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Les migrants tunisiens ne voient pas Paris en rose

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par Nicholas Vinocur PARIS (Reuters) - Pour des centaines d'immigrés tunisiens, le rêve d'une vie meilleure en France prend des allures de...

par Nicholas Vinocur

PARIS (Reuters) - Pour des centaines d'immigrés tunisiens, le rêve d'une vie meilleure en France prend des allures de cauchemar.

Passés, pour la plupart, par l'île italienne de Lampedusa, ces migrants en sont réduits à se bousculer pour recevoir les vivres que leur distribuent des bénévoles dans une dizaine de camps de fortune aménagés dans la capitale.

"En Tunisie, on regardait la France comme la patrie des droits de l'Homme mais depuis que nous sommes là, nous voyons bien qu'on ne veut pas de nous," déplore Taoufik ben Ali, 33 ans, qui était boucher à Tunis et a échoué dans un de ces camps, dans le XIXe arrondissement, en bordure du périphérique parisien.

"Nous sommes déçus de ce que nous voyons en France", ajoute-t-il.

Dans le square où cohabitent Taoufik et ses compagnons, les ordures s'amoncellent près des grillages. Les hommes tentent de dormir sur des cartons dépliés sur une pelouse fatiguée. Ils se plaignent de l'absence de douches ou de toilettes.

Pendant ce temps, à Rome, le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi, et Nicolas Sarkozy lançaient mardi une initiative commune pour demander la révision du traité européen de Schengen sur la libre circulation des personnes.

Les relations franco-italiennes ont été mises à rude épreuve ces dernières semaines par les conséquences du "printemps arabe" en Afrique du Nord, qui s'est traduit par l'afflux d'au moins 25.000 immigrés illégaux en Italie depuis le début de l'année.

"MATCH DE FOOT"

L'Italie, qui reproche à ses partenaires européens un manque de solidarité, a distribué à ces migrants des titres temporaires de séjour, leur ouvrant la porte du reste de l'espace Schengen. Une mesure critiquée par la France qui a fait savoir qu'elle n'entendait pas "subir" cet afflux.

"C'est un grand match de foot et nous sommes le ballon", commente Taoufik. "Espérons que l'arbitre arrête bientôt le match".

Cet arbitre devra être l'Union européenne, précise-t-il.

Taoufik avait fait une première tentative pour rejoindre la France mais avait été refoulé à Nice. Revenu à Milan, il est finalement parvenu à rejoindre Lyon en car avant de gagner Paris.

"Pourquoi l'Italie aide-t-elle les Tunisiens et pas la France ?", interroge-t-il. "Je ne comprends pas. Aujourd'hui, les Français regardent les Tunisiens comme des animaux. Dans le bus, des femmes se pincent le nez quand elles me voient."

Taoufik et les autres sentent bien qu'ils jouent un rôle dans un débat qui les dépasse, que l'immigration est devenue un thème politique en France alors que se profile la campagne pour l'élection présidentielle de 2012.

Ils n'en espèrent pas moins une amélioration prochaine de leur sort.

"Sarkozy nous laisse en plan pour ne pas en encourager d'autres à venir", dit Taoufik. "Mais quand les choses se seront calmées, nous pourrons travailler, inch'Allah."

Édité par Patrick Vignal