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Les affrontements font près de 100 morts au kirghizistan

Colonne de fumée au-dessus d'un quartier résidentiel d'Och. Les affrontements ethniques entre Kirghizes et Ouzbeks dans la ville kirghize ont fait au moins 97 morts ces trois derniers jours et se sont intensifiés dimanche. /Photo prise le 12 juin 2010/REU

Colonne de fumée au-dessus d'un quartier résidentiel d'Och. Les affrontements ethniques entre Kirghizes et Ouzbeks dans la ville kirghize ont fait au moins 97 morts ces trois derniers jours et se sont intensifiés dimanche. /Photo prise le 12 juin 2010/REU - -

par Houlkar Isamova

OCH, Kirghizistan (Reuters) - Les affrontements ethniques entre Kirghizes et Ouzbeks, qui ont fait au moins 97 morts ces trois derniers jours, se sont intensifiés dimanche au Kirghizistan, pays d'Asie centrale qui abrite des bases militaires russe et américaine.

Les autorités kirghizes ont décidé d'envoyer des réservistes et des volontaires dans le sud du pays et autorisé les forces de sécurité à tirer sans sommation dans les régions d'Och et de Djalalabad, où des bandes armées ont incendié des maisons et des boutiques appartenant à des Ouzbeks.

Dans un communiqué, le ministère de l'Intérieur a expliqué qu'il avait décidé l'envoi de volontaires car la situation demeurait "complexe et tendue" dans ces régions qui étaient des fiefs de l'ex-président Kourmanbek Bakiev, renversé en avril et exilé en Biélorussie.

Selon des Ouzbeks assiégés dans la ville d'Och, des bandes armées, épaulées par l'armée, se livrent à un véritable génocide contre leur communauté.

Des tireurs ont ouvert le feu sur des Ouzbeks qui fuyaient la ville d'Och pour tenter de gagner la frontière avec l'Ouzbékistan.

UNE VILLE EN FLAMMES

Des témoins ont rapporté que des corps jonchaient les rues et que des maisons et des magasins étaient en flammes dans le quartier ouzbek de la ville.

"Que Dieu nous vienne en aide ! Ils tuent les Ouzbeks comme si c'étaient des chiens. La quasi-totalité de la ville est en flammes", a dit à Reuters Dilmourad Ichanov, un militant ouzbek des droits de l'homme installé à Och.

"Il s'agit d'un génocide", a affirmé Takhir Maksitov, du groupe de défense des droits de l'homme Citizen Against Production.

L'instabilité dans la région préoccupe les Etats-Unis et la Russie, qui ont des bases aériennes dans le pays.

L'ambassade américaine a annoncé dans un communiqué que des discussions étaient en cours avec le gouvernement intérimaire en vue de l'envoi d'une aide humanitaire.

Un bataillon de parachutistes russes a été envoyé au Kirghizistan pour y protéger les installations militaires russes et assurer la sécurité des militaires présents sur place, rapporte l'agence de presse Interfax.

Quinze Pakistanais ont par ailleurs été pris en otages et un autre a été tué lors des troubles à Och, a annoncé le ministre pakistanais des Affaires étrangères, Shah Mehmood Qureshi.

Quelque 1.200 Pakistanais, surtout des étudiants, vivent au Kirghizistan mais beaucoup d'entre eux sont rentrés chez eux pour les vacances d'été.

Pour la présidente kirghize par intérim, Roza Otounbaïeva, Bakiev et ses partisans sont à l'origine des troubles.

BAKIEV DÉMENT TOUTE IMPLICATION

De Minsk, l'ancien président a démenti toute implication dans les violences et a dénoncé les "mensonges éhontés" du nouveau pouvoir.

"La République kirghize est sur le point de perdre son indépendance. Les gens meurent et personne au sein des autorités en place n'est en mesure de les protéger", a-t-il dit.

Les partisans de Bakiev s'étaient emparés brièvement de plusieurs bâtiments publics dans le Sud le 13 mai dernier, défiant les autorités centrales. Le gouvernement d'Otounbaïeva contrôle difficilement cette région séparée de la capitale Bichkek par une chaîne de montagnes.

Le gouvernement intérimaire a sollicité samedi l'aide militaire de la Russie pour rétablir l'ordre après les émeutes qui ont fait 97 morts - 83 à Och et 14 à Djalalabad - et 1.243 blessés, selon le ministère de la Santé.

Moscou, estimant qu'il s'agit d'un conflit purement interne, a repoussé cette demande dans l'immédiat mais a promis d'aborder la question lundi lors d'une réunion de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), qui réunit sept anciennes républiques soviétiques.

Le président russe Dmitri Medvedev suit la situation de près et en a discuté avec ses homologues du Kazakhstan et de l'Ouzbékistan, deux pays frontaliers du Kirghizistan.

Le ministre de la Défense du gouvernement kirghize, Ismaïl Isakov, a pourtant de nouveau réclamé dimanche l'intervention de la Russie.

Leurs maisons attaquées par des bandes armées, de nombreux Ouzbeks ont fui Och pour gagner la frontière avec l'Ouzbékistan et des milliers de femmes et d'enfants on pu franchir la frontière, mais les autorités ouzbèkes ont fermé la frontière dans la nuit.

Le ministère ouzbek des Affaires étrangères a fait part de sa préoccupation concernant la situation à Och.

Les Ouzbeks ne représentent que 14,5% des 5,3 millions d'habitants au Kirghizistan mais constituent près de la moitié de la population du Sud du pays.

Pierre Sérisier et Marine Pennetier pour le service française