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Le projet de nouvelle constitution égyptienne adopté

L'assemblée constituante égyptienne dominée par les islamistes a adopté vendredi matin un projet de nouvelle constitution qui sera présenté au président Mohamed Morsi dans la journée pour sa ratification, avant d'être soumis à référendum. /Photo prise le

L'assemblée constituante égyptienne dominée par les islamistes a adopté vendredi matin un projet de nouvelle constitution qui sera présenté au président Mohamed Morsi dans la journée pour sa ratification, avant d'être soumis à référendum. /Photo prise le - -

par Marwa Awad et Yasmine Saleh LE CAIRE (Reuters) - L'assemblée constituante égyptienne dominée par les islamistes a adopté vendredi matin un...

par Marwa Awad et Yasmine Saleh

LE CAIRE (Reuters) - L'assemblée constituante égyptienne dominée par les islamistes a adopté vendredi matin un projet de nouvelle constitution qui sera présenté au président Mohamed Morsi dans la journée pour sa ratification, avant d'être soumis à référendum.

Le chef de l'Etat espère que le mouvement de contestation auquel il fait face depuis une semaine s'éteindra de lui-même une fois promulgué le nouveau texte fondamental, préalable indispensable à de nouvelles élections l'an prochain.

L'opposition laïque dénonce une dérive autoritariste du président issu des Frères musulmans depuis qu'il a publié un décret lui octroyant des pouvoirs exceptionnels jusqu'à l'élection d'un nouveau parlement.

Dans une allocution télévisée jeudi soir, Mohamed Morsi a déclaré que son décret, qui protège ses décisions de tout recours en justice, ne s'appliquerait que pour une période "exceptionnelle". "Cela se terminera dès que le peuple aura voté sur une constitution (...). Il n'y a pas de place pour la dictature", a-t-il ajouté.

L'assemblée constituante, dont la domination islamiste est contestée par le camp laïque, a fini de voter vendredi aux premières heures sur le projet de texte fondamental qui reflète selon les islamistes les nouvelles libertés conquises depuis le renversement d'Hosni Moubarak en février 2011.

Le texte, qui compte 234 articles, maintient les "principes de la charia", la loi islamique, comme source principale de la législation, ce qui était déjà le cas sous Moubarak mais que le camp laïque voulait abroger.

"Nous avons achevé notre travail sur la constitution de l'Egypte. Nous appellerons aujourd'hui le président à une heure raisonnable pour l'informer que l'assemblée a terminé son travail et que le projet de constitution est achevé", a déclaré Hossam el Gheriani, le président de la constituante, au terme d'une séance qui aura duré 19 heures.

Un référendum doit intervenir dans les quinze jours après la ratification du texte fondamental par le chef de l'Etat.

UNE CONSTITUTION "RÉVOLUTIONNAIRE"

"C'est une constitution révolutionnaire", a assuré Gheriani, qui a exhorté les membres de la constituante à sillonner le pays pour "expliquer à la nation cette constitution". L'hymne national a ensuite été joué pour clore cette séance retransmise à la télévision.

Hossam el Gheriani a précisé que l'assemblée se chargerait administrativement de préparer le référendum que Morsi devrait convoquer après avoir ratifié le document.

Les adversaires du chef de l'Etat critiquent cette précipitation dans l'adoption d'une constitution qu'ils jugent prise en otage par les Frères musulmans et leurs alliés.

Les opposants au chef de l'Etat campent à nouveau place Tahrir, lieu emblématique de la "révolution du Nil" au coeur du Caire, et ont appelé jeudi à "poursuivre les défilés pacifiques et les manifestations dans toutes les rues et les places d'Egypte", alors que le camp islamiste prévoit de manifester samedi en soutien du président. Les responsables des Frères musulmans ont toutefois renoncer à appeler à manifester place Tahrir afin d'éviter tout affrontement.

Dans son allocution, Mohamed Morsi a salué le rôle de l'opposition - "Je suis très heureux que l'Egypte ait une vraie opposition politique", a-t-il dit - tout en l'exhortant à ne pas diviser l'Egypte ni recourir à la violence.

Onze journaux égyptiens comptent ne pas paraître mardi pour protester contre le décret Morsi. Trois chaînes privées de télévision par satellite n'émettront pas mercredi en signe de protestation elles aussi, a déclaré le journal Al Masry al Youm.

La confrérie, qui a remporté tous les scrutins depuis la chute d'Hosni Moubarak, fait le pari qu'elle pourra mobiliser suffisamment d'électeurs pour remporter le référendum et que les querelles sur le texte ou sur la composition de la constituante, qui a entamé ses travaux il y a six mois, seront vite oubliées.

"DE BONS ARTICLES, D'AUTRES CATASTROPHIQUES"

La nouvelle constitution égyptienne introduit de nouvelles références à l'islam dans le système de gouvernement. Il stipule en outre que le chef de l'Etat ne peut effectuer plus de deux mandats de quatre ans chacun. Hosni Moubarak est resté au pouvoir près de trente ans.

Le texte prévoit également une supervision par les civils de l'institution militaire, mais encore trop timide pour les détracteurs du projet.

Pour déclarer la guerre, le chef de l'Etat devra, en plus d'obtenir l'aval du Parlement, demander l'avis du Conseil national de défense. Du temps de Moubarak, lui-même ancien chef de l'armée de l'air, le président avait seulement à obtenir le feu vert du Parlement pour déclencher des hostilités.

Les militants d'opposition ont dénoncé certains articles limitant selon eux la liberté d'expression.

"Il y a de bons articles, favorables aux libertés, mais il y en a d'autres qui sont catastrophiques, comme celui concernant les injures, qui pourrait être utilisé contre les journalistes critiquant le président ou d'autres représentants de l'Etat", a dit le militant des droits de l'homme Gamal Eïd.

"Nous voulions que les Egyptiens aient plus de libertés et que le président ait moins de pouvoirs... A cet égard, nous ne pouvons qu'être insatisfaits", a dit Edward Ghaleb, représentant de l'Eglise copte au sein de l'assemblée constituante.

Marwa Awad, Yasmine Saleh; Guy Kerivel, Danielle Rouquié, Pascal Liétout, Jean-Stéphane Brosse pour le service français