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Les Egyptiens réclament en masse le départ de Moubarak

Vue aérienne de la place Tahrir, au Caire, devenue le point de ralliement de la contestation contre le régime de Hosni Moubarak. Au moins un million de personnes sont descendues dans les rues - dont 200.000 dans le centre de la capitale - pour réclamer le

Vue aérienne de la place Tahrir, au Caire, devenue le point de ralliement de la contestation contre le régime de Hosni Moubarak. Au moins un million de personnes sont descendues dans les rues - dont 200.000 dans le centre de la capitale - pour réclamer le - -

Au moins un million d'Egyptiens sont descendus dans les rues ce mardi pour réclamer le départ du président Hosni Moubarak, dont l'opposition fait une condition préalable à tout dialogue avec les autorités.

Sous l'oeil bienveillant des militaires, au moins 200.000 Cairotes se sont massés sur la place Tahrir, dans le coeur de la capitale, qui est devenue depuis une semaine le point de ralliement de la contestation.

De grands rassemblements ont eu lieu dans d'autres villes d'Egypte, dont la deuxième ville du pays, Alexandrie, et Suez, haut lieu du mouvement de protestation. Des rassemblements étaient signalés aussi à Ismaïlia et dans des villes du delta du Nil comme Tanta, Mansoura, Mahalla el Koubra.

L'opposition, capitalisant sur ce succès, a enfoncé le clou, en soulignant qu'aucun dialogue ne pourrait s'engager avec le gouvernement tant que Hosni Moubarak serait au pouvoir.

Cette fin de non-recevoir venait en réponse à un appel au dialogue lancé par le nouveau Premier ministre, Ahmed Chafik, et par le ministre de l'Information, Anas Fiki.

L'opposant Mohamed ElBaradeï, rentré la semaine dernière d'Autriche pour prendre part aux manifestations, a même réclamé le départ de Moubarak du pays, afin d'éviter un bain de sang.

"Il peut y avoir un dialogue mais il doit intervenir une fois que les exigences du peuple auront été remplies et la première d'entre elles est que le président Moubarak s'en aille", a dit l'ancien directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique.

Mohamed al Beltagi, un ancien député des Frères musulmans, a fait des déclarations allant dans le même sens.

Le président Moubarak ne s'est pas adressé à la nation depuis vendredi. Les militaires, qui ont déployé des rangées de barbelés autour du palais présidentiel, avaient fait savoir lundi qu'ils jugeaient les revendications des manifestants "légitimes" et qu'ils n'ouvriraient pas le feu sur la foule.

CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES

Les manifestations ont des retombées sur l'activité économique, notamment dans les ports d'Alexandrie et de Damiette, où, en raison d'une pénurie de dockers, les navires céréaliers ont de plus en plus de mal à charger leurs cargaisons.

Le ministre des Finances, Samir Radouane, a indiqué que l'économie se ressentait des manifestations en cours depuis huit jours. "Je ne nierai pas que l'économie égyptienne en pâtisse", a-t-il dit à la BBC-radio.

Les Etats-Unis ont ordonné mardi à tout le personnel non essentiel de leur ambassade au Caire de quitter l'Egypte. A Paris, le ministère des Affaires étrangères a fait savoir que des voyagistes privés affréteraient des vols spéciaux cette semaine pour permettre à tous les touristes français en Egypte qui le souhaitent de quitter le pays.

Aucun acte de violence n'a été signalé mardi en marge des grandes manifestations. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les droits de l'homme a dit disposer d'informations faisant état de 300 morts, de plus de 3.000 blessés et de centaines d'arrestations dans les événements d'Egypte depuis le commencement des troubles le 25 janvier.

JALONS

Si la situation semble momentanément figée, certains opposants s'emploient à poser des jalons pour l'après-Moubarak.

C'est le cas de Mohamed al Beltagi, qui estime qu'un "conseil" devrait assurer l'intérim du pouvoir pendant trois mois, le temps d'organiser des élections législatives dont sortirait un gouvernement chargé de conduire le pays pendant une durée de deux ans. Ce gouvernement aurait pour mission de faire adopter des réformes constitutionnelles, en préalable à la tenue de nouvelles élections législatives.

Quant à Kamel El Helbaoui, personnalité éminente de l'organisation des Frères musulmans, il estime que le chef d'état-major des armées, le général Sami Enan, serait un candidat possible pour succéder à Moubarak, étant donné sa réputation d'homme incorruptible.

A l'étranger, la vague de contestation qui a emporté le régime de Zine ben Ali en Tunisie à la mi-janvier et secoue actuellement l'Egypte semble faire trembler le pouvoir jordanien: le roi Abdallah a limogé mardi son Premier ministre Samir Rifaï, dont des manifestants réclamaient la démission, et l'a remplacé par son ancien conseiller militaire Marouf Bakhit.

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, qui a reporté sine die sa visite prévue dans une semaine en Egypte, a invité Hosni Moubarak à écouter la colère de son peuple. Quant aux Etats-Unis, ils ont dépêché en Egypte un émissaire, Frank Wisner, ancien ambassadeur au Caire.

Bertrand Boucey, Henri-Pierre André et Eric Faye pour le service français, édité par Gilles Trequesser