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Brésil: coup d'envoi du procès en destitution de Dilma Rousseff

La présidente du Brésil Dilma Roussef, lors du sommet du Mercosur en Argentine, le 17 décembre 2014.

La présidente du Brésil Dilma Roussef, lors du sommet du Mercosur en Argentine, le 17 décembre 2014. - Juan Mabromata - AFP

Le Sénat brésilien a ouvert jeudi le procès final en destitution de la présidente de gauche. Sauf énorme surprise, c'est son ancien vice-président Michel Temer qui devrait diriger le pays jusqu'aux prochaines élections présidentielle et législatives.

Les sénateurs brésiliens ont lancé jeudi le procès en destitution historique de la présidente Dilma Rousseff, dont la très probable éviction tournerait la page de 13 ans de pouvoir de gauche à la tête de la première économie d'Amérique latine.

Les 81 parlementaires jugeront probablement mardi ou mercredi si l'ex-guérillera de 68 ans, actuellement suspendue, s'est rendue coupable de maquillages des comptes publics et d'avoir signé des décrets engageant des dépenses imprévues sans l'accord préalable du Parlement.

Nette tendance en faveur de la destitution

Une nette tendance se dégage en faveur de la destitution - par un vote requis des deux tiers - de Dilma Rousseff, première femme élue à la tête du Brésil, qui fut emprisonnée et torturée sous la dictature militaire.

"Ma prévision est que 59 à 61 sénateurs se prononceront pour la destitution" alors que 54 sont requis, a déclaré à l'AFP le sénateur d'opposition Raimundo Lira.

Si les pronostics se confirment, c'est Michel Temer, 75 ans, son ancien vice-président de centre droit devenu rival, qui dirigera le Brésil jusqu'aux prochaines élections présidentielle et législatives fin 2018. Tout aussi impopulaire que Dilma Rousseff, il assure la présidence par intérim depuis qu'elle a été suspendue de ses fonctions le 12 mai par plus des deux tiers des sénateurs.

Rousseff se dit victime d'un "coup d'Etat" institutionnel

Le président du Tribunal suprême fédéral (STF) Ricardo Lewandowski, qui dirige les débats conformément à la Constitution, a ouvert le procès de Dilma Rousseff dans la matinée en appelant les sénateurs, transformés en "juges" pour l'occasion, à "laisser de côté leurs positions idéologiques et partisanes". 

Dilma Rousseff, qui se défendra personnellement lundi devant le Sénat, clame son innocence, se disant victime d'un "coup d'Etat" institutionnel.

Elle a commis "la plus importante fraude fiscale de l'histoire du pays", a affirmé le sénateur Cassio Cunha Lima, du parti PSDB-PB (droite).
"Je vais voter pour la destitution, c'est l'instrument politique qui nous permet d'enlever le pouvoir à celui qui en fait un mauvais usage", a confié à l'AFP la sénatrice Simone Tebet (PDMB, centre droit).
"La destitution de Rousseff est une grande victoire de la démocratie, une libération de notre pays de la gauche qui voulait se maintenir au pouvoir", a affirmé à l'AFP Janaina Paschoal, une des trois juristes ayant lancé la procédure.

Isolée

Durant la première journée de cette session historique, les sénateurs de gauche ont soulevé des questions de procédure, toutes rejetées, puis plusieurs juristes ont été entendus comme témoins.

Mercredi soir, Dilma Rousseff avait appelé ses partisans, rassemblés dans un petit théâtre de Brasilia, à "garder espoir", promettant de se battre "avec la même force que quand (elle avait) lutté contre la dictature militaire". Mais elle semble bien isolée, même dans son propre camp. Mercredi, la direction du PT a rejeté à une très large majorité sa proposition de consulter les Brésiliens par référendum sur l'organisation d'élections anticipées au cas où elle serait rétablie dans ses fonctions par le Sénat.

Sa probable destitution mettrait fin à 13 ans de gouvernements du PT, fondé par Lula. L'ex-ouvrier devenu président a incarné un Brésil en plein boom socio-économique, dont les programmes sociaux ont sorti près de 40 millions d'habitants de la misère.

Il est aujourd'hui inculpé pour "tentative d'entrave à la justice" dans le scandale de corruption touchant le géant public pétrolier Petrobras, une affaire qui a éclaboussé tout autant le PT que le parti de Michel Temer, et la majeure partie de l'élite politique.

Et le "miracle" brésilien est révolu: le pays est entré en 2015 dans la pire récession depuis des décennies, sur fond d'inflation élevée, d'explosion du chômage - qui frappe désormais 11 millions de Brésiliens - et un déficit budgétaire de plus de 45 milliards de dollars.

V.R. avec AFP