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"Ça sonne dans le vide": l'angoisse des réfugiés de Kherson face au silence de leurs proches

Alors que la possibilité d'une reprise de Kherson par Kiev se dessine, les rescapés s'inquiètent de ne plus pouvoir contacter leurs proches restés dans la ville tenue par les forces prorusses.

Réfugié à une centaine de kilomètres de Kherson, Oleksandr est rongé par l'angoisse. Le téléphone de sa mère, restée dans cette ville du sud de l'Ukraine que Kiev espère bientôt reprendre aux soldats russes, ne répond pas.

"La dernière fois qu'elle s'est connectée, c'était le 22 octobre, on est le 25. Ça sonne dans le vide", se désole cet homme, qui était contrôleur de métro en temps de paix. "Notre dernier coup de fil, il était 21 heures. On pouvait entendre des bruits de missiles, ses murs et ses fenêtres tremblaient".

"Les Russes essaient de bloquer les communications!"

Alors que Kiev a lancé à la fin de l'été une contre-offensive - pour l'instant réussie - contre l'armée russe à l'Est du pays, la ville de Kherson fait l'objet de toutes les attentions. Annexée par Moscou lors du début de l'invasion, l'idée de son retour dans les mains de Kiev devient de plus en plus probable. Samedi, les forces prorusses en place dans la ville ont appelé les civils à la quitter "immédiatement" face à l'avancée des forces ukrainiennes.

Mais pour de nombreux civils, à l'image d'Oleksandr, qui ont réussi à trouver refuge du côté ukrainien, la possibilité de voir Kherson retomber dans le giron de Kiev s'accompagne d'une crainte qui monte. Il leur est de plus en plus difficile de contacter leurs proches restés sur place. Et si les forces prorusses encore en place dans la ville avaient décidé de couper les communications, pour continuer d'isoler tant bien que mal Kherson du reste de l'Ukraine?

"Les Russes essaient de bloquer les communications! Ils font ça pour éviter que les Ukrainiens ne transmettent des informations à notre armée", fulmine dans un dortoir pour réfugiés un homme, sans nouvelles de ses enfants et ses petits-enfants restés sur place.

Olena, sa femme, ne peut contenir ses larmes. "Bien sûr qu'on est soulagé d'être du côté ukrainien. Mais on veut revoir nos enfants, c'est difficile. On a très peur pour nos familles, c'est vraiment dur", laisse-t-elle échapper.

La traque des communications vers l'extérieur

Dans Kherson, les forces prorusses traqueraient même ceux qui tentent de communiquer avec l'extérieur.

"Là-bas, j'utilisais une messagerie pour joindre ceux qui étaient partis. C'était vraiment un risque énorme. Si les Russes tombaient dessus, ça finissait mal. Quand ils ont trouvé mes messages envoyés en zone ukrainienne, ils m'ont jeté à terre et m'ont frappé, c'est pour ça que je suis parti", explique Hannah, qui a finalement réussi à quitter la ville.

L'armée ukrainienne, elle, n'a pas communiqué sur le sujet. Depuis un peu plus d'une semaine, Kiev ne distille que peu d'informations concernant sa contre-offensive sur Kherson.

"Le commandement ukrainien veut donner un minimum d'informations. (...) il diminue les sources ouvertes qui pourraient être exploitées par l'adversaire", avait expliqué la semaine dernière le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense de BFMTV.
Clémence Dibout, avec Jules Fresard