BFMTV
Europe

L'espionnite saisit le Conseil européen

-

- - -

par Julien Ponthus BRUXELLES (Reuters) - Les accusations d'espionnage des citoyens, voire de dirigeants européens, par les services américains se...

par Julien Ponthus

BRUXELLES (Reuters) - Les accusations d'espionnage des citoyens, voire de dirigeants européens, par les services américains se sont imposées jeudi comme le sujet dominant d'une réunion des Vingt-Huit sommés par les eurodéputés de mieux protéger les données personnelles.

La mise sur écoute du portable d'Angela Merkel, dont le gouvernement allemand a dit avoir des raisons de penser qu'elle est avérée, a suscité des réactions indignées dans un pays qui a jusqu'à présent été très prudent sur ce dossier.

"Je répète que s'espionner entre amis n'est pas du tout acceptable", a déclaré Angela Merkel à son arrivée au Conseil européen de Bruxelles. "Ce n'est pas simplement pour moi, c'est pour tous les citoyens allemands."

Barack Obama a assuré à Angela Merkel que les services de renseignement américains ne surveillaient pas et ne surveilleraient pas ses communications, a indiqué mercredi la Maison blanche.

Plusieurs responsables européens se sont relayés jeudi pour dénoncer les pratiques présumées de la National Security Agency (NSA), suspectée de s'être livrée à des extractions massives de données personnelles en Europe.

"Il y avait une partie de l'Allemagne où il y avait une police politique qui espionnait la vie des gens tous les jours, donc nous savons ce que signifie le totalitarisme", a dit lors d'une conférence de presse José Manuel Barroso.

"Trop c'est trop", a déclaré sur France 2 le commissaire européen au Marché intérieur Michel Barnier. "Ce qui est ébranlé, c'est la confiance entre Européens et Américains, or nous avons besoin de cette confiance, notamment au moment où nous négocions un grand accord commercial transatlantique."

La chancelière allemande a rencontré François Hollande en marge de la réunion de Bruxelles et devait évoquer avec lui le dossier de la NSA, suspectée en France d'avoir mis sur écoute des agents de l'Etat français, notamment des ambassades.

Après avoir vivement réagi lundi aux révélations du journal Le Monde sur l'espionnage américain -l'ambassadeur des Etats-Unis en France a été convoqué et François Hollande a protesté auprès de Barack Obama-, le président français n'a fait aucune déclaration à son arrivée au Conseil européen.

PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES

On juge néanmoins côté français que les répercussions des révélations de l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden conforteront les positions de la France, qui réclame avec le Parlement européen une date limite pour trouver un accord sur la protection des données personnelles avec les Etats-Unis.

Le président du Conseil européen Herman Van Rompuy a dit jeudi que les conclusions du sommet pourraient évoquer un engagement à parvenir à un accord en 2014 alors que l'heure était plutôt au pessimisme il y a quelques jours.

Des associations de défense des intérêts des entreprises, comme Business Europe, s'opposent en effet à une avancée trop rapide sur ce terrain jugé complexe et craignent l'effet négatif de normes contraignantes sur l'économie numérique.

Cette position est partiellement partagée par des pays comme le Royaume-Uni, mais l'équilibre politique semble se déplacer vers les tenants d'une protection accrue des données et de l'adoption d'une stratégie pour permettre à l'Europe de rattraper son retard dans le numérique.

Le Parlement européen a ainsi renforcé lundi le texte proposé par la Commission pour mieux protéger les données personnelles des Européens, avec de lourdes sanctions en cas de violation.

Signe de la colère ambiante, les députés européens ont aussi demandé mercredi la suspension de l'accord sur la transmission de données financières de l'UE vers les Etats-Unis, dit accord Swift, en réaction au scandale d'espionnage.

En Allemagne, Sigmar Gabriel, le chef de file des sociaux-démocrates, actuellement en négociation pour former une coalition avec les conservateurs, a déclaré qu'il lui serait difficile, si la mise sur écoute du portable d'Angela Merkel était avérée, d'accepter l'accord de libre-échange actuellement envisagé entre l'UE et les Etats-Unis.

Avec Andrea Rinke et Luke Baker