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Russie

Présidentielle en Russie: jusqu'à 31,6 millions de voix détournées en faveur de Poutine

Une femme vote à l'élection présidentielle russe dans un bureau de vote à Donetsk, ville ukrainienne sous contrôle russe, le 16 mars 2024.

Une femme vote à l'élection présidentielle russe dans un bureau de vote à Donetsk, ville ukrainienne sous contrôle russe, le 16 mars 2024. - STRINGER / AFP

Plusieurs organismes indépendants russes ont mené des comptages pour tenter d'établir l'ampleur de la fraude électorale lors de l'élection présidentielle remportée sans surprise par Vladimir Poutine. Selon eux, la mascarade de l'élection 2024 battrait des records.

Les jours passent et les modalités de la gigantesque fraude à la présidentielle russe se précisent. Après la réélection avec un score historique de 87,28% des voix de Vladimir Poutine pour un cinquième mandat à la tête d'une Russie qui lui est toujours plus soumise, le journal Le Monde fait un point sur les données électorales et met en évidence les manipulations.

En compilant des estimations et observations de plusieurs médias et organismes indépendants qui ont travaillé sur les données électorales, le quotidien fait état de ce qui pourrait être "la plus importante fraude de l’histoire des élections en Russie", selon les mots de l’organisation d’observation électorale Golos, bannie du pays avant l'élection.

Entre 22 millions et 31,6 millions de voix volées

Pour établir la part des votes détournés en faveur de Vladimir Poutine, les organismes ont comptabilisé tous les bureaux de vote dans lesquels la participation a été particulièrement forte et inexpliquée, tout en profitant largement au président russe. Ce type de calcul est surnommé "méthode Chpilkine", en référence au statisticien qui l'a mis au point.

Selon Golos, le nombre de voix volées en faveur de Vladimir Poutine pourrait ainsi avoir atteint 22 millions, sur un total de 76 millions de suffrages exprimés. Le média Novaïa Gazeta Europe arrive quant lui à un résultat de 31,6 millions. Des différences qui sont dues, selon Le Monde, à des choix différents de bureaux de vote jugés "honnêtes", car notamment ouverts aux observateurs, alors qu'ils ne le seraient pas forcément.

99% des votes pour Poutine, 100% des participations...

En dehors de ces comptages à l'échelle globale, d'autres indices permettent de conclure à des fraudes dans de nombreux bureaux. À Moscou, les résultats dans le quartier Danilovski, où vit une population aisée et éduquée, ont été marqués par de forts contrastes.

"Dans les bureaux de vote où des observateurs indépendants avaient réussi à se faire enregistrer, le score de Vladimir Poutine tourne autour de 60%. Dans quatre bureaux où ils étaient absents, il atteint… 99%", relate le correspondant du quotidien du soir à Moscou.

Il est aussi question de bureaux avec 100% de participation et dont l'intégralité des votes ont été exprimés en faveur de Vladimir Poutine, ou de la région Tchétchénie, où le président sortant a obtenu 98,99% des suffrages.

Dans certains bureaux, la manipulation a été orchestrée grâce à de très classiques bourrages d'urnes. Dans d'autres, malgré des scores possiblement trafiqués et donnant Vladimir Poutine en tête au premier tour, le score a tout simplement été modifié entre le dépouillement et la publication des résultats: ce mode opératoire a fait par exemple passer le vote pour Vladimir Poutine de 57 à 86% dans un bureau de Moscou.

De même pour la participation: dans un bureau de Saint-Pétersbourg, le candidat est passé de 77,1 à 98,3% grâce à une participation qui a évolué artificiellement de 64,5 à 95,3%.

Plus généralement, Le Monde note que les bureaux de vote où le scrutin se déroulait normalement étaient encore majoritaire en 2018, lors de la dernière élection présidentielle, les fraudes étant cantonnées aux régions isolées et/ou périphériques. Mais lors de l'élection 2024, ces bureaux "honnêtes" seraient devenus une minorité, selon le média indépendant Meduza.

Glenn Gillet