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États-Unis

L’État de Washington légalise le "compost humain", un enterrement alternatif et écologique

Cimetière (illustration)

Cimetière (illustration) - DAMIEN MEYER / AFP

La loi autorisant la "réduction organique naturelle" a été promulguée le 21 mai et devrait entrer en vigueur en mai 2020.

Les habitants de l'Etat de Washington ont désormais un autre choix que l'enterrement classique ou la crémation: une loi va en effet permettre aux défunts d'être transformés en "compost humain", et ainsi retourner littéralement à la terre.

La loi autorisant la "réduction organique naturelle" - officiellement définie comme la "conversion, accélérée et en milieu clos, de restes humains en humus" - a été adoptée fin avril par le parlement local, une première aux Etats-Unis. Elle a été promulguée mardi 21 mai par Jay Inslee, gouverneur démocrate de cet Etat très progressiste, et doit entrer en vigueur en mai 2020.

"La recomposition offre une alternative à l'embaumement et à l'inhumation ou à la crémation, elle est naturelle, sûre, durable et permet des économies importantes en matière d'émissions de CO2 et d'utilisation des terres", plaide Katrina Spade, qui a promu la loi auprès des élus locaux.

La jeune femme s'est prise de passion pour ces solutions alternatives à l'inhumation il y a plus de dix ans et elle a créé à Seattle la société Recompose, qui a mis au point un processus de compostage humain qu'elle s'apprête à commercialiser.

"Tout est recomposé, y compris les dents et les os"

Selon les détails communiqués par l'entreprise, il s'agit tout simplement d'accélérer le processus naturel de décomposition du corps en le plaçant avec de la paille, des copeaux de bois et de la luzerne dans un conteneur, où sont créées les conditions idéales d'humidité et d'oxygénation pour que les bactéries fassent leur travail.

"Tout est recomposé, y compris les dents et les os", écrit Recompose, précisant "mélanger" le conteneur à plusieurs étapes pour récupérer d'éventuels plombages dentaires, stimulateurs cardiaques et autres prothèses qui ne seraient pas biodégradables.

Au bout de trente jours environ, "le matériau que nous rendons aux familles est très semblable au terreau que vous pourriez acheter dans votre pépinière", assure la startup.

La méthode produit environ un mètre cube d'humus, soit l'équivalent de deux brouettes, que les familles pourraient répandre dans leur jardin, voire utiliser pour faire pousser un arbre à la mémoire du défunt.

Un procédé testé scientifiquement

Le procédé mis au point par Recompose est semblable à celui déjà en usage depuis des décennies dans l'agriculture pour transformer les carcasses d'animaux. Il a été testé scientifiquement en 2018 avec l'université de l'Etat de Washington à l'aide de six corps légués par des volontaires.

"Nous avons trouvé que les méthodes utilisées pour le compostage du bétail étaient aussi efficaces sur les humains", affirme ainsi le docteur Lynne Carpenter-Boggs, spécialiste des sciences du sol, qui explique juste "avoir modifié les matériaux utilisés pour les rendre acceptables socialement".

Selon les statistiques citées par Recompose, plus d'un Américain sur deux en moyenne choisit de se faire incinérer et l'Etat de Washington est dans le peloton de tête avec 76% de crémations.

L'Eglise catholique dénonce une méthode irrespectueuse

Pour Katrina Spade, cette nouvelle option est aussi riche de spiritualité: "L'idée de retourner à la nature de manière aussi directe et d'être placé de nouveau dans le cycle de la vie et de la mort, est en fait assez belle".

La conférence épiscopale de l'Etat de Washington n'est pas de cet avis et a officiellement pris position contre cette loi dans une lettre transmise au parlement local: "L'Eglise catholique croit que traiter des restes humains de cette manière ne fait pas suffisamment preuve de respect pour le corps du défunt".

Et les entreprises de pompes funèbres n'apprécient guère cette concurrence. Recompose prévoit de facturer 5.500 dollars pour une "réduction organique", davantage que le prix moyen d'une crémation mais moins qu'un enterrement avec cercueil.

Mélanie Rostagnat avec AFP