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La France poursuit la guerre en Libye : une bonne décision ?

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Les frappes aériennes en Libye ont débuté il y a bientôt quatre mois, ont coûté cher et la situation sur place semble figée. Ce mardi, le Parlement a approuvé la poursuite des opérations militaires françaises en Libye. Une bonne décision selon vous ?

Les frappes aériennes en Libye ont débuté il y a bientôt quatre mois. Au Parlement ce mardi, les députés ont approuvé la poursuite de l'opération militaire de la France en Libye.
La Constitution exige ce passage devant le Parlement après quatre mois de conflit, depuis la réforme constitutionnelle de 2008. A l'Assemblée, il n'y a pas eu de surprise : seuls les élus communistes et quelques socialistes et écologistes se sont opposés à la poursuite de la guerre.

« Une situation figée, sur le terrain… »

Sur le terrain, la situation militaire est dans l'impasse, « figée », estime Jean-Yves Moisseron, chercheur à l'Institut de Recherche pour le Développement et rédacteur en chef de la revue Maghreb-Machrek : « On a, à l’est, Benghazi et les insurgés ; à l’ouest, Kadhafi et deux tribus qui se sont alliées à lui. Et puis il y a deux poches de résistance des insurgés. Non seulement les positions se sont stabilisées, mais on s’approche du Ramadan, une période vraiment pas propice pour des opérations armées. Et puis on est aussi dans une situation où les tribus de l’est n’iront pas mourir pour Tripoli, et les tribus de l’ouest n’iront pas se battre pour Benghazi ; tout simplement parce que ce n’est pas chez eux ».

« Cette guerre coûte cher… »

Depuis quatre mois, cette intervention militaire a coûté environ 100 millions d'euros à la France, d'après le ministère de la Défense. Et ce week-end, Valérie Pécresse, ministre du Budget, a évoqué 160 millions... Les salaires des militaires représentent 27 millions d'euros. Et ce qui coûte le plus cher, ce sont les munitions : 70 millions en quatre mois. Il faut dire qu'un seul missile de croisière, utilisé contre les bases aériennes ou les centres de commandement de l'armée de Kadhafi, coûte 850 000 euros. Sans compter l'usure du matériel... « Cette guerre coûte cher, dit un député socialiste, et si on finance ça sur le budget de la Défense, bientôt, notre armée n'aura plus les moyens d'être efficace... »

« Il faut cesser immédiatement les combats »

Pour Roland Muzeau, député PC des Hauts-de-Seine, porte-parole des députés communistes, « il faut cesser immédiatement les combats. Parce qu’il n’y a pas d’issue par les armes en Lybie, poursuit-il. Et on est à la fois dans l’enlisement et dans l’engrenage. Kadhafi c’est vraiment l’image-même d’un régime exécrable, mais il est incontournable. Et on peut toujours ne pas vouloir négocier avec son ennemi, mais alors il faut qu’on m’explique comment on fait : il faut bombarder, raser Tripoli ? Qu’est-ce qu’il faut faire ?! ».

« La France doit aller jusqu’au bout »

De son côté, le député UMP du Val-d'Oise et président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Axel Poniatowski milite pour une poursuite de l’intervention militaire : « La France doit aller jusqu’au bout. On est dans une situation où on ne peut pas s’arrêter au milieu du guet. Et si nous abandonnions aujourd’hui il y aurait un risque très sérieux que les forces de Kadhafi reprennent le dessus ; ça veut dire qu’on abandonne les insurgés à leur sort… La situation, je l’espère, doit pouvoir se dégager d’ici la fin de l’été ; maintenant les avancées doivent être politiques ».

« On enverrait à Kadhafi le signal qu’il peut recommencer la répression sanglante »

Tout aussi favorable à la poursuite de la guerre, le député PS de la Manche, Bernard Cazeneuve ajoute : « On ne peut pas arrêter cette opération militaire aujourd’hui, sauf à envoyer le signal à Kadhafi qu’il peut reprendre le terrain perdu et rediriger vers les insurgés de Benghazi les armes dont il dispose encore. Et ce serait aussi lui envoyer le signal qu’il peut recommencer la répression sanglante. Mais en même temps l’opération militaire ne suffira pas ; il faut impérativement poursuivre les négociations politiques et diplomatiques pour trouver une issue politique à ce conflit, qui ne peut pas se résoudre par le seul moyen des armes ».

La Rédaction, avec Yann Abback