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Tuerie à l'arbalète en Allemagne: les enquêteurs sur la piste d'un pacte suicidaire passé avec un gourou

L'auberge de Bavière où ont été trouvés les trois premiers corps.

L'auberge de Bavière où ont été trouvés les trois premiers corps. - Lino Mirgeler - dpa - AFP

Trois personnes tuées à l'arbalète, deux autres victimes retrouvées à 600km, des combats à l'épée, un entourage douteux... Le mystère s'épaissit autour de la tuerie qui intrigue l'Allemagne depuis plusieurs jours.

L'affaire de la tuerie à l'arbalète en Allemagne révèle chaque jour son lot de détails: l'homme découvert le corps criblé de flèches se comportait comme le gourou dominateur d'une secte ésotérique avec les autres femmes retrouvées mortes, selon des enquêtes des médias allemands.

Cet étrange dossier, où se mêlent soupçons de manipulation, y compris sexuelle, d'ésotérisme médiéval et de pacte suicidaire, laisse perplexe l'opinion allemande depuis plusieurs jours.

Les corps sans vie des cinq victimes ont été retrouvés en deux temps, samedi puis lundi. La police a d'abord découvert ceux d'un homme, Torsten W., et de deux femmes, Kerstin E. et Farina C.. Leurs corps étaient transpercés de carreaux d'arbalètes, dans une chambre d'hôtel à Passau, en Bavière. Le trio y était arrivé la veille au soir. Il n'y avait pas de traces de violences selon les enquêteurs.

Les victimes se connaissaient

Les deux autres victimes, Gertrud C. et Carina U., ont été retrouvées mortes dans l'appartement de Farina C., à plus de 600 km au nord, à Gifhorn, en Basse-Saxe. Les victimes étaient vraisemblablement liées entre elles, y compris sur le plan intime, selon les médias allemands: Gertrud C. était la compagne de Farina C.

Concernant les corps des deux femmes retrouvés dans le nord du pays, là encore l'autopsie n'a décelé "aucun signe de violence extérieure". Leur mort remonte à "quelques jours", a indiqué la police mardi soir, et les deux victimes n'ont pas été tuées à l'arbalète.

Torsten W., 53 ans, semble avoir joué un rôle central dans le groupe. D'après la chaîne de télévision RTL Allemagne et le quotidien Bild, il paraît s'être comporté en gourou tyrannique pour contrôler les quatre femmes.

"Les enquêteurs soupçonnent qu'ils étaient tous membres d'un genre de groupe sexuel focalisé sur le Moyen-Âge. Torsten W. pourrait avoir été leur gourou", a dit RTL. Bild affirme qu'il a été "en relation avec plusieurs des femmes qu'il contrôlait comme un maître".

Les parents de la jeune victime dénoncent un embrigadement

Le média Focus évoque trois autres hommes avec qui il a régulièrement loué des logements, dont un professeur s'étant suicidé il y a trois ans, qui aurait embrigadé Carina U. Elle était devenue dépressive et avait coupé le contact avec ses parents sous l'influence de Torsten W., ont raconté ces derniers à RTL-Allemagne. Elle l'avait rencontré à l'occasion d'entraînements à des sports de combat.

Sa mère se souvient qu'il n'y en avait que pour "Torsten, Torsten, Torsten" tandis que son père avoue ne toujours pas comprendre comment "quelqu'un peut réussir à manipuler une autre personne de la sorte en quatre à six semaines", car sa fille était auparavant "heureuse".

Ce dernier, la cinquantaine, une longue barbe blanche, tenait une boutique médiévale en Rhénanie-Palatinat (ouest), "Milites Conductius". Il vendait des poignards et épées du Moyen-Age, des casques d'armure, ainsi que de l'hydromel, une boisson ancestrale réputée "nectar des dieux". Le soir, il organisait des séances de combat à l'épée. Il s'était fait tatouer des symboles des alchimistes, un mouvement ésotérique vivace au Moyen-Âge et prétendant parvenir à la transmutation des métaux.

Un ancien propriétaire à charge

Les enquêteurs cherchent à savoir si des habitués de cette boutique sont susceptibles d'être impliqués dans cette affaire, comme ils tentent de connaître les relations exactes qui liaient entre elles ces victimes.

Alexander Krüger, un ancien propriétaire du présumé gourou en 2017, a déclaré au quotidien Bild qu'il vivait à l'époque avec un couple lesbien auquel il donnait très sèchement des ordres. Le "langage corporel (des femmes) était dévot, la tête baissée", se rappelle celui qui n'avait jamais entendu un "ton si dur". Le propriétaire a finalement expulsé l'homme après avoir été frappé par lui.

Les enquêteurs s'orientent dans ce contexte toujours vers la piste d'un pacte suicidaire, sans qu'une raison claire ne soit encore définie.

"Aucun élément ne montre qu'il y ait pu y avoir une dispute entre les personnes présentes" dans la chambre, a fait savoir la police. Concernant les corps des deux dernières femmes, Carina U. et Gertrud C., là encore l'autopsie n'a décelé "aucun signe de violence extérieure". Et leur mort, dont la cause reste inconnue, remonte à "quelques jours", a dit la police.
Liv Audigane avec AFP