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Le gouvernement égyptien rejette les conseils américains

Partisans de l'opposition déployant un drapeau égyptien sur la place Tahrir, au Caire. Alors que la mobilisation ne faiblit pas sur l'immense place du centre de la capitale égyptienne, le gouvernement égyptien a dénoncé ce qu'il a qualifié de tentatives a

Partisans de l'opposition déployant un drapeau égyptien sur la place Tahrir, au Caire. Alors que la mobilisation ne faiblit pas sur l'immense place du centre de la capitale égyptienne, le gouvernement égyptien a dénoncé ce qu'il a qualifié de tentatives a - -

par Yasmine Saleh et Patrick Werr LE CAIRE (Reuters) - Le gouvernement égyptien a dénoncé mercredi ce qu'il a qualifié de tentatives américaines...

par Yasmine Saleh et Patrick Werr

LE CAIRE (Reuters) - Le gouvernement égyptien a dénoncé mercredi ce qu'il a qualifié de tentatives américaines "d'imposer" la volonté des Etats-Unis à un allié fidèle et a fait valoir que des réformes rapides seraient trop risquées.

Tandis qu'au Caire des manifestants hostiles au président Hosni Moubarak renforçaient un nouveau campement autour du bâtiment abritant le Parlement, la Maison blanche a réaffirmé que les ministres égyptiens doivent faire davantage pour répondre aux revendications des manifestants qui réclament le départ immédiat de Moubarak et des réformes radicales.

Interrogé par la chaîne publique américaine PBS, le ministre égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Aboul Gheit s'est déclaré "stupéfait" par les propos du vice-président américain Joe Biden, qui a réclamé mardi la levée immédiate de l'état d'urgence, depuis longtemps utilisé par Moubarak pour réprimer l'opposition.

Depuis le début des manifestations en Egypte, en partie inspirées par le soulèvement qui a renversé en Tunisie l'ancien président Zine ben Ali, l'administration américaine a hésité entre le soutien à un allié dans le conflit qui oppose Washington à l'islamisme radical et l'appui aux revendications en faveur de la démocratie.

Elle s'est abstenue de soutenir les appels à un départ immédiat de Moubarak qui a annoncé la semaine dernière qu'il se retirerait en septembre, à l'issue de l'élection présidentielle.

Mais des responsables américains se sont dans le même temps impatientés face à la lenteur des réformes, soutenant les manifestants en demandant un changement immédiat et concret.

Robert Gibbs, porte-parole de la Maison blanche, a déclaré que les rangs des manifestants continuaient de grossir en Egypte et que le gouvernement de Moubarak devait prendre des mesures "réelles et concrètes" pour leur donner satisfaction.

"Ce que vous voyez dans les rues du Caire n'est vraiment pas surprenant lorsque vous voyez l'absence de mesures prises par leur gouvernement pour répondre à leurs préoccupations", a dit Gibbs.

MANIFESTATIONS

Au lendemain du plus important rassemblement enregistré jusqu'ici dans la capitale, la place Tahrir, point de ralliement de l'opposition, était toujours pleine de monde.

"Nous mettons la pression sur eux progressivement et, au bout du compte, ils tomberont", prédit Karam Mohamed, originaire de la province de Beheira, dans le delta du Nil, assurant que la vague de protestation, qui a fait 300 morts et des milliers de blessés, s'amplifie.

Dans la capitale, les organisateurs de la mobilisation ont fait part de leur projet de marcher vendredi sur l'immeuble de la radio et télévision d'Etat, porte-voix du régime. "Je pense qu'il y aura foule devant le bâtiment. Le président Moubarak tombera bientôt, dans trois ou quatre jours, je pense", a prédit Mohamed Sadik, un ingénieur cairote.

Des centaines d'autres manifestants ont consolidé un nouveau campement devant le Parlement. Sur la grille principale du bâtiment, ils ont accroché une pancarte proclament: "Fermé jusqu'à la chute du régime".

Le bureau du nouveau Premier ministre, Ahmed Chafik, se trouve à proximité. Il a rencontré mercredi des hommes d'affaires et leur a dit qu'il continuait de rechercher des investissements étrangers pour stimuler l'économie.

"Mais notre priorité immédiate est maintenant de surmonter cette crise avec le moins de dégâts possible", a dit son porte-parole, Magdy Rady.

Selon des analystes du Crédit Agricole, la crise coûte 310 millions de dollars par jour à l'Egypte.

Le Canal de Suez, ressource vitale pour le pays, a fait état d'une baisse de revenus de 1,6% en janvier par rapport à décembre. Mais les revenus restent en hausse par rapport à janvier 2010 et les autorités affirment que les opérations ne sont pas affectées par les troubles.

VIOLENCES

Quatre personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées par balles mardi et mercredi lors d'affrontements entre les forces de sécurité et environ 3.000 manifestants dans le gouvernorat de la Nouvelle Vallée, à 500 km au sud du Caire.

Il semble s'agir des heurts les plus graves avec les forces de sécurité depuis le 28 janvier, date à laquelle la police a pratiquement disparu des rues après une sanglante répression de manifestations.

La semaine dernière, l'attaque de manifestants par des partisans de Moubarak en civil avait aussi causé une effusion de sang au Caire.

L'Etat islamique d'Irak (ISI, branche irakienne d'Al Qaïda) a reproché au gouvernement égyptien de ne pas appliquer une stricte loi islamique et a affirmé qu'il vaut mieux pour les musulmans mourir en combattant leur gouvernement que de vivre sous ce régime.

Réagissant à des propos du vice-président égyptien Omar Souleimane, qui a dit mardi que des activistes liés à Al Qaïda s'étaient évadés de prison par milliers depuis le 28 janvier, ISI a invité les musulmans égyptiens à libérer tous les prisonniers.

On dispose de peu de précisions sur les liens entre l'ISI et les activistes égyptiens et sur l'étendue de son influence, mais certains analystes disent que le groupe pourrait être à l'origine du meurtrier attentat du mois dernier contre une église copte égyptienne.

Les Frères musulmans, mouvement islamiste égyptien, ont renoncé il y a plusieurs décennies à la violence comme moyen d'obtenir un changement politique et ils ont prévenu que tout effort pour tenter de contrer leur influence risquait d'entraîner une radicalisation de leurs idées.

Avec Samia Nakhoul, Tom Perry, Dina Zayed, Marwa Awad, Andrew Hammond, Alexander Dziadosz, Sherine El Madany, Edmund Blair, Jonathan Wright et Alison Williams au Caire, Erika Solomon et Martin Dokoupil à Dubaï, Arshad Mohammed à Washington, David Stamp à Londres et Brian Rohan à Berlin; Nicole Dupont pour le service français