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Les kirghizes réforment leur constitution, moscou méfiant

Lors du dépouillement dans un bureau de vote à Och, dimanche. Les Kirghizes se sont prononcés à une écrasante majorité en faveur d'une révision constitutionnelle instaurant la première démocratie parlementaire d'Asie centrale après une vague de violences

Lors du dépouillement dans un bureau de vote à Och, dimanche. Les Kirghizes se sont prononcés à une écrasante majorité en faveur d'une révision constitutionnelle instaurant la première démocratie parlementaire d'Asie centrale après une vague de violences - -

par Olga Zioubenko BICHKEK (Reuters) - Les Kirghizes se sont prononcés à une écrasante majorité en faveur d'une révision constitutionnelle...

par Olga Zioubenko

BICHKEK (Reuters) - Les Kirghizes se sont prononcés à une écrasante majorité en faveur d'une révision constitutionnelle instaurant la première démocratie parlementaire d'Asie centrale après une vague de violences ethniques qui a fragilisé la stabilité du pays.

Réagissant immédiatement au résultat du scrutin de dimanche, la Russie a exprimé des doutes sur la capacité du Kirghizistan, ancienne entité de l'empire soviétique, à assurer le fonctionnement d'une république parlementaire.

Après dépouillement de 99,6% des bulletins dans les 2.319 bureaux de vote du pays, la commission centrale des élections a annoncé lundi que le "oui" l'avait emporté à 90,8%. Seuls 8% des électeurs se sont prononcés contre la réforme dans un vote qui a mobilisé 69% des électeurs.

Les résultats définitifs devraient être connus dans deux ou trois jours, après la collecte de tous les bulletins, a précisé le président de la commission, Akilbek Sariev.

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) s'est félicitée du bon déroulement et la transparence des opérations de vote, tout en réclamant des améliorations pour les législatives à venir.

Le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l'homme de l'OSCE a salué la forte participation, malgré les violences ethniques qui ont fait 294 morts au moins et des centaines de milliers de réfugiés dans le Sud, début juin.

"Les citoyens kirghizes ont participé massivement au scrutin en faveur d'un avenir neuf, démocratique et pacifique", a déclaré Boris Frlec, chef de la mission d'observation.

Dès dimanche soir, quelques heures après la fermeture des bureaux de vote, la présidente par intérim, Roza Otounbaïeva, affirmait que la république d'Asie centrale était en marche vers une "véritable démocratie du peuple".

MEDVEDEV SCEPTIQUE

La réforme renforce la fonction de Premier ministre, qui récupérera une partie des prérogatives présidentielles.

Cette évolution des institutions, voulue par les nouvelles autorités mises sur pied après l'éviction du président Kourmanbek Bakiev, chassé par la rue en avril, est jugée essentielle par Roza Otounbaïeva pour rétablir la stabilité après la vague de violences communautaires.

Les Etats-Unis et la Russie, qui disposent tous deux d'une base militaire dans le pays, ont promis de soutenir un gouvernement fort pour prévenir la propagation de troubles en Asie centrale, région frontalière de l'Afghanistan.

"Nous espérons qu'il s'agit d'un véritable pas vers une gouvernance stable et démocratique", a dit un porte-parole du département américain d'Etat à Washington.

Mais le président russe, Dmitri Medvedev, a livré, lui, une analyse très tranchée, estimant que l'évolution institutionnelle menaçait jusqu'à l'existence des structures étatiques kirghizes.

"Je ne vois pas bien à quoi une république parlementaire peut ressembler et comment elle peut fonctionner au Kirghizistan", a déclaré le chef du Kremlin après le sommet du G20 à Toronto.

"Dans la situation actuelle, il existe tout un tas de scénarios pour le Kirghizistan, y compris le plus désagréable, conduisant à l'effondrement de l'Etat", a-t-il poursuivi.

Ces déclarations contrastent avec le soutien exprimé par Moscou aux nouvelles autorités de Bichkek après la chute de Bakiev début avril.

DES POLICIERS DE L'OSCE DANS LE SUD ?

Dès l'issue du scrutin, Roza Otounbaïeva a indiqué que son gouvernement était favorable à l'envoi de policiers de l'OSCE dans le sud du pays, afin de maintenir la stabilité dans cette région où ont éclaté les violences.

Invoquant des questions de sécurité, l'organisation a refusé d'envoyer des observateurs à Och. Mais un responsable de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE a soutenu la présence d'une force de police internationale.

Les violences ont suscité une profonde méfiance parmi les populations d'origine ouzbèke quant à la capacité des nouvelles autorités à assurer la sécurité et la stabilité du pays.

Roza Otounbaïeva, qui fut ambassadrice en Grande-Bretagne et des Etats-Unis, est la première femme au pouvoir dans une République d'Asie centrale.

Elle doit rester dans ses fonctions de présidente par intérim jusqu'à la fin 2011. Aux termes de la nouvelle Constitution, son successeur sera élu pour un mandat unique de six ans. Des élections législatives se tiendront en octobre. Chaque législature durera cinq ans.

Avec Dimitri Soloviov à Och, Guy Faulconbridge à Toronto et Susan Heavey à Washington, Henri-Pierre André et Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Gilles Trequesser