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"Pas suffisant": au Canada, des autochtones attendent davantage du pape

Le Pape François, le 24 juillet 2022 au Canada

Le Pape François, le 24 juillet 2022 au Canada - Cole Burston / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

La douleur des survivants des "pensionnats pour indiens" est au coeur du voyage du pape au Canada cette semaine, mais nombreux estiment que ses excuses ne suffisent pas.

Plusieurs fois cette semaine, le pape François a demandé "pardon pour le mal commis" contre les autochtones au Canada, notamment dans les pensionnats pour enfants amérindiens gérés par l'Eglise, et a déploré que certains de ses membres aient "coopéré" à des politiques de "destruction culturelle".

"Pour moi, ce n'était pas suffisant", affirme Abigail Brooks, 23 ans, membre de la Première nation Saint Mary's, de la province voisine du Nouveau-Brunswick, dans l'est du pays, peu avant l'arrivée du souverain pontife au sanctuaire Saint-Anne-de-Beaupré, sur les rives du fleuve Saint-Laurent ce jeudi.

Si elle "accepte" ses excuses, elle regrette qu'il n'ait pas "nommé les abus sexuels qui étaient omniprésents dans les pensionnats" gérés en majorité par l'Eglise catholique, où quelque 150.000 enfants ont été placés de force entre la fin du XIXe siècle et les années 1990.

"Chaque enfant compte"

Elle souhaiterait aussi "avoir accès aux archives" et qu'il rende les objets d'art autochtones conservés au Vatican. "Ils en ont tellement depuis si longtemps, ça fait partie de la réconciliation de récupérer ce qui nous appartient", dit-elle, vêtue d'une robe traditionnelle considérée comme ayant des vertus guérissantes selon les rites autochtones.

Dans la foule, ils sont encore nombreux à porter un T-shirt, sweat ou foulard orange avec la mention "Every child Matters" ("chaque enfant compte"), en souvenir des jeunes qui ne sont jamais revenus des pensionnats, victimes de maladie, de malnutrition ou de maltraitance.

Le pape confronté à la contestation

Parmi les fidèles, la plupart assez âgés, réunis sous le soleil en présence de nombreux policiers, certains tiennent entre leurs mains une photo d'un proche disparu. "Il est important que le pape se souvienne des survivants quand il va rentrer à Rome", estime Ghislain Picard, chef des communautés autochtones du Québec et du Labrador.

"La religion a toujours eu un poids considérable, même au niveau politique, donc on demande aussi la révocation de la bulle papale", une autre étape importante de la réconciliation.

Un point de crispation pour de nombreux autochtones. Pendant la cérémonie jeudi, une banderole, sur laquelle on pouvait lire "Révoquez la doctrine", a été brièvement déployée pour réclamer ce changement, en référence aux édits papaux du XVe siècle qui autorisaient les puissances européennes à coloniser les terres et les peuples non chrétiens.

Le pape François n'a encore fait aucune déclaration à propos de cette doctrine, ni de la possibilité de rendre des artefacts. Et malgré les demandes répétées de nombreux survivants, le chef spirituel des 1,3 milliard de catholiques n'a pas demandé pardon au nom de l'Église, mais pour le mal commis par "certains chrétiens

A.G avec AFP