BFMTV
Maroc

Séisme au Maroc: l'aide internationale peine à arriver, Rabat veut éviter un effet "contre-productif"

Plus de 48 heures après le terrible séisme qui a frappé le sud-ouest de Marrakech, seulement quatre pays ont été autorisés à envoyer de l'aide sur place. Une décision prise après "une évaluation minutieuse des besoins sur le terrain", assure le gouvernement marocain qui craint un effet "contre-productif".

Une accusation grave qui a provoqué une vive colère. Le président de l'association Secouristes sans frontières, Arnaud Fraisse, a affirmé ce dimanche que ses équipes au Maroc n'ont "toujours pas" reçu l'accord de Rabat pour intervenir après le terrible séisme qui a fait au moins 2122 morts. Selon lui, les équipes de secours sont "bloquées" par le gouvernement marocain.

La Croix-Rouge internationale a, elle, alerté sur l'importance de l'aide humanitaire à venir. Les "24 à 48 heures (sont) critiques" et il y aura des besoins pour "des mois voire des années", a-t-elle déclaré.

Rabat n'a en effet toujours pas formulé officiellement une demande d'aide internationale. Dimanche soir, le Maroc a accepté l'aide de seulement 4 pays, dont l'Espagne et la Grande-Bretagne.

Séisme au Maroc : 2 122 morts, les recherches continuent – 10/09
Séisme au Maroc : 2 122 morts, les recherches continuent – 10/09
15:19

En attendant le déploiement des équipes de sauvetage étrangères sur le terrain, les autorités marocaines ont commencé à dresser des tentes dans le Haut-Atlas, où des villages ont été entièrement détruits par le séisme.

"Ils préfèrent laisser les pauvres gens mourir"

"Le Maroc essaye pour l'instant de coordonner sa propre aide", expliquait quelques heures plus tôt Patrick Sauce, éditorialiste politique internationale BFMTV. "Entre les différents étages: local, régional, national. Il y a des instructions qui ont été données par le Roi Mohammed VI. Pour l'instant, les Marocains gèrent le Maroc", résumait-il.

Un choix vivement critiqué par des centaines d'internautes sur les réseaux sociaux. "Gestion criminelle d'une catastrophe jamais vu depuis des siècles", écrit ainsi sur X (ex-Twitter) une internaute. "Ils préfèrent laisser les pauvres gens mourir plutôt que d’accepter l’aide des pays tiers quelle honte", dénonce une autre utilisatrice du réseau social.

Pourquoi un tel délai?

Tout en remerciant tous les pays qui ont proposé l'envoi de secouristes, le ministère affirme que le Maroc a accepté celle de quatre d'entre eux uniquement "après avoir procédé à une évaluation minutieuse des besoins sur le terrain et en tenant compte du fait qu'une absence de coordination pourrait être contre-productive".

Invité ce lundi matin sur France 2, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a lui estimé que "le Maroc est capable de répondre à ces difficultés", rappelant que "la France se tient à la disposition de nos amis marocains".

D'autres offres pourraient être acceptées à l'avenir "si les besoins devaient évoluer", précise le communiqué du ministère marocain de l'Intérieur. "Les premiers jours, c’est forcément très difficile, le gouvernement [marocain] a besoin de temps pour s’organiser, explique à nos confrères du HuffPost Ismaïl Hassouneh, médecin et secrétaire national du Secours populaire.

"Les trois premiers jours, il met en place ce que l’on appelle le 'premier plan' avec notamment un bilan de la situation et des besoins. C’est seulement ensuite qu’il entre vraiment en contact avec l’aide étrangère", assure-t-il.

"Ils ont empiré la situation"

Sur place, les secours doivent pourtant dès maintenant avancer difficilement jusqu'aux villages les plus reclus et les plus touchés. Sur X, une journaliste du New York Times, Aida Alami, affirmait que des villageois tentaient eux-mêmes de déblayer à mains nues, faute de voir arriver les secours.

"Beaucoup de témoignages se ressemblent: 'on a réussi à sortir des blessés des décombres, et ils sont morts quelques temps après n’avoir reçu aucun soin médical'", écrivait-elle.

Et quand des secouristes sont intervenus, certains ont "empiré la situation", assurait au micro de BFMTV une habitante d'Amizmiz, près de l'épicentre du séisme, qui a perdu son cousin de 20 ans. "Ils n'ont pas été professionnels, il ne savaient pas quoi faire", a-t-elle déclaré.

Quelques secouristes Français n'ont toutefois pas attendu le "go" des autorités et se sont rendus sur place dans la nuit de samedi à dimanche. "Là où nous sommes, c'est la première fois qu'ils voyaient des secours", a témoigné dimanche soir sur BFMTV Patrick Villardry, membre de l'association Ulis (Unité légère d'intervention et de secours).

De nombreux pays, de la France aux États-Unis, en passant par Israël, avaient proposé leur aide au Maroc après le séisme dévastateur. La France est prête à "intervenir" pour venir en aide au Maroc "à la seconde" où les autorités marocaines le demanderont, a ainsi déclaré dimanche le président Emmanuel Macron.

"Nous avons mobilisé l'ensemble des équipes techniques et de sécurité pour pouvoir intervenir quand les autorités du Maroc le jugeront utile", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à l'issue du sommet du G20 à New Delhi, qualifiant le séisme de "tragédie qui nous touche tous".

Ariel Guez