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Ukraine: à Marioupol, des logements flambants neufs sortent de terre après les ravages de la guerre

Marioupol a été détruite à plus de 80% depuis le début de la guerre, mais la ville, désormais gérée par une administration russe, fait l'objet d'un projet de réhabilitation financé par le ministère russe de la Défense.

Immeubles éventrés, maisons dévastées... La ville de Marioupol, dans le sud du Donbass, a été presque entièrement détruite par l'offensive russe en Ukraine. Mais Vladimir Poutine veut faire de cette ville la vitrine de sa conquête du Donbass, en construisant de nouveaux immeubles et projetant de la réhabiliter pour attirer des centaines de milliers de nouveaux habitants.

Marioupol a été longtemps le symbole de la ville la plus détruite du Donbass, rappelle Paul Gogo, journaliste et coréalisateur du documentaire "Ukraine, au coeur des territoires occupés", diffusé lundi soir sur BFMTV.

Logements neufs habitables gratuitement

Dima, rencontré par les reporters de Ligne Rouge, pourra vivre dans l'un de ses appartements avec sa compagne, Irina, sans payer de loyer et sans limite de temps, bien qu'ils ne soient pas propriétaires. "On nous a attribué un appartement de 24 m2 de plus par rapport à mon ancien appartement, tout ça gratuitement", précise le couple.

"C'est un appartement neuf, les travaux d'intérieur sont déjà faits", s'enthousiame la future habitante.

"C'est la Russie qui a construit tout ça, nous leur sommes reconnaissants. Ils n'ont pas laissé tomber les gens, ils nous aident à retrouver une vie normale", a commenté aux reporters BFMTV Dima.

Sur place, la propagande de Vladimir Poutine est bien organisée, a noté Paul Gogo. "Il y a des chantiers un peu étranges, dans le centre de Marioupol", et pas seulement des immeubles qui offriront des futurs logements. "Il y a des parcs aussi, qui apparaissent avec des fontaines, au milieu de places autour desquelles il n'y a que des bâtiments complètement carbonisés."

Un projet de réhabilitation titanesque

La Russie veut faire de Marioupol une cité balnéaire avec un port de plaisance et une grande plage touristique, autant d'installations destinées à convaincre les habitants de revenir dans cette ville qui a été dévastée par la guerre. Le Kremlin aimerait voir, d'ici 2035, 500.000 habitants russes dans la ville et met pour cela les moyens : tous les travaux sont financés par le ministère russe de la Défense.

En mars, le président russe Vladimir Poutine s'était rendu à Marioupol, pour sa première visite en zone occupée. Il avait fait le tour de la ville, lui-même au volant d'une voiture, a échangé avec des habitants, visité des lieux d'intérêts et s'est fait présenter un rapport sur les travaux de reconstruction de cette ville dévastée.

Mais cette visite du Maître du Kremlin dans ce quartier nouvellement créé "n'était pas forcément une bonne chose" pour les habitants, selon Paul Gogo. "Ils ont peur que ce soit devenu un symbole et maintenant ils ont peur, même, que l'Ukraine s'en prenne à ces immeubles-là".

Les reporters ont rencontré des pro-Russes mais aussi des pro-Ukrainiens qui déclaraient être prêts à accepter ce genre d'appartement. "Il n'y a pas forcément un grand enthousiasme, mais à Marioupol, de manière générale, la population est encore sous le choc du siège". Pour le moment, il n'y a pas de mouvement de retour des personnes parties de Marioupol.

À Lougansk, des publicités à la gloire du Kremlin

Lougansk, annexée par la Russie en septembre dernier, est l'une des villes les plus importantes du Donbass, à l'Est de l'Ukraine. "La Russie, ce sont des traditions et des valeurs avec lesquelles nous avons grandi", peut-on notamment y lire.

"L'opposition est inexistante ici, il n'y a que deux possibilités, soit tu soutiens la Russie, sois tu te tais", dénonce un chauffeur qui a requis l'anonymat à Lougansk.

"Je vis sous occupation", regrette-t-il encore, alors que Moscou souhaite intégrer à part entière cette zone du Donbass dans la Fédération de Russie. Les habitants y reçoivent des passeports russes, environ 30.000 par mois. Ceux qui ne l'auront pas reçu seront expulsés vers l'Ukraine, à partir du mois de juillet.

À Marioupol, la contre-offensive est dans tous les esprits, "tout le monde fait attention", explique Paul Gogo, notamment sur cette question des passeports. "On a peur de demander le passeport russe parce qu'on a peur d'être considéré comme un collaborateur" en cas de retour de l'Ukraine.

Paul Gogo avec Marine Ledoux