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MH17: le missile sol-air "Bouk" derrière le crash de l'avion?

Un missile sol-air Buk-M2E.

Un missile sol-air Buk-M2E. - -

Autorités ukrainiennes et rebelles pro-russes s'accusent mutuellement d'avoir abattu l'avion de la Malaysia Airlines jeudi. Le type de missile qui a atteint le vol MH17 peut donner des indices sur l'auteur du tir.

Qui a tiré sur le vol MH17 qui survolait l'est de l'Ukraine jeudi soir, provoquant le crash de l'appareil et la mort de ses 298 passagers? Séparatistes pro-russes ou forces ukrainiennes, difficile de savoir, d'autant que les deux camps se renvoient la balle.

On sait en revanche, que seul un certain type de missile peut avoir atteint l'avion, qui volait à 10.000 mètres d'altitude. Cela exclut en effet les lance-missiles portatifs, dont la portée n'excède pas 3.000 mètres.

> Quel type de missile a pu toucher le vol MH17?

On ne sait d'où le missile a été tiré, mais les experts s'accordent sur le type de missile qui a pu atteindre l'appareil de la Malaysia Airline. Selon les renseignements américains il s'agit d'un missile sol-air. Tout pointe vers le modèle de conception russe, le Bouk M2 ou SA-17.

D'une portée de 45 km, il est constitué d'un radar pour détecter la cible, d'un poste de commandement, d'une plate-forme de tir avec 4 rampes de lancement et d'un système de tir monté sur chenilles.

This is the type of missile launcher believed to have brought down #MH17 http://t.co/0slag1zdzB pic.twitter.com/Y6OX4BrjaB
— Daily Mail Online (@MailOnline) 17 Juillet 2014

Il existe deux versions de ces missiles fabriqués par les Russes depuis les années 70 : le Bouk-M1 et le Bouk-M2, appelés dans la terminologie de l'Otan le "Gadfly SA-11" et le "Grizzly SA-17".

Leur particularité : "ils peuvent atteindre des cibles à une altitude de 72.000 pieds (22.000 mètres), soit plus de deux fois plus que les 33.000 pieds d'altitude à laquelle volait le Boeing 777", en provenance d'Amsterdam et à destination de Kuala Lumpur, explique Doug Richardson, analyste chez IHS Jane's, société américaine d'information militaire.

Les systèmes Bouk sont mobiles, installés sur des véhicules. Ils peuvent frapper des avions, des drones, des hélicoptères, des missiles de croisière et d'autres cibles. Mais l'utilisation de ces missiles "est complexe. Il faut trois camions, un pour le poste de commandement, un pour transporter le radar, et un pour tirer les projectiles", selon Doug Richardson.

> Quelles sont les armes des Ukrainiens?

L'Ukraine dispose de toute une batterie de missiles héritée de l'ère soviétique. "Il y a des millions d'armes en circulation depuis la chute de l'Union sociétique en 1991. Des armes légères, des armes lourdes, sont disséminées absolument partout", indique sur BFMTV Philippe Migaud, spécialiste de la Russie.

Les Ukrainiens ont ainsi en leur possession des "missiles longue portée tels que les SA-2, -3, 5, et -12, qui atteindraient sans problème une cible volant à 10.000 mètres", note dans un communiqué Doug Richardson. "Cependant, ces systèmes sont déployés sur des sites de lancement qui ont des radars associés à leurs lance-missiles. Leurs opérateurs auraient une bonne idée du trafic aérien dans la zone environnente, et auraient peu de chance de confondre un avion de ligne et un avion de combat".

> De quel arsenal disposent les séparatistes pro-russes?

Au moment des événements de Maïdan, de unités entières de l'armée ukrainienne ont déserté avec leur matériel. Ces soldats ukrainiens passés dans le camp séparatiste ont "la maîtrise des armements qu'ils ont emporté avec eux", explique Philippe Migaud. Cela inclut "des armes légères, des blindés, des missiles".

Il y a quelques jours, les séparatistes revendiquaient la prise de contrôle d'une batterie de missile Buk appartenant à l'armée ukrainienne. "Ils sont capables de tirer un de ces missiles. Théoriquement, les deux camps sont en mesure de tirer ce type d'engin", souligne Philippe Migaud.

> Quelles sont les hypothèses pour ce tir?

Un expert cité par Challenges considère peu probable qu'il s'agisse d'une erreur, dans la mesure où "un 777 n'a pas la signature radar d'un Antonov".

Doug Richardson avance, lui, une autre hypothèse, celle du tir décidé par le seul opérateur de la rampe de lancement. "Dans un engagement normal, les trois équipements du système opèrent ensemble, comme un système d’armes intégré, et l’équipage du centre de commandement a une bonne vision de l’activité aérienne du secteur, explique-t-il. Cependant, un lanceur Buk peut aussi opérer en solitaire, et engager une cible présente dans son champ radar."

> Sera-t-il possible de déterminer la provenance du tir?

Seuls les Etats-Unis et la Russie ont aujourd'hui les moyens de détecter par satellite le départ d'un missile, indique Philippe Migaud, qui précise: "détecter un départ de missile tactique, cela implique que vous ayez un satellite qui passe à ce moment là au-dessus de la région et qu'il soit en train de surveiller précisément la zone d'où part le tir". Cela n'est pas impossible mais implique un faisceau de coïncidences, pour l'expert.

Selon un responsable de l'Otan cité par l'AFP, deux appareils de surveillance Awacs de l'Otan étaient en opération au dessus de la Pologne et de la Roumanie "à l'heure de l'accident". Les données de leur vol étaient vendredi en cours d'examen, mais "en raison de la grande distance séparant la route des Awacs de la zone où l'avion s'est écrasé, nous ne nous attendons pas à ce que nos appareils aient enregistré l'accident"

Magali Rangin