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Russie: les futurs soldats seront enrôlés par voie électronique

Un soldat russe dans un tank russe à Ioujno-Sakhalinsk, en Russie, le 4 septembre 2022

Un soldat russe dans un tank russe à Ioujno-Sakhalinsk, en Russie, le 4 septembre 2022 - KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP

Les ordres de mobilisation étaient remis jusque-là obligatoirement en main propre aux mobilisés, ce qui permettait à de nombreux Russes d'ignorer ces convocations ou d'avoir le temps de quitter le pays.

Les députés russes ont voté mardi une loi permettant d'envoyer des ordres de mobilisation par voie électronique, une mesure qui rendra plus difficile d'échapper à l'armée et compliquera la vie de ceux qui ont fui à l'étranger.

Les députés de la Douma, la chambre basse du Parlement, ont adopté ce texte en deuxième et troisième lecture, une célérité inhabituelle pour cette loi qui intervient un peu plus d'un an après le début de l'offensive russe en Ukraine.

"Les changements prévoient une numérisation du système de registre militaire", a indiqué la Douma dans un communiqué sur son site.

Interdiction de quitter la Russie une fois l'ordre envoyé

Concrètement, selon les médias russes, les ordres de mobilisation seront envoyés via le système Gosouslougy utilisé par des millions de Russes pour toute une série de démarches administratives.

Une fois l'ordre envoyé, le mobilisable se voit interdire de quitter le pays. En cas d'absence de compte Gosouslougy, l'ordre électronique sera tout de même considéré comme valide au bout de sept jours, selon les médias.

Les ordres de mobilisation étaient remis jusque-là obligatoirement en main propre aux mobilisés, ce qui permettait à de nombreux Russes d'ignorer ces convocations ou d'avoir le temps de déménager, voir de fuir le pays, comme l'ont fait des dizaines de milliers d'hommes lors de la vague de mobilisation de septembre pour combattre en Ukraine.

"Sera considéré comme réfractaire un citoyen mobilisable s'il a refusé de recevoir sa convocation ou s'il n'est pas joignable", a indiqué la Douma dans son communiqué.

La loi russe prévoit de lourdes peines de prison pour les réfractaires à l'armée.

Des dizaines de milliers de soldats russes tués et blessés en Ukraine

Interrogé sur le sujet plus tôt mardi, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov avait assuré qu'"il n'y aura pas de deuxième vague" de mobilisation, après celle "partielle" ordonnée en septembre dernier par Vladimir Poutine.

Dmitri Peskov a jugé ce changement technique "absolument nécessaire" pour "parfaire et moderniser" le système d'enrôlement national. Cette vague a permis la mobilisation de plus de 300.000 hommes parmi les réservistes, des civils donc, mais avait été souvent menée d'une manière chaotique.

Selon Dmitri Peskov, le Kremlin ne s'attend "absolument pas" à ce que ce nouveau projet de loi entraîne une nouvelle vague de départs à l'étranger chez les hommes russes car "ce n'est pas lié à la mobilisation", a-t-il assuré aux journalistes. Si la Russie ne communique presque pas sur ses pertes en Ukraine, des estimations occidentales les chiffrent à près de 150.000 tués et blessés et Kiev a annoncé préparer une contre-offensive dans les prochains mois.

Des sanctions contre les Russes qui sont à l'étranger

Le projet de loi adopté par la Douma prévoit aussi, selon les médias russes, des sanctions qui semblent être dirigées contre les Russes se trouvant à l'étranger.

Ceux qui fuient leur convocation à l'armée se verront ainsi interdits de vendre, de transférer à des proches ou de le louer leur logement. Ils ne pourront pas non plus vendre leur voiture.

Les Russes qui ne se présentent pas au commissariat militaire sous 20 jours après leur mobilisation ne pourront plus travailler en tant qu'entrepreneur ou travailleur indépendant, recevoir des prêts ou enregistrer logement et voiture.

La police aura le droit de rechercher et d'arrêter les récalcitrants et le service des impôts, les universités et les employeurs auront pour devoir de transférer les données personnelles des concernés aux autorités.

Un texte voté rapidement par la chambre basse russe

La rapidité avec laquelle le projet de loi a été examiné mardi par la Douma a en tout cas choqué certains jusque dans les rangs pro-pouvoirs.

"Adopter une loi entière après une interview télévisée et en deux heures de familiarisation (avec le projet de loi), cela ne s'est jamais produit auparavant", s'est étonnée Nina Ostanina, députée du Parti communiste russe.

Les autorités mènent parallèlement une politique de répression tous azimuts des opposants à l'offensive en Ukraine, ayant condamné à de lourdes peines plusieurs Russes accusés d'avoir "discrédité" l'armée ou d'avoir incendié des commissariats militaires.

Mardi, le patron des puissants services de sécurité (FSB), Alexandre Bortnikov, a accusé l'Ukraine et les Occidentaux d'essayer d'inciter les Russes au sabotage et à la rébellion armée.

H.G. avec AFP