BFMTV
International

La France veut mieux prévenir le suicide des enfants

BFMTV
PARIS (Reuters) - La prévention du suicide des enfants, phénomène marginal mais en progression dans plusieurs pays, commence dès avant la naissance,...

PARIS (Reuters) - La prévention du suicide des enfants, phénomène marginal mais en progression dans plusieurs pays, commence dès avant la naissance, souligne Boris Cyrulnik.

Le neuropsychiatre, théoricien de la "résilience" (la capacité d'un individu à surmonter un traumatisme pour ne pas sombrer dans la dépression), a remis jeudi à Jeannette Bougrab un rapport sur le sujet.

La secrétaire d'Etat à la Jeunesse lui avait confié cette mission en février dernier à la suite du suicide d'une fillette diabétique de neuf ans près de Lyon et d'un garçon de 11 ans - fils unique, bon élève - en Seine-Saint-Denis.

Selon l'Institut national français de la santé et de la recherche médicale (Inserm), 37 enfants et pré-adolescents de 5 à 14 ans se sont donné la mort en 2009 en France. Il s'agit des dernières données disponibles.

Mais Boris Cyrulnik considère que le phénomène est sous-estimé - "les chiffres ne parlent que des suicides évidents" - et que beaucoup d'accidents d'enfants n'en sont pas.

Il cite le cas d'enfants tellement malheureux qu'ils vont trop se pencher par la fenêtre, traverser la rue sans regarder ou descendre du bus en marche...

Pour le neuropsychiatre, c'est "une cascade de déchirures invisibles" qui mène au passage à l'acte, alors que les enfants commencent à comprendre la mort entre six et neuf ans.

Deuil précoce, conflit familial, maltraitance, agression sexuelle, isolement affectif, mal-être, harcèlement à l'école sont au nombre de ces "déchirures" fatales.

"PICHENETTE"

Boris Cyrulnik insiste sur la nécessité d'offrir à l'enfant une stabilité affective et sensorielle dès sa conception.

"L'isolement affectif d'un nouveau-né donne dans le cerveau une trace cérébrale qui l'empêche de maîtriser la pulsion. Ensuite l'isolement affectif de l'enfant ou de l'adolescent déclenche la pulsion pour simplement une pichenette", a-t-il expliqué sur France Info.

Cette "pichenette", ce peut être "une phrase blessante, une petite frustration, une mauvaise note à l'école ou le déménagement d'un copain".

Boris Cyrulnik recommande de lutter contre le stress maternel pendant la grossesse, "surtout dans les dernières semaines", et prône de longs congés parentaux - au moins dix mois - pour le père et la mère.

Il préconise en outre de développer les métiers de la petite enfance et invite à cesser de "surinvestir" l'école, "facteur d'angoisse et de suicide". Revoir les rythmes scolaires français serait à cet égard un progrès majeur, juge-t-il.

"Les enfants d'Europe du Nord sont deux fois moins stimulés que les enfants d'Europe du Sud et ces enfants-là sont premiers dans les classements internationaux des évaluations scolaires", a-t-il expliqué sur France Info.

"En moins de dix ans, la Finlande et les pays d'Europe du Nord ont obtenu une diminution de 40% des suicides", a-t-il relevé.

Le rapport, qui "brise un tabou" selon Jeannette Bougrab, est publié aux éditions Odile Jacob sous le titre "Quand un enfant se donne 'la mort'".

Sophie Louet, édité par Yves Clarisse