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Espagne

L'Espagne durcit sa législation contre le viol en introduisant l'obligation d'un consentement explicite

Une pancarte "Non veut dire non" lors d'une manifestation en Espagne, le 10 mai 2018

Une pancarte "Non veut dire non" lors d'une manifestation en Espagne, le 10 mai 2018 - ANDER GILLENEA / AFP

Surnommé "seul un oui est un oui", ce texte, qui porte officiellement le titre de "loi de garantie intégrale de la liberté sexuelle", a été approuvé définitivement jeudi par les députés.

L'Espagne a durci jeudi sa législation contre les violences sexuelles en introduisant l'obligation d'un consentement explicite, une mesure minoritaire en Europe et une réponse du gouvernement de gauche à un viol collectif qui avait indigné le pays.

Le texte avait été approuvé par la chambre basse du Parlement en première lecture en mai, mais le Sénat avait introduit en juillet une modification qui a rendu nécessaire un nouveau vote des députés.

Réformant le Code pénal, il fait du "consentement" un élément central devant être "manifesté librement par des actes qui (...) expriment de manière claire la volonté de la personne."

"Notre pays inscrit enfin dans sa loi que le consentement doit être l'élément central de nos relations sexuelles. Les femmes n'auront plus à démontrer qu'il y a eu violence ou intimidation lors d'une agression pour que cela soit reconnu comme une agression sexuelle", s'est réjoui la ministre de l'Égalité, Irene Montero, du parti de gauche radicale Podemos, allié minoritaire des socialistes au gouvernement.

Un viol collectif a indigné le pays

Jusqu'ici, la notion de violence ou d'intimidation était nécessaire pour qualifier un viol. Cette question avait été au coeur de l'affaire dite de "la Meute", le viol collectif en 2016 d'une jeune femme de 18 ans lors des fêtes de la San Fermin à Pampelune par cinq hommes qui avaient filmé leurs actes et s'en étaient vantés sur un groupe de messagerie.

Ils avaient été condamnés en 2018 à neuf ans de prison, non pour viol, mais pour "abus sexuel". Défini par l'absence de violence ou d'intimidation, l'abus sexuel est un délit, et non pas un crime, et entraînait donc des peines moins lourdes. Cette situation disparaît avec la nouvelle loi.

À l'époque du procès, la sentence avait fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de femmes à travers l'Espagne, aux cris de "moi je te crois, ma soeur", pour réclamer un durcissement du Code pénal. Face à ces réactions indignées, la Cour suprême espagnole avait finalement requalifié en juin 2019 les faits en "viol en réunion" et durci les peines pour les porter à 15 ans de prison.

Une notion qui reste minoritaire

En Europe, la notion de consentement explicite reste minoritaire. Selon une étude d'Amnesty international datant de fin 2020, 12 pays européens sur les 31 analysés par l'ONG définissaient alors le viol à partir de l'absence de consentement, au-delà de la coercition ou de la vulnérabilité.

Parmi ces pays, l'Allemagne a renforcé sa législation en 2017 pour faire de l'absence de consentement l'unique critère pour définir un viol. En France, une loi visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste a fixé l'an dernier le seuil de consentement à 15 ans, et 18 ans en cas d'inceste.

L'Espagne fait figure de référence dans le domaine de la lutte contre les violences sexuelles depuis une loi pionnière de 2004 ayant notamment introduit la différence de genre comme circonstance aggravante des violences.

A.G avec AFP