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Grèce

Yanis Varoufakis révèle les coulisses des négociations avec les créanciers

Yanis Varoufakis, ancien ministre des Finances grec.

Yanis Varoufakis, ancien ministre des Finances grec. - Louisa Gouliamaki - AFP

Il aura été la bête noire des créanciers de la Grèce jusqu'à sa démission au lendemain d'un référendum qui l'avait  pourtant conforté dans ses positions. L'atypique ancien ministre des Finances Yanis Varoufakis s'est confié au journal The New Stateman pour une interview-vérité, expliquant notamment comment il avait voulu impressionner la BCE.

L'ancien ministre des Finances grec Yanis Varoufakis a-t-il démissionné par souci d'apaisement parce qu'il gênait les négociations? L'histoire est en réalité, un peu différente. Il révèle, dans un entretien publié lundi, être parti car il avait été mis en minorité, le soir du référendum, sur sa ligne dure prévue face à la BCE après la fermeture des banques grecques. L'économiste au fort tempérament, qui assurait avant le référendum qu'il démissionnerait en cas de victoire du oui, avait assez inexplicablement démissionné au lendemain de la victoire à 61,1% du non, le 5 juillet.

La ligne dure écartée, il démissionne

Officiellement, il avait jeté l'éponge parce que les créanciers ne l'aimaient pas et que le Premier ministre Alexis Tsipras jugeait son départ "utile" pour un accord. Mais dans un entretien au magazine britannique New Statesman, réalisé juste avant l'accord de lundi matin pour négocier une nouvelle aide à l'économie grecque, il révèle avoir en fait perdu à quatre contre deux lors d'une réunion de cabinet après la victoire du non, au cours de laquelle il prônait une ligne dure.

Des IOUs pour impressionner la BCE

Les banques grecques sont fermées depuis le 29 juin, pour éviter une hémorragie de l'épargne, alors que la Banque centrale européenne a cessé d'ajuster le plafond de son aide d'urgence à ces établissements. Yanis Varoufakis, persuadé d'avance que cette situation "voulue par la BCE pour sceller un accord" allait se produire, avait prévu "un triptyque" d'actions pour y répondre: "émettre des IOUs" (phonétiquement "I owe you", "je vous dois", des reconnaissances de dettes en euros); "appliquer une décote sur les obligations grecques" détenues par la BCE depuis 2012, pour réduire d'autant la dette, et "prendre le contrôle de la Banque de Grèce des mains de la BCE". 

Faire pression pour obtenir un meilleur accord

Cela laissait, selon lui, entrevoir une possible sortie de la Grèce de l'euro mais avec la certitude, explique-t-il, qu'il n'y avait de toute façon aucun moyen légal de la pousser dehors. Le tout pour faire peur et obtenir un meilleur accord des créanciers, selon lui. Il a émis cette suggestion plusieurs fois entre le 29 juin et la victoire du non.

"Mais ce soir-là, regrette-t-il, le gouvernement a décidé que la volonté du peuple, ce 'non' retentissant, ne devait pas être le déclencheur de cette approche énergique (...) au contraire cela allait mener à des concessions majeures à l'autre camp".

L'absence d'union ne fait pas la force

À la question de savoir pourquoi la Grèce n'avait pas travaillé de concert avec d'autres pays également fortement endettés (Portugal, Espagne, Irlande), Varoufakis fait l'amer constat qu'ils constituaient au contraire "leurs plus grands ennemis". Selon lui, "négocier un meilleur accord pour la Grèce les aurait anéantis politiquement, ils auraient été obligés d'expliquer à leur propre peuple pourquoi ils n'avaient pas négocié comme nous le faisions".
D. N. avec AFP