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La génération GTA manifeste à Istanbul

Dans la rue, cela donne des slogans tels que: “Vous cherchez une jeunesse qui a grandi en combattant la police dans GTA.”

Dans la rue, cela donne des slogans tels que: “Vous cherchez une jeunesse qui a grandi en combattant la police dans GTA.” - -

Fait inédit, de nombreuses références à un jeu vidéo apparaissent dans les slogans des manifestations qui ont agité la Turquie ces derniers jours. GTA semble être devenu, pour une partie de la jeunesse, un symbole de protestation envers le pouvoir, et plus particulièrement les forces de l'ordre.

Mais quel est ce code bizarre, fait de trois lettres, qui apparaît périodiquement sur les bannières des manifestants et les murs d’Istanbul depuis le début de la révolte, place Taksim? “GTA”, sont-ce les initiales d’un chef de guerre historique, qui inspire l’engagement des protestataires? Une insulte typiquement turque adressée au Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan?

Non, ces trois lettres parlent, en fait, plutôt aux amateurs de jeux vidéo: “Grand Theft Auto”.

GTA, c’est cette série à succès qui a fait scandale à peine le premier opus sorti, en 1997. Le joueur y incarne une petite frappe, qui, au gré des différentes missions qu’on lui confie, monte en grade dans la pègre locale. Le fait de gagner des points lorsque l’on tue un policier avait particulièrement choqué l'opinion, à l’époque.

GTA, un mème local

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Mais plus qu’une success story (125 millions de copies ont été vendues), GTA semble devenir une référence protestataire. Cette génération de jeunes gens souvent apolitiques, plutôt de classe moyenne, a trouvé un point commun dans sa culture populaire à elle: les jeux vidéo.

Dans la rue, cela donne des slogans tels que: “Vous cherchez une jeunesse qui a grandi en combattant la police dans GTA.” Sur Twitter, une recherche des termes “GTA” et “Polis” donne un aperçu de la popularité de ce symbole.

Devenu un mème local, la révolte GTA se diffuse via des montages, sur les réseaux sociaux. Comme cette image d’un canon à eau de la police vu du dessus, surmontée de l’affichage graphique du jeu.

GTA: Gezi Parkı(Taksim, Beşiktaş, Ankara... Kısacası Tüm Türkiye). twitter.com/TugberkEvraNBA...
— Tugberk Evran (@TugberkEvraNBA) June 6, 2013

Alors que d’autres générations ont pu chanter des hymnes politiques, des chants contestataires venant de leurs aïeux, le symbole défiance envers le pouvoir qui leur parle à tous, c’est GTA.

Le jeu vidéo parle beaucoup plus aux jeunes que livres, journaux et télévision réunis. D’autant plus que le troisième opus a eu un succès historique dans ce pays, et qu’une version modifiée turque, “Kurtlar Vadisi Vice City”, était très populaire dans les cybercafés.

Le jeu vidéo, un langage commun

La violence montant entre les manifestants et la police, elle pouvait, de plus, rappeler sans peine les exploits de “Niko Bellic” (le personnage du jeu). Mais ce n’est pas parce que la violence est utilisée, dans le jeu, pour faire de mauvaises choses, que la référence est négative.

Un manifestant témoigne, interrogé par Kotaku.com: “Si la génération Y turque se bat en utilisant des symboles de jeux vidéo, c’est parce que c’est le langage en lequel nous croyons.” C’est l’esprit de la défiance qui se répand, plus que le goût pour le trafic de drogue, le vol de voiture et le grand banditisme.

Le cinquième volet du jeu, justement, est attendu comme un événement par les fans du monde entier. Il sortira en septembre prochain.


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Olivier Laffargue