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Dilma Rousseff réélue de justesse à la tête du Brésil

Dilma Rousseff réélue présidente du Brésil

Dilma Rousseff réélue présidente du Brésil - Evaristo Sa - AFP

Elle a subi la torture dans les geôles durant la dictature, elle aime la moto et Game of Thrones. Quatre ans après être devenue la première Brésilienne à diriger le plus grand pays d'Amérique latine, Dilma Rousseff a été réélue, ce dimanche, au terme d'une campagne féroce. Portrait.

Bousculée avant le premier tour, et malmenée pendant l'entre-deux, Dilma Rousseff a réussi à remonter la pente pour déjouer tous les pronostics et s'adjuger, ce dimanche, un deuxième mandat à la tête du Brésil avec 51,45% des voix. Mais qui est-elle vraiment?

Jeune guérillera torturée sous la dictature, Dilma Rousseff a confirmé sa réputation de "dame de fer" de gauche en menant une campagne électorale musclée, dont elle sortie réélue.

"La vie exige de nous du courage"

"La vie exige de nous du courage", avait lancé lors de son discours d'investiture, le 1er janvier 2011, la première femme présidente du plus grand pays d'Amérique latine, en prenant la succession de son mentor, l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010).

Candidate du Parti des travailleurs (PT) au pouvoir depuis 12 ans, la bataille qu'elle a livrée avec son adversaire Aecio Neves, 54 ans, du Parti social-démocrate brésilien (PSDB), a été sans pitié.

Une campagne féroce

Devancée dans les sondages après le premier tour du 5 octobre, Dilma Rousseff a pris à la gorge ce rival de centre-droit qui ne lui ressemble en rien, pur produit des élites à la réputation de fêtard mondain.

Visage fermé, regard noir, voix ferme et rauque, pas un sourire. Pendant les débats télévisés, la présidente de gauche s'est attelée à discréditer le bilan de l'ex-gouverneur de l'Etat de Minas. Elle l'a accusé de "népotisme", a suggéré qu'il était "ivre ou drogué" lorsqu'il a refusé de se prêter à un contrôle d'alcoolémie un soir de 2011 à Rio de Janeiro.


Austère et fan de Game of Thrones

Le style austère de Dilma Rousseff tranche avec le caractère jovial de l'ouvrier syndicaliste Lula. La présidente connait ses dossiers par coeur, rabroue ses ministres en public, pique des colères réputées homériques en privé. Elle ne laisse transparaître que rarement son côté intime: superstitieuse, avide lectrice ne s'endormant qu'après avoir tourné quelque pages, fan de la série Game of Thrones, amatrice de virées nocturnes à moto, incognito dans Brasilia.

"On dit toujours des femmes au pouvoir qu'elles sont dures. Mais Dilma a un grand sens de l'humour, elle est drôle, extrêmement solidaire et généreuse", confie son amie Ieda Akselrud de Seixas, 67 ans, qui l'a connue dans les geôles de la dictature.

Torturée dans les geôles de la dictature

Dilma Rousseff aborde rarement cette époque douloureuse. "Dans ma vie j'ai affronté des situations des plus difficiles, des agressions physiques à la limite du supportable. Rien ne m'a détournée de mon cap, de mes engagements ni du chemin que je me suis tracé", dira-t-elle après avoir été conspuée avant le match d'ouverture du Mondial-2014, le 12 juin à Sao Paulo.

Pendant la dictature, elle a milité dans des organisations armées clandestines de gauche, sous les faux nom d'"Estela", "Vanda" et "Luiza". Incarcérée à 22 ans, elle a été torturée, et a passé trois ans en prison.

Dilma Vana Rousseff est née le 14 décembre 1947 à Belo Horizonte (sud-est) dans une famille de la classe moyenne. Son père, Pedro Rousseff, un immigrant bulgare, avocat et sympathisant communiste, et sa mère professeur, Dilma Jane da Silva, l'ont initiée très tôt à la lecture: Balzac, Zola, Dostoievski.

Diplômée en économie

Diplômée en économie, Dilma Rousseff a une fille Paula, et un petit fils de quatre ans. Après 30 ans de mariage, elle a divorcé du père de sa fille, Carlos de Araujo, également emprisonné sous la dictature. Avec lui elle a participé en 1979 à la fondation du Parti travailliste brésilien (PDT, de Leonel Brizola) qu'elle abandonnera en 2000 pour rejoindre les rangs du PT de Lula.

Durant des années, elle occupera des postes au gouvernement de l'Etat de Rio Grande do Sul (sud), à Porto Alegre, berceau de l'alter-mondialisme.

Lula a décrit leur rencontre: "Une camarade est apparue avec son petit ordinateur. On a commencé à discuter et je me suis rendu compte qu'il y avait quelque chose de différent en elle. Alors j'ai pensé: 'je crois avoir trouvé ma ministre de l'Energie'".

Un combat profond contre les inégalités sociales

Un poste-clé qu'elle occupera pendant deux ans. Car en 2005 éclate le "Mensalao", un scandale d'achats de votes de députés alliés qui décapite le PT et l'entourage de Lula. Dilma Rousseff devient alors, jusqu'en 2010, sa chef de cabinet avec rang de ministre. Sa dauphine. Pendant quatre ans, Dilma Rousseff a poursuivi avec succès le combat de Lula contre les profondes inégalités sociales du Brésil.

Mais dans un contexte international changeant, la vigoureuse croissance économique s'est essoufflée dès 2011, l'inflation est sortie des clous. Les recettes interventionnistes de Dilma Rousseff ont échoué.

La présidente s'est aliénée les milieux d'affaires. Mais comme le chômage reste au plus bas et que les salaires continuent d'augmenter, les moins nantis votent "Dilma!".

Jé. M. avec AFP