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Allemagne: Merkel s'enfonce dans une crise politique sans précédent

Angela Merkel a acté l'échec des négociations lundi matin.

Angela Merkel a acté l'échec des négociations lundi matin. - Odd Andersen - AFP

Après l'échec des négociations pour former un gouvernement, Angela Merkel doit désormais trouver une porte de sortie à une crise politique inédite depuis 1949.

Jamais, depuis la création de la République fédérale allemande en 1949, le pays n'avait connu une telle impasse politique. Dans la nuit de dimanche à lundi, les libéraux du FDP ont quitté la table des négociations, où ils tentaient depuis le 24 septembre d'établir un compromis politique avec la CDU d'Angela Merkel, son alliée la CSU, et les Verts. L'objectif était de former un gouvernement, puis de lui donner une feuille de route. Le visage fermé, Angela Merkel a acté lundi matin l'échec des négociations.

> La responsabilité de Merkel

Maintenant que l'Allemagne est officiellement dans l'impasse, Angela Merkel n'est pas épargnée par les critiques. "Cet échec est aussi le sien, c'est l'échec de son style politique", accuse le quotidien der Tagesspiegel, qui choisit la métaphore maritime: "La capitaine est restée trop longtemps sur le pont. Elle n'a pas fixé de cap. Et les sous-officiers ont pris le contrôle du navire". "Dans son pays, l'admiration a faibli", affirme de son côté le Spiegel.

Pour Barbara Kunz, du Centre français d'études franco-allemandes, cette impasse est l'aboutissement d'un premier échec: celui des élections du 24 septembre dernier, qui ont vu la CDU de Merkel atteindre son score le plus faible depuis 1949. "Elle a ensuite manqué de leadership pendant les négociations, même si c'était très difficile dès le départ", explique la chercheuse.

Angela Merkel faisait aussi l'objet de critiques au sein du parti depuis quelques mois. "Ceux qui n'étaient pas contents de sa ligne centriste se sont tus tant que ça marchait", affirme Barbara Kunz. "Mais désormais, c'est terminé". A force d'étouffer toute rivalité, la chancelière se trouve isolée au sein de son parti. Et risque de se voir peu à peu poussée vers la sortie.

> Un départ inévitable?

Le 18 novembre dernier, alors que les discussions menaçaient déjà de se solder par un fiasco, un sondage commandé par le quotidien conservateur die Welt indiquait que selon 61,4% des Allemands, Angela Merkel devrait quitter son poste en cas d'échec des négociations. Serait-ce la fin politique de "Mutti" (maman), comme la surnomment les Allemands?

"Ajouter de l'instabilité à l'instabilité? Je n'y crois pas", répond à BFMTV.com Hans Stark, de l'institut français des relations internationales (Ifri). "Ce mandat sera son dernier, mais je ne vois pas en quoi son départ améliorerait les choses."

Un départ qui semble d'ailleurs loin d'être évident: pour Barbara Kunz, seule l'organisation de nouvelles élections pourraient aboutir à un hypothétique renoncement de la chancelière. "Ou bien elle ne renonce pas mais son élection par le Parlement échoue, et dans ce cas il peut y avoir dissolution".

> Quelles portes de sortie pour la chancelière?

Pour éviter ce cas de figure, la chancelière dispose de deux options: elle pourrait en premier lieu former un gouvernement minoritaire avec les Verts. Bien que jamais vu en Allemagne, ce scénario est une possibilité. "Dans ce cas, il n'y a pas de raison qu'elle ne dirige pas ce gouvernement, sachant que son parti, bien qu'affaibli, est arrivé en tête", analyse Barbara Kunz. Mais le quotidien risque alors de devenir un casse-tête, car "Merkel devra négocier sur absolument tous les sujets".

La seconde option ne présente pas non plus de grands avantages: il s'agirait de convaincre les sociaux-démocrates du SPD de sortir de l'opposition pour former une nouvelle grande coalition avec le parti d'Angela Merkel, pour la troisième fois. "Mais dans ce cas, le SPD sera en position de force et pourra à chaque désaccord menacer de quitter la coalition. Merkel sera alors clairement affaiblie".

Même si elle parvient à se sortir de ce bourbier, la chancelière se prépare une issue difficile. Une sortie sans gloire, pour un quatrième mandat qui sera peut-être celui de trop.

Ariane Kujawski