres de l'armée. "Le peuple veut que la place soit dégagée", scandaient certains. "Nous ne partirons pas", répondait un autre groupe.

Des soldats, dont certains armés de matraques, ont repoussé les manifestants et rouvert la place à la circulation automobile.

UNE "MARCHE DE LA VICTOIRE" VENDREDI PROCHAIN

Les organisateurs des manifestations ont constitué ce week-end un Conseil de surveillance pour défendre la révolution et réclamer des réformes rapides.

Des policiers, enhardis par la chute de Moubarak, se sont rassemblés devant le ministère de l'Intérieur pour réclamer des augmentations salariales. Des coups de semonce ont été tirés en l'air mais on ne déplore aucun blessé.

Le gouvernement s'est réuni pour la première fois dans une salle dont avait disparu le portrait autrefois omniprésent de Moubarak qui, selon le Premier ministre Ahmed Chafic, se trouverait toujours dans la station balnéaire Charm el-Cheikh.

Les manifestants ont réclamé la libération immédiate de tous les prisonniers politiques, la levée de l'état d'urgence utilisé par Moubarak pour réprimer l'opposition, la fermeture des tribunaux militaires, des élections libres et démocratiques et la remise rapide du pouvoir aux civils.

En dépit de la démission de Moubarak, certains manifestants ont annoncé leur intention de rester sur la place Tahrir pour s'assurer que les militaires tiennent leurs promesses de transition. Ils prévoient une grande "marche de la victoire" vendredi prochain pour célébrer la révolution et honorer ses martyrs.

"La révolution se poursuit. Ses revendications n'ont pas encore obtenu satisfaction", a déclaré lors d'une conférence de presse Mahmoud Nassar, militant de "Jeunesse de la révolution du 25 janvier". "Les sit-ins et les manifestations seront permanentes jusqu'à la satisfaction des revendications."

La stratégie des militaires a été de rassurer le pays et le monde sur leurs intentions et, à court terme, de faire respecter la loi après la disparition des rues de la police qui s'est montrée incapable de disperser les manifestations.

Samedi, l'armée a assuré que l'Egypte honorerait ses obligations internationales, y compris le traité de paix conclu avec Israël.

Avant la réunion du conseil des ministres, un porte-parole du gouvernement a déclaré que la tâche principale de ce dernier était de rétablir l'ordre et la sécurité, de relancer l'économie et de veiller aux besoins quotidiens de la population.

"MOUBARAK EN COULISSES"

S'efforçant de rassurer les Egyptiens sur la conduite des affaires de l'Etat, Ahmed Chafic a déclaré que les affaires gouvernementales étaient présentées au Conseil suprême "comme elles l'étaient (auparavant) au président de la République".

"Il n'y a aucun changement dans la forme, ou la méthode, ou la procédure de travail. Les choses sont complètement stables", a-t-il dit lors d'une conférence de presse.

Chafic a été nommé par Moubarak lorsqu'il a limogé son précédent cabinet, le 29 janvier, en tentant en vain de calmer la colère populaire. Ses propos risquent d'irriter les Egyptiens réclamant un démantèlement du système instauré par Moubarak.

"On dirait que Moubarak est toujours au pouvoir mais en coulisses. Je suis désolé pour l'Egypte. Ils continuent de tenter de se moquer du monde", a commenté Salem Metwali, 41 ans, un manifestant de la place Tahrir.

Les militaires ont donné des ordres précis d'évacuation de la place Tahrir. "A partir d'aujourd'hui, nous ne voulons voir aucun manifestant sur la place", a déclaré Mohamed Ibrahim Moustafa Ali, chef de la police militaire.

Des manifestants ont rapporté que la police avait interpellé une cinquantaine de personnes et les avait emmenées dans un centre de détention militaire proche du Musée du Caire, non loin de la place. L'armée n'a fait aucun commentaire.

Un noyau dur de quelques centaines de personnes restait présent dimanche après-midi sur la place, entouré de quelque 2.000 curieux.

Les plus déterminés des manifestants ont juré de rester.

"Je ne quitterai pas la place. J'ai confiance en l'armée mais je n'ai pas confiance en ceux qui contrôlent l'armée en coulisses", a déclaré Mohamed Sakah, 27 ans, qui a refusé de démonter sa tente.

Avec Edmund Blair, Alexander Dziadosz, Shaimaa Fayed, Andrew Hammond, Alistair Lyon, Sherine El Madany, Tom Perry, Yasmine Saleh, Patrick Werr et Jonathan Wright; Nicole Dupont pour le service français