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Soudan: le président déchu Omar el-Béchir déféré au parquet

L'ancien président soudanais Omar el-Béchir lors de sa première apparition publique depuis sa destitution, le 16 juin 2019 à Khartoum.

L'ancien président soudanais Omar el-Béchir lors de sa première apparition publique depuis sa destitution, le 16 juin 2019 à Khartoum. - Ebrahim Hamid - AFP

Il s'agissait de la première apparition publique de l'ancien président depuis sa destitution par l'armée le 11 avril dernier.

L'ex-président soudanais Omar el-Béchir a été déféré ce dimanche au parquet en charge des affaires de corruption à Khartoum, sa première apparition en public depuis sa destitution par l'armée en avril sous la pression de la rue.

Vêtu de la traditionnelle djellaba blanche et d'un turban, l'ancien homme fort du Soudan est arrivé de sa prison escorté par un convoi de véhicules militaires et des membres des forces de sécurité lourdement armés, selon un correspondant de l'AFP devant les locaux du parquet.

"L'accusé Omar el-Béchir a été (...) informé des accusations qui pèsent contre lui, pour la possession de devises étrangères, corruption et réception de cadeaux de manière illégale", a déclaré aux journalistes un responsable du parquet, Aladdin Dafallah.

Les chefs d'accusation ont été lus à l'ancien président en présence de son avocat, selon le responsable. Omar el-Béchir est reparti au bout de quelques minutes, a constaté le correspondant de l'AFP.

Destitué par l'armée le 11 avril

Porté au pouvoir par un coup d'Etat en 1989, l'ancien président soudanais a été destitué et arrêté par l'armée le 11 avril à Khartoum, sous la pression d'un mouvement de contestation inédit, déclenché en décembre par le triplement du prix du pain.

Jeudi, l'agence de presse officielle soudanaise Suna avait annoncé que l'ex-chef d'Etat était accusé "de possession de devises étrangères, d'avoir acquis des richesses de façon suspecte et illégale et d'avoir ordonné (l'état) d'urgence".

Il aussi l'objet de poursuites pour les meurtres de manifestants durant la répression de la contestation. Il est également visé par des mandats d'arrêts par la Cour pénale internationale (CPI) qui veut le voir répondre de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre pour le conflit au Darfour (ouest), qui a fait près de 300.000 morts selon l'ONU. Mais les militaires au pouvoir ont affirmé qu'ils ne comptaient pas le transférer au tribunal international.

128 morts depuis la dispersion du sit-in le 3 juin

Après avoir obtenu sa chute, des milliers de manifestants étaient restés mobilisés en maintenant un sit-in devant le QG de l'armée à Khartoum, réclamant que le Conseil militaire cède le pouvoir aux civils. Mais le 3 juin, ce sit-in a été dispersé selon des témoins par des hommes armés en tenue militaire. La répression s'est poursuivie pendant plusieurs jours.

Selon un nouveau bilan publié dimanche soir par un comité de médecins proche de la contestation, 128 personnes ont ainsi été tuées depuis le 3 juin. Les autorités ont parlé de 61 morts.

"Nous travaillons dur pour envoyer à la pendaison ceux qui ont fait ça", a lancé dimanche le numéro deux du Conseil militaire, le général Mohammed Hamdan Daglo, dit "Hemeidti". Ce général est à la tête des Forces de soutien rapide (RSF), des paramilitaires accusés par les chefs de la contestation et des ONG d'être à l'origine de la violente dispersion.

Des "erreurs" lors de la dispersion

"En ce qui concerne la dispersion du sit-in, on ne va pas vous décevoir, ni décevoir les familles des martyrs", a-t-il assuré lors d'une allocution retransmise à la télévision publique.

Jeudi, le Conseil militaire avait pour la première fois regretté des "erreurs qui se sont produites" lors de la dispersion, mais avait assuré ne pas l'avoir ordonnée et précisé que l'objectif de l'opération était tout autre.

Samedi, le porte-parole de la commission d'enquête des militaires a révélé des conclusions préliminaires selon lesquelles "des officiers et des soldats sont entrés sur les lieux du sit-in sans l'ordre de leurs supérieurs", même si le rapport n'est pas finalisé. Les appels en faveur d'une enquête indépendante se multiplient, au Soudan et à l'étranger.

Avec AFP