Le cas Cesare Battisti va peser sur les relations Italie-Brésil

ROME (Reuters) - Les relations entre l'Italie et le Brésil seront gravement affectées si Brasilia refuse effectivement d'extrader Cesare Battisti, prévient le ministre italien de la Défense.

Selon des médias brésiliens, le président sortant Luiz Inacio Lula Da Silva annoncera d'ici vendredi qu'il refuse d'extrader l'ancien activiste d'extrême-gauche en Italie, où la justice l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Battisti s'est évadé de prison en 1981 et a vécu en France jusqu'en 2004, avant de fuir au Brésil lorsque la justice française a donné son feu vert pour l'extradition.

"Personne ne peut imaginer qu'un 'non' à la demande d'extradition de Cesare Battisti serait sans conséquence", déclare le ministre de la Défense Ignazio La Russa au Corriere della Sera dans un entretien paru jeudi.

"Je pense que cela serait un grand préjudice pour les relations bilatérales", ajoute La Russa.

La Russa, ministre de l'aile droite du parti de Silvio Berlusconi, est un proche du président du Conseil mais sa position ne reflète pas forcément celle de la diplomatie italienne.

"En ce qui me concerne, je suis prêt à prendre d'autres initiatives", dit-il, affirmant qu'il pourrait soutenir le boycott de produits brésiliens.

L'accord de coopération militaire avec le Brésil, qui doit être adopté le 11 janvier par le parlement italien, est en revanche trop avancé pour être affecté, ajoute-t-il.

"JE N'IRAI PAS EN ITALIE"

Ancien membre des "Prolétaires armés pour le communisme", Cesare Battisti a été condamné à perpétuité par contumace pour sa participation dans quatre homicides commis durant "les années plomb", en 1978 et 1979.

Son cas a déjà provoqué une tension avec Rome, qui avait rappelé son ambassadeur pour consultations début 2009, après des prises de position de l'administration Lula favorables à Battisti.

En novembre 2009, la Cour suprême du Brésil s'est prononcé pour son extradition mais la décision appartient en dernier ressort, comme toujours en cette matière, aux autorités politiques et donc au président Lula.

Lula a annoncé cette semaine qu'il se déciderait d'ici vendredi, afin de ne pas laisser à Dilma Rousseff, présidente-élue du Brésil qui lui succédera le lendemain, ce dossier qui encombre les relations diplomatiques.

À la présidence brésilienne, on indiquait mercredi qu'aucune décision formelle n'avait été arrêtée. Si les informations de la presse brésilienne se confirment, le dossier sera définitivement refermé et Battisti retrouvera la liberté au Brésil, où il est sous écrou extraditionnel depuis son arrestation en mars 2007.

Il est soutenu par une partie de l'état-major du Parti des travailleurs (PT) de Lula, dont plusieurs hauts responsables lui ont rendu visite dans sa cellule, près de Brasilia.

Battisti bénéficie en outre d'un comité de soutien actif en France, où une partie du Parti socialiste, l'extrême gauche et les milieux littéraires, notamment l'auteur de romans policiers Fred Vargas, ont dénoncé la décision de l'extrader vers l'Italie.

Dans un entretien accordé en mai 2009 à l'hebdomadaire Paris Match, il reconnaissait avoir commis des "crimes" mais niait avoir tué qui que ce soit. Craignant pour sa sécurité, ou évoquant un suicide, il ajoutait: "Je n'irai pas en Italie, je n'y arriverai pas vivant."

James McKenzie, Clément Guillou et Henri-Pierre André pour le service français