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Fièvre Ebola: doit-on craindre une épidémie du virus en Guinée?

Un échantillon de virus Ebola coloré et mis en lumière à l'aide d'un procédé de micrographie électronique à balayage.

Un échantillon de virus Ebola coloré et mis en lumière à l'aide d'un procédé de micrographie électronique à balayage. - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE

Le virus Ebola continue de faire peur en Afrique alors que quatre cas ont été confirmés à Conakry, la capitale de la Guinée. Maintenant que le virus a quitté la forêt pour la ville, risque-t-il d'y avoir une épidémie mondiale? Interview du professeur Philippe Brouqui.

Jusqu'ici épargnée, Conakry, la capitale de la Guinée, est touchée par une épidémie de fièvre Ebola, a-t-on appris ce vendredi. Quatre nouveaux cas de ce virus hautement contagieux y ont été confirmés. Ces personnes ont été placées en isolement à l'hôpital Donka, le plus grand de la ville.

Depuis le début de cet épisode de contagion, 77 personnes ont trouvé la mort sur 117 cas de fièvre hémorragique virale dans trois pays: Guinée, Liberia (8 cas) et Sierra Leone (6 cas). Rien qu'en Guinée où a été recensée la majorité des victimes, 66 personnes sur les 103 cas suspects sont mortes.

Que sait-on de ce virus et pourrait-il être importé en Europe? Le point avec le professeur Philippe Brouqui, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales de l'Institut Hospitalier Universitaire (IHU) Méditerranée infection.

Comment se transmet ce virus?

C'est un Filoviridae qui fait partie des fièvres hémorragiques. Son réservoir naturel est vraisemblablement des chauves-souris. La localisation est essentiellement l'Afrique centrale. Le mode de transmission le plus fréquent passe par les singes qui attrapent le virus et qui en meurent. C'est à partir des singes morts ou des animaux morts d'Ebola que l'homme se contamine dans un premier temps.

Les épidémies se propagent ensuite par contact interhumain, par le toucher de toutes les sécrétions du corps, le sang, les urines, les selles. La contagion se fait très souvent dans un contexte de soins, dans le milieu hospitalier par exemple, mais aussi dans un sens plus large, comme les soins de conservation des corps (NDLR: lors des rites funéraires).

Pourquoi réapparaît-il en Afrique?

Avec l'épidémie actuelle, les scientifiques estiment que le départ se situe dans la zone frontalière entre le haut Liberia, Nigeria et la Guinée, mais peut-être que les cas répertoriés à Conakry sont des cas secondaires. Il s'agit sans doute de gens qui ont rejoint la capitale pour se faire soigner.

Pourquoi ce virus fait-il si peur?

Il fait peur pour deux raisons. D'une part, parce que c'est très rapide. La mort survient dans les sept ou huit jours. D'autre part, la mortalité est de l'ordre de 90%. Après, s'agissant des maladies chroniques, la rage atteint quant à elle les 100% de mortalité. Mais elle tue en plus de temps et ne cause pas d'épidémies (NDLR: elle peut aussi être prévenue par un vaccin pendant la période d'incubation). Les grosses épidémies d'Ebola ont tué jusqu'à 300 ou 400 personnes, qui sont mortes d'un seul coup.

Il y a-t-il un risque pour que l'épidémie se propage?

Je n'y crois pas vraiment, mais il y a tout de même une différence avec les épidémies précédentes. Jusqu'à présent, les voies de communication étaient peu développées et les épidémies étaient circonscrites assez rapidement. La différence cette année est que visiblement les gens ont voyagé, ils ont fait plus de 1.000 ou 2.000 kilomètres. Si les gens voyagent rapidement, alors pourquoi ne prendraient-ils pas un avion pour venir en Europe?

Comment a-t-on pu croire à un cas au Canada?

Au début de la maladie, la fièvre d'Ebola n'est pas typique, le malade a de la fièvre, des douleurs abdominales, il n'y a pas encore d'hémorragies. Au départ, on ne peut qu'avoir des suspicions en fonction des contacts possibles qu'a eus la personne. Pour arrêter un diagnostic, il faut faire un test. Ce cas suspect au Canada a fait beaucoup de buzz dans les médias, les suspicions non confirmées sont finalement très courantes.

David Namias