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La rue égyptienne reste mobilisée, discussions en coulisses

Manifestants réclamant le départ de Hosni Moubarak, vendredi près de la place Tahrir, dans le centre du Caire. L'opposition égyptienne a réussi sa deuxième grande journée de mobilisation en réunissant des centaines de milliers de personnes à travers le pa

Manifestants réclamant le départ de Hosni Moubarak, vendredi près de la place Tahrir, dans le centre du Caire. L'opposition égyptienne a réussi sa deuxième grande journée de mobilisation en réunissant des centaines de milliers de personnes à travers le pa - -

par Dina Zayed et Shaimaa Fayed LE CAIRE (Reuters) - L'opposition égyptienne a réussi sa deuxième grande journée de mobilisation en réunissant des...

par Dina Zayed et Shaimaa Fayed

LE CAIRE (Reuters) - L'opposition égyptienne a réussi sa deuxième grande journée de mobilisation en réunissant des centaines de milliers de personnes à travers le pays sans toutefois faire fléchir un Hosni Moubarak dont la succession, objet d'ambitions, est au coeur de négociations en coulisses.

Pour ce deuxième rassemblement majeur, baptisé "jour du départ" qui coïncidait avec les prières du vendredi, les adversaires du président entendaient démontrer que leur détermination ne fléchissait pas.

La précédente manifestation, mardi, avait abouti à des concessions de la part de Moubarak qui avait annoncé son intention de ne pas briguer un sixième mandat lors de l'élection présidentielle prévue en septembre.

Cette fois, le chef de l'Etat n'a pas cédé de terrain. Il est resté sur la position affichée la veille lors d'un entretien avec la chaîne américaine ABC.

Certes, le raïs admet, à 82 ans, qu'il en a assez après trois décennies à la tête de l'Egypte, mais il affirme qu'un départ anticipé plongerait son pays dans le chaos et risquerait de livrer le pouvoir aux Frères musulmans. Moubarak continue d'affirmer être le dernier rempart face aux risques d'anarchie.

Résonnant comme un écho à ces propos, le "guide suprême" de la Révolution iranienne, Ali Khamenei, s'est exprimé pour la première fois publiquement sur la crise politique égyptienne.

Il a salué un "mouvement de libération islamique" et a prédit que les Etats-Unis subiraient une "défaite irrémédiable" dans la région.

L'ALLIÉ DE 30 ANS

La possibilité de voir se reproduire en Egypte un scénario identique à celui de la révolution iranienne de 1979 constitue une crainte de la Maison blanche. L'Egypte est l'un des deux pays à avoir signé une paix avec Israël et elle joue un rôle de contrepoids à l'égard de l'Iran dans la région.

Malgré cela, Washington continue de faire pression sur son allié de 30 ans et Barack Obama a espéré vendredi que son homologue égyptien parviendra à prendre la "bonne décision".

"L'avenir de l'Egypte sera décidé par son peuple", a dit le président américain lors d'une conférence de presse commune avec le Premier ministre canadien, Stephen Harper.

"Ayant accompli cette rupture psychologique, ayant pris la décision de ne pas se représenter, je pense que la chose la plus importante qu'il doit à présent se demander, c'est comment rendre cette transition efficace, durable et légitime", a souligné Obama à l'adresse d'Hosni Moubarak, qui a annoncé qu'il ne briguerait pas un sixième mandat.

En marge de ces appels publics, les Américains ont reconnu qu'ils discutaient avec leurs partenaires égyptiens pour trouver les moyens d'une "transition ordonnée" et d'un départ anticipé du président Moubarak.

"La seule chose qui fonctionnera, c'est faire progresser une transition ordonnée qui commence tout de suite, qui engage tous les partis, qui mène à des pratiques démocratiques, des élections libres et équitables, un gouvernement représentatif qui réponde aux revendications du peuple égyptien", a expliqué Obama.

Le Premier ministre égyptien, Ahmed Chafik, a lui estimé que "plus de 95% du peuple égyptien voteraient pour que le président achève son mandat et ne se retire pas".

CONSEIL DE SAGES

Dans ce contexte, le vice-président, Omar Souleimane, va recevoir samedi des personnalités indépendantes qui proposent un règlement de la crise aux termes duquel il assumerait les pouvoirs présidentiels au cours d'une période de transition.

Cette option, qui se ferait avec l'appui de l'armée, acteur central dans le jeu politique en Egypte, était évoquée jeudi soir par le New York Times citant des responsables américains et des diplomates arabes.

Un "Conseil des sages" doit rencontrer Souleimane pour étudier une solution fondée sur la Constitution et permettant à Moubarak de transmettre son pouvoir à son adjoint, une option qui a l'aval des Etats-Unis et des cinq principales puissances de l'Union européenne.

Les sages pourraient se fonder sur l'article 139 de la Constitution, selon lequel le président peut nommer un ou plusieurs vice-présidents et définir leurs compétences.

Mais l'article 82 complique le processus en prévoyant une délégation de pouvoir à un vice-président sans fournir à ce dernier les attributions nécessaires à la conduite des réformes constitutionnelles promises par Moubarak.

S'il reste en fonction, Hosni Moubarak voit son pouvoir être l'objet de nombreuses ambitions. L'ancien ministre des Affaires étrangères et actuel secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, s'est rendu au Caire à l'occasion de la manifestation.

Interrogé sur Europe 1, il a déclaré qu'il n'excluait pas de se présenter à l'élection présidentielle tout en affirmant ne pas croire que Moubarak quittera son poste de manière anticipée.

De son côté, l'ancien lauréat du prix Nobel de la paix, Mohamed ElBaradeï, a démenti les affirmations selon lesquelles il n'envisageait pas de se présenter à la présidentielle.

"Si le peuple égyptien souhaite que je poursuive ce processus de changement, je ne le décevrai pas", a déclaré l'ancien directeur général de l'AIEA sur la chaîne Al Djazira.

Pierre Sérisier pour le service français