BFMTV
Japon

Cinq ans après Fukushima, le monde est toujours partagé sur le nucléaire

Si les pays producteurs de nucléaire civil ont su tirer les conséquences de la catastrophe de Fukushima, très peu d'entre eux ont décidé d'abandonner ce type de production énergétique.

C'était il y a cinq ans, jour pour jour. À la suite d'un tremblement de terre, un tsunami, une vague de 15 mètres de haut, frappait les côtes japonaises. Sur le littoral de la préfecture de Fukushima, la centrale nucléaire du même nom était gravement abîmée, entraînant l'explosion de son réacteur numéro 1.

Cinq ans plus tard, 100.000 habitants de la région n'ont toujours pas pu rejoindre leurs foyers. Dans la "zone rouge" autour de la centrale, la plus contaminée, les niveaux de radiation sont parfois jusqu'à 50 fois supérieurs à la normale.

Trois réacteurs relancés au Japon

À la suite de la catastrophe, le Japon avait décidé l'arrêt de tous ses réacteurs. Mais 24 mois plus tard, l'activité nucléaire a été relancée, malgré les réticences d'une bonne partie de la population. Les raisons invoquées par le gouvernement étaient à la fois économiques et environnementales. Après l'arrêt de la production nucléaire, des centrales thermiques fonctionnant aux hydrocarbures avaient en effet été relancées, avec un surcoût financier et de production de CO2.

À ce jour, trois réacteurs ont été relancés sur les cinquante-quatre en fonctionnement sur l'île avant la catastrophe de Fukushima. Les autorités nippones souhaitent revenir à une part de 20% de nucléaire dans la production d'énergie, d'ici à 2030.

La France mise sur la sécurité

Le reste du monde est également partagé sur la question de l'énergie nucléaire. À ce jour, seule l'Allemagne a décidé de stopper complètement son programme nucléaire, visant un désengagement total à l'horizon 2022. Un objectif complètement à l'opposé de celui de la Grande-Bretagne qui a pour sa part décidé d'augmenter sa capacité de production nucléaire. Deux réacteurs EPR y sont en projet, portés notamment par EDF.

En France, l'attention s'est surtout focalisée sur la sécurisation des sites.

"L'avantage du nucléaire c'est que dès qu'il y a le moindre incident, même s'il est mineur, c'est enregistré et on en tient compte", explique Christian Ngô, spécialiste du nucléaire, à BFMTV. "C'est pour ça qu'en France maintenant on a des réglementations un peu plus dures qui s'appliquent aux réacteurs nucléaires, qui entraînent d'ailleurs des frais supplémentaires."

Des "frais supplémentaires" qui s'élèvent, selon la Cour des comptes, à 55 milliards d'euros entre 2014 et 2025. Parmi les mesures de sécurité mises en place, la création de forces d'intervention rapide avec tous les services spécialisés. Un investissement nécessaire, d'après le consultant environnement de BFMTV.

"Fukushima montre qu'il faudrait désormais anticiper l'inimaginable", explique Jean-Louis Caffier. "Fukushima était prévu pour une vague de 7 à 8 mètres, avec un mur de 10 mètres de haut. La vague a atteint les 15 mètres et a tout noyé".

Si François Hollande a promis une réduction de la production nucléaire de moitié d'ici à dix ans, l'arrêt complet de la production nucléaire n'est en revanche pas à l'ordre du jour, la ministre de l'Environnement envisageant même d'allonger la durée de vie des centrales.

Une cinquantaine de réacteurs en construction dans le monde

La tendance est la même dans le reste du monde: très peu de pays limitent aujourd'hui leur développement nucléaire. Les Etats-Unis, historiquement, ont toujours très peu compté sur ce type d'énergie, et ne souhaitent pas changer les choses dans un futur proche.

"Il y a quand même une cinquantaine de réacteurs en construction actuellement dans le monde, dont la moitié en Chine", explique Jean-Louis Caffier. L’Inde, la Russie, la Corée du Sud et l’Arabie Saoudite espèrent ainsi construire de nouveaux réacteurs dans les années à venir.

L'exemple de Fukushima, qui représentait une situation bien particulière, n'aura donc pas effrayé totalement la communauté internationale. Mais la question du nucléaire n'a pas fini d'être débattue. "Faut-il revoir partout les normes de sécurité pour essayer d'anticiper ce qu'on ne peut pas envisager, c'est tout le défi des années qui viennent", résume Jean-Louis Caffier.
H. M. avec Frédéric de Lanouvelle et Clément Mathis