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Election présidentielle dans une pologne traumatisée

Dans un bureau de vote de Varsovie. Les Polonais sont appelés à choisir ce dimanche un successeur au président Lech Kaczynski, qui a trouvé la mort le 10 avril dans un accident d'avion près de Smolensk, en Russie. /Photo prise le 20 juin 2010/REUTERS/Pawe

Dans un bureau de vote de Varsovie. Les Polonais sont appelés à choisir ce dimanche un successeur au président Lech Kaczynski, qui a trouvé la mort le 10 avril dans un accident d'avion près de Smolensk, en Russie. /Photo prise le 20 juin 2010/REUTERS/Pawe - -

par Gareth Jones VARSOVIE (Reuters) - Les Polonais sont appelés à choisir ce dimanche un successeur au président Lech Kaczynski, qui a trouvé la mort...

par Gareth Jones

VARSOVIE (Reuters) - Les Polonais sont appelés à choisir ce dimanche un successeur au président Lech Kaczynski, qui a trouvé la mort le 10 avril dans un accident d'avion près de Smolensk, en Russie.

Les deux favoris, Bronislaw Komorowski, président du parlement qui assure l'intérim du chef de l'Etat, et Jaroslaw Kaczynski, frère jumeau du défunt président, sont tous deux issus du combat mené par le syndicat Solidarité jusqu'à la chute du régime communiste, en 1989.

Mais ces deux catholiques conservateurs diffèrent par leur style et par leurs opinions sur la place de la Pologne dans l'Europe, l'adhésion ou non à l'euro et les réformes à mener.

Tous les sondages donnent Komorowski, candidat de la Plate-forme civique (PO, droite libérale, majoritaire), vainqueur de l'élection.

Mais Jaroslaw Kaczynski, de Droit et Justice (PiS, droite conservatrice), a refait une partie de son retard en menant notamment campagne sur le thème de la solidarité après la tragédie provoquée par la mort de son frère et les inondations catastrophiques de ces dernières semaines.

Il semble aujourd'hui improbable que Bronislaw Komorowski puisse envisager une élection dès le premier tour (il lui faudrait pour cela obtenir plus de 50% des suffrages exprimés). Un second tour le 4 juillet est l'hypothèse la plus probable.

Huit autres candidats sont en lice mais la campagne en forme de duel les a privés de toute ambition. Komorowski recueillerait selon les derniers sondages 38% à 48% des intentions de vote au premier tour contre 29% à 36% pour Kaczynski.

"Le vent souffle assurément dans le sens de Kaczynski, en partie parce qu'il se bat pour préserver l'héritage de son frère, en partie aussi parce qu'il se bat vraiment pour sauver son projet politique", note Pawel Swieboda, qui dirige le centre de réflexion DemosEuropa.

"Droit et Justice et lui-même ont une vision nationaliste et pré-moderne du conservatisme, et puisque la Pologne est engagée dans une modernisation et un changement très rapides, l'heure tourne pour ce genre de parti, cette élection pourrait donc être la dernière chance du PiS pour conduire le pays dans la direction qu'il souhaite", ajoute-t-il.

L'ENTREPRISE DE CHARME DE KACZYNSKI

La Constitution polonaise accorde l'essentiel des pouvoirs politiques au gouvernement, que dirige Donald Tusk (PO). Mais le président peut opposer son veto à des lois, procède à nombre de nominations dont le gouverneur de la Banque centrale et influence la politique étrangère et de sécurité.

Lech Kaczynski, élu en 2005, avait ainsi bloqué certaines réformes d'inspiration libérale voulues par le gouvernement Tusk, comme les retraites, la santé ou les médias.

Le Premier ministre redoute que son frère, en cas d'élection, ne perpétue cette tradition du veto et transforme la présidence en quartier général du PiS en vue des législatives de l'année prochaine.

"Un succès de Jaroslaw Kaczynski, ce serait un enfer politique", a-t-il récemment déclaré, accusant les partisans du candidat conservateur de mener une campagne de dénigrement visant "à prouver que Tusk collabore non seulement pour la Wehrmacht mais aussi pour l'Armée rouge et que Komorowski est le laquais des grandes puissances menées par la Russie".

Au début de la campagne électorale, les choses étaient relativement claires: à Kaczynski les voix de l'électorat âgé, rural et catholique, à Komorowski l'électorat urbain et plus jeune.

Mais Kaczynski a surpris les observateurs en faisant activement campagne auprès des électeurs centristes. Il a su projeter une image conciliante et éviter les remarques caustiques qui avaient caractérisé son passage à la tête du gouvernement, en 2006-2007.

"Jaroslaw joue la carte du vieux grand-père affable qui veut se servir de cette tragédie nationale pour surmonter les vieilles animosités et unir la nation", explique Preston Keat, d'Eurasia Group, société de consultants en risque politique.

Jaroslaw Kaczynski, qui fêtera ses 61 ans ce vendredi, a aussi bénéficié d'un regain de sympathie envers sa famille parmi les Polonais, frappés par la mort soudaine de son frère jumeau dont il avait toujours été proche.

Les deux candidats ont consacré nombre de leurs déplacements de campagne aux victimes des inondations du printemps, qui ont fait vingt morts et des dizaines de milliers de sans-abri.

Les bureaux de vote seront ouverts entre 06h00 et 20h00 (04h00 GMT et 18h00 GMT). Les résultats de sondages sortie des urnes seront connus aussitôt après.

En 2005, la participation au premier tour avait été relativement basse, à 49,75% des inscrits.

Henri-Pierre André pour le service français, édité par Gilles Trequesser