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Chine

4 enfants, livrés à eux-mêmes, se suicident en Chine

Un village dans la province de Guizhou, une des provinces les plus pauvres de la Chine.

Un village dans la province de Guizhou, une des provinces les plus pauvres de la Chine. - Mark Ralston - AFP

Une fratrie, habitant dans l'une des régions les plus pauvres de la Chine, s'est donnée la mort après avoir été abandonnée par leurs parents partis travailler à la ville.

Le drame a ému la Chine entière. Quatre enfants, issus de la même fratrie, ont été découverts inanimés à leur domicile situé près de la ville de Bijie, dans la province du Guizhou, l'une des régions les plus pauvres du pays, relaie Le Monde. Ces frère et soeurs, âgés de 5 à 13 ans, étaient, ce qu'on appelle communément en Chine des "enfants laissés à l'arrière" (liushou ertong en chinois), autrement dit des enfants laissés à la campagne par leurs parents partis dans les grandes villes travailler.

"Mourir était mon rêve"

C'est l'aîné qui a pris la décision mardi 9 juin de mettre fin à ses jours ainsi qu'à ceux de ses petites soeurs. Il les a d'abord empoisonnées avec du pesticide avant de lui-même en absorber. Une lettre troublante laissée par l'adolescent a été retrouvée: "Merci d’avoir été bon avec moi. Cela fait longtemps que je voulais le faire, et aujourd’hui, c’est le jour. J’ai juré que je ne vivrais pas au-delà de 15 ans et mourir était mon rêve", était-il écrit.

Cette tragédie met en lumière un phénomène répandu en Chine rurale: 61 millions d'enfants sont des liushou ertong, selon les estimations de la Fédération des femmes de Chine en 2013. Des enfants abandonnés par leurs parents, dont la plupart sont sous la garde des grands-parents ou d'autres membres de la famille. Les difficiles conditions de vie "à la ville" n'encouragent pas les familles à emmener leur progéniture.

"Il n’y a, en Chine, aucune aide de l’Etat pour le regroupement des familles: les travailleurs migrants sont considérés comme une force de travail, on nie leur dimension humaine. Malgré les annonces récurrentes de réformes du hukou (permis de résidence, ndlr), leur citoyenneté n’est toujours pas pleinement reconnue", explique la sinologue Chloé Froissart, interrogée par Le Monde.

Seuls depuis 2011

D'ailleurs, la mère des quatre enfants est arrivée trois jours après sur les lieux. Elle a déclaré avoir quitté le foyer depuis un an en raison de la brutalité de son mari. Celui-ci était reparti en mars travailler dans la province du Guangdong, laissant seuls ses enfants, qui n’avaient plus de grands-parents, précise le quotidien. Selon un communiqué du gouvernement, la fratrie vivait plus ou moins seuls depuis 2011. Celui-ci a également indiqué que la famille recevait pourtant une allocation trimestrielle de 1 062 yuans (150 euros) depuis 2012.

Signe cependant que les choses avancent, une enquête a été ouverte par le Premier ministre après le suicide des enfants. Plusieurs "têtes" sont ainsi tombées, comme le directeur du bureau d’éducation du district de Qixingguan mais aussi le secrétaire du Parti communiste chinois du village où vivaient les enfants, et un principal d’école. En 2012, 60 millions de yuans ont été débloqués par la ville de Bijie en faveur des "enfants de l’arrière", rappelle un journaliste du Nouveau quotidien de Pékin, mais certains se demandent toujours "ce qu’est devenu ce fonds", ajoute-il.

M.G.