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Élections en Bolivie: le président Evo Morales compare la grève générale à un "coup d'État"

Le président et candidat à sa ré-élection Evo Morales s'adresse à la presse à la Grande Maison du Peuple, le 23 octobre 2019

Le président et candidat à sa ré-élection Evo Morales s'adresse à la presse à la Grande Maison du Peuple, le 23 octobre 2019 - Aizar Raldes / AFP

Une grève générale et des violences ont éclaté ces derniers jours en Bolivie pour réclamer la tenue d'un second tour de la présidentielle, a près la suspicion d'une fraude électorale massive. Le président sortant Evo Morales dénonce un "coup d'Etat".

Une grève générale a commencé ce mercredi en Bolivie pour réclamer un second tour, après deux journées de protestation contre le dépouillement des bulletins de vote de la présidentielle de dimanche qui donne quasiment la victoire au président sortant, le socialiste Evo Morales. Dans sa première déclaration publique, il affirme que ce mouvement est un "coup d'État".

"Un processus de coup d'Etat est en cours (...) la droite s'est préparée, avec le soutien international, à un coup d'Etat", a déclaré devant la presse le dirigeant socialiste, qui s'est dit "presque totalement sûr"' de gagner dès le premier tour l'élection présidentielle.

"Comment se manifeste le coup d'État ? En ne laissant pas le dépouillement des bulletins de vote se faire, en incendiant des structures de l'Etat, comme les tribunaux électoraux départementaux, en menaçant les locaux de campagne (du parti au pouvoir)", a-t-il martelé. 

De nouveaux affrontements avec les forces de l'ordre ont eu lieu dans la soirée à La Paz et ailleurs en Bolivie et le feu a été mis au tribunal électoral départemental à Santa Cruz (est), la locomotive économique du pays et le bastion de l'opposition au gouvernement. Trois autres instances locales chargées de superviser les scrutins ont été incendiées depuis dimanche.

À La Paz, les pro-Morales face à la grève nationale

En réponse à la grève générale, un groupe de syndicats d'ouvriers et de paysans proches du pouvoir, la Conalcam, a enjoint à ses militants de défendre les résultats officiels et appelé à un rassemblement mercredi à La Paz qui devrait être une démonstration de force en soutien à Evo Morales, le premier chef de l'Etat indigène.

"Je veux appeler le peuple bolivien à se mobiliser de manière pacifique et dans le cadre de la Constitution, pour défendre la démocratie", a encore dit Evo Morales, qui a décrété "un état d'urgence". Une partie des Boliviens n'a pas digéré la décision du président de briguer un quatrième mandat, alors que les électeurs s'étaient prononcés contre à l'occasion d'un référendum en 2016. Ils estiment que le régime pourrait virer à l'autocratie en cas de nouvelle élection de celui-ci. 

Le coup d'envoi de la grève nationale a été donné mardi soir dans l'est de la Bolivie par Luis Fernando Camacho, le président de l'influent Comité Pro-Santa Cruz, une organisation de la société civile conservatrice qui regroupe représentants des quartiers, des commerces, des transports et des chefs d'entreprise. Il a donné jusqu'à mercredi midi aux autorités électorales pour confirmer qu'il y aurait un second tour. 

Le changement radical des résultats suscite le malaise

Le lent comptage officiel des votes se poursuivait mercredi. Pour éviter un second tour, le candidat en tête doit obtenir la majorité absolue ou au moins 40% des suffrages et 10 points de pourcentage d'écart sur le deuxième. Or, selon les derniers résultats officiels du dépouillement, Evo Morales était crédité à 9h de 46,03% des voix contre 37,35% pour son principal rival, le centriste Carlos Mesa, soit une avance proche des 10 points de pourcentage nécessaires.

Après de premiers chiffres partiels, dimanche soir, laissant entrevoir un second tour inédit, de nouveaux résultats diffusés lundi par l'autorité électorale avaient pratiquement donné la victoire au chef de l'Etat sortant, suscitant de la part de l'opposition et des observateurs internationaux des soupçons de fraudes. Signe du malaise entourant le dépouillement, le vice-président du Tribunal suprême électoral bolivien (TSE), Antonio Costas, a claqué la porte de cette institution, critiquant le système de comptage.

Dès lundi, les observateurs de l'Organisation des Etats américains (OEA) ont fait part de leur "profonde inquiétude et surprise face au changement radical et difficile à justifier concernant la tendance des résultats préliminaires". Une réunion sur la Bolivie est prévue pour ce mercredi à Washington, au siège de l'OEA, qui accepté de procéder à un audit du processus de dépouillement à la demande du gouvernement.

J. G. avec AFP